Cela fait 16 ans, jour pour jour, que l'artiste le plus adulé de son temps par, notamment, les gens de sa région, rendait l'âme à la suite d'un tragique accident. C'était au printemps 1991, saison où la nature est en fête. C'était plus précisément un 8 mars, Journée mondiale de la femme. La femme dont il faisait sien le combat. Elle est présente dans toutes ses facettes dans son unique album. Tahar Oudjedi partit pour ne jamais revenir, laissant derrière lui ses proches, sa famille et ses amis dans une tristesse immense. Lui qui aimait tout le monde, qui était l'ami du pauvre, du simple citoyen. Qui ne se souvient, en effet, de ses funérailles qui avaient drainé une marée humaine, tant l'homme et l'artiste inspiraient respect et estime. C'était tous ces gens-là qu'il avait fait tant rêver, consoler par ses textes et mélodies. 16 ans se sont déjà écoulés depuis. Mais Tahar reste vivant. Son souvenir restera encore vivace dans le coeur de ses amis et de ses fans. Ses chansons sont aujourd'hui encore écoutées par des familles partout avec beaucoup de ferveur et d'émotion. Cette année, l'association Idles s'associe avec celles de la région pour rendre un hommage. Un grand hommage qu'il mérite. Grâce à cette initiative, Tahar reviendra parmi les siens, le temps d'un week-end. Mais quel week-end, puisqu'il sera celui de Tahar, un ami, un compagnon de partout et de toujours. Bienvenue chez toi l'artiste! Toi qui as chanté «Ay Imazighen, Lbabur, Taqcict, Tassa, Arrac, Taâzizt». Bienvenue à toi Tahar qui avais chanté une jeunesse malade de ses repères, une jeunesse dont les rêves sont brisés, une jeunesse pour qui la vie est plus une douleur qu'une joie qui n'est jamais là. Il avait crié le malaise et l'amertume d'une génération sacrifiée. Son style musical est à la fois celui de Aït-Menguellet et Farid Ferragui, alliant la rigueur poétique du premier à la mélodie sentimentale du second. Seul, face à l'incompréhension et au silence de la société. Bienvenue à toi qui a chanté l'amour, le vrai, celui que voudrait vivre tout jeune. Tahar s'inventa un rêve: quitter le pays pour rejoindre sa bien-aimée. Rêve qui se réalisera un peu plus tard. Dans «Al babor», tu nous disais Tahar, que rien n'est plus fort que l'amour. Ce sentiment qui fait traverser les mers qui donne le courage pour dépasser tous les obstacles. Toi seul, sais combien ils sont nombreux. Hélas! Ton destin te rattrapera puisque, trois mois plus tard, une mort tragique te ravira aux tiens. Droiture, franchise, honnêteté, générosité sont autant de vertus que tous les habitants d'Akfadou reconnaissent à l'homme. Né en 1962, dans la même localité, Tahar Oudjedi entamera sa courte vie d'artiste en 1990. Une vie dure car il dut vendre son véhicule pour créer sa propre maison d'édition (éditions Tamazight) et produire lui-même son premier et dernier album de six titres qui fut tiré à 10.000 exemplaires, tirage à présent épuisé alors que sa cassette est toujours demandée par les citoyens. Dans sa prime jeunesse, il était présent là où il y avait du mouvement. Il avait fait partie des comités de vigilance au lycée Ihaddaden de Béjaïa lors des événements de 1980/1981. Il faisait partie de la troupe théâtrale, du journal, du club audiovisuel du lycée. Il était partout là où on avait besoin de lui. Dans les mariages, il ne refusera jamais d'animer les soirées. Ses amis et fans ont les larmes aux yeux lorsqu'ils se remémorent les fêtes traditionnelles dont Tahar était toujours l'animateur en chef. Ils se souviennent de sa jovialité, de son humour, comme s'en souviennent aussi ses amis dont il avait animé les mariages. «Il est toujours vivant pour moi, je le vois chaque soir me rappelant mon mariage qui, grâce à lui, fut une grande fête», disait un ami pour qui il avait chanté lors de son mariage. Le rossignol continue d'égayer le coeur des jeunes et d'alléger leurs souffrances par ses chansons. Repose en paix Tahar! Les amoureux de la poésie ne t'oublieront jamais. Tu as chanté pour alléger les souffrances et tu continues de le faire malgré ta lourde absence! Nous t'aimons tous, Tahar, mon ami, tes chansons resteront à jamais un hymne à l'amour.