Les citoyens voient leur rêve d'acquérir des véhicules particuliers s'évaporer. Le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, persiste et signe. Les banques ne prêteront plus d'argent pour le crédit à la consommation, excepté l'immobilier. Et ce n'est pas le FMI qui va lui faire changer d'avis. La déclaration faite avant-hier à Alger à la clôture d'une réunion de son parti met aussi fin à l'espoir, entretenu pendant quelque temps par le ministre des Finances, Karim Djoudi. Selon ce dernier, aucune décision n'était définitive, ce qui n'est apparemment pas l'avis de son Premier ministre. La raison du maintien de cette interdiction, qui ne concerne pas que les véhicules, trouve sa genèse dans le fait que les officiels disent vouloir limiter le transfert des devises à l'étranger. Or, les banques ne sont pas sûres que le taux des impayés est plus élevé que dans d'autres contrées. Les responsables de ces mêmes banques, à l'instar de celui de FransaBank, avaient annoncé depuis quelques jours que le retour à ce genre de crédit était inéluctable. Le Premier ministre insiste aussi sur le maintien du crédit documentaire en tant que seul moyen de paiement des importations. Selon Mustapha Mekidèche, consultant en économie, il est tout à fait normal que le Premier ministre réaffirme ces positions de principe. Rien n'empêche pourtant que la prochaine tripartite n'assouplisse le procédé. Selon notre source, même les PME sont pénalisées par ce régime. Pour d'autres, à l'image de Abderrahmane Mebtoul, professeur en économie, il n'est pas sûr que la transition au crédit documentaires soit la solution miracle de la traçabilité ou de la lutte contre les surfacturations. Les banquiers ont déjà signalé de leur côté, qu'on ne s'improvise pas spécialiste du crédit documentaire du jour au lendemain. Certaines sources contactées par L'Expression vont jusqu'à affirmer que cette mesure peut même s'avérer fatale pour les banques publiques. Les délais d'obtention du crédit, même documentaire, sont plus courts auprès des banques à capitaux étrangers. C'est le plus normalement du monde que les entreprises d'importation vont se diriger vers elles et même les sociétés publiques de production devront faire de même si elles doivent importer des matières premières ou des pièces de rechange. Le résultat en serait que les banques publiques n'auraient à héberger que des sociétés publiques et privées au bord de la faillite. Elles auront recours à l'assainissement du Trésor qui y injectera de l'argent au lieu de le dédier à l'investissement. Ce qui aura à son tour un effet négatif sur la création d'emplois. Le professeur Mebtoul doute que la suppression des crédits à la consommation permettrait une baisse de la facture des importations globalement. La production locale est mineure, on importe presque 75% de nos besoins. Cette mesure permettra-t-elle de dynamiser une production et une exportation hors hydrocarbures? s'interroge-t-il. Il pense que la réduction de l'envolée de la facture des importations réside fondamentalement dans la maîtrise de la dépense publique globale. Il ne faut donc pas se tromper de cible. Ne s'agit-il pas, pour paraphraser les militaires, d'insérer les tactiques au sein de la fonction stratégique et de s'attaquer au secondaire et non à l'essentiel? selon cet économiste. Toutes ces considérations sont balayées d'un revers de main. D'autres ministres que Karim Djoudi avaient souhaité plus de clémence, cette fois, vis-à-vis des sociétés locales. Le ministre de la PME et de l'Artisanat, Mustapha Benbada, était d'avis pour que le crédit à la consommation soit rétabli, au moins pour les produits fabriqués par les entreprises locales. Mais la décision de Ouyahia tombe comme un couperet. Certains analystes n'arrivent pas à saisir la nature des postes dans lesquels il y a lieu de faire des économies. S'agit-il seulement des produits de consommation ou même les intrants nécessaires au processs de production qui seraient concernés? En plus de réduire le niveau de vie des citoyens, ces mesures sont appréhendées par les spécialistes comme étant peu pertinentes pour le reste de l'économie. En fin de compte, le conseil du FMI a conduit à l'effet contraire à celui souhaité. Au nom de la souveraineté, les robinets sont fermés. Même l'interdiction d'importation des véhicules de moins de trois ans est maintenue.