«Comment se peut-il que cohabitent dans le même monde autant de richesse au Nord et de pauvreté au Sud?» A la veille de la célébration de la Journée mondiale de lutte contre la pauvreté (171 octobre), le film La fin de la pauvreté? du réalisateur Philippe Diaz, sera projeté «exceptionnellement» ce vendredi à la salle Cosmos de Riad El Feth, à l'initiative de l'Agence algérienne pour le rayonnement culturel (Aarc) en partenariat avec la maison de production et de distribution MD Ciné. Avec La fin de la pauvreté? le réalisateur s'est attaqué à un fléau mondial dont la principale manifestation (la malnutrition) touche, de manière permanente, environ 800 millions de personnes dont 300 millions d'enfants, a-t-on expliqué. Se demandant qu'avec tant de richesse dans le monde, pourquoi y a-t-il encore tant de pauvreté? S'aventurant au-delà des réponses «populaires» sur les origines de la pauvreté, The End of Poverty? se demande si les véritables causes ne viennent pas d'une orchestration des pays riches pour exploiter les plus pauvres, de l'époque coloniale à aujourd'hui. Les peuples qui luttent contre la pauvreté répondent, condamnant le colonialisme et ses conséquences: appropriation des terres, exploitation des ressources naturelles, dette, néolibéralisme, demande permanente dans laquelle 25% de la population mondiale utilisent 85% des richesses. Des favelas d'Amérique latine aux bidonvilles d'Afrique, des économistes de renom, des personnalités politiques et des acteurs sociaux révèlent comment les pays développés pillent la planète; un saccage qui menace ses capacités à soutenir la vie et accroît toujours plus la pauvreté... Selon un rapport de l'ONU, toutes les trois secondes, une personne meurt de faim. Ce constat établi, le réalisateur s'est surtout attaché à en rechercher les causes, en se basant sur les images qu'il a récoltées dans le monde. Philippe Diaz et son équipe ont, durant deux ans, posé leur caméra dans les lieux les plus pauvres de la planète et recueilli avec respect et fidélité les témoignages de leurs habitants. La question est posée d'emblée: «Comment se peut-il que cohabitent dans le même monde autant de richesse au Nord et de pauvreté au Sud?» S'appuyant sur des interventions d'experts aussi variés qu'A. Sen, J. Stiglitz ou E. Toussaint entre autres, le réalisateur, auteur précédemment du Nouvel Ordre mondial, redonne dans ce documentaire une nouvelle légitimité à une thèse controversée, défendue par Jeffrey D. Sachs dans son ouvrage éponyme: tout découle de 1492, des colonisations successives du Sud par le Nord et de l'exploitation des richesses du premier au profit du second. Banque mondiale, FMI, dette paralysante ne sont que les nouveaux visages de ce phénomène qui continue de creuser l'écart entre pays industrialisés et tiers-monde. Réalisé avec une rigueur proche de l'austérité (quelque chose à l'opposé de Michael Moore), sur un dispositif métronomique de témoignages, entretiens, chiffres, ce travail, s'il se révèle à la fois nécessaire et convaincant, n'échappe pas pour autant à des longueurs et des redites. Un montage plus serré et quelques coupes eussent mieux servi le propos et rendu sans doute plus percutants ses enseignements. Philippe Diaz fait le procès «émouvant et implacable» d'un monde où des performances scientifiques et technologiques «extraordinaires peuvent cohabiter avec la misère de millions d'êtres humains, encore plongés dans le Moyen-Age», a-t-on souligné. Philippe Diaz fait partie des réalisateurs de longs métrages documentaires, qui ont choisi de porter à l'écran leurs engagements éthiques et politiques. Cette tendance, jusque-là limitée à des réseaux restreints, accède, depuis une dizaine d'années surtout, aux grands réseaux commerciaux en salle. Il a produit de nombreux films en France et à l'étranger avant de s'installer, en 1991, à Los Angeles. Il a également fondé «Cinéma Libre Studio» qui produit des films de fiction et des documentaires à caractère social et économique. En tant que producteur, Philippe Diaz est connu à travers notamment les longs métrages Ville étrangère, La Nuit Bengali, Pierre et Djemila et Rue du départ. Depuis 2000, il s'est mis à la réalisation, et sa première oeuvre Nouvel Ordre mondial a été sélectionnée à la «Semaine de la critique» du Festival de Cannes.