Retour à la case départ ! L'histoire a de ces retournements époustouflants. Kaboul a le feu vert de Washington pour négocier avec les talibans et comme intercesseur les deux capitales ont choisi le géniteur de ces extrémistes, l'Arabie Saoudite. Pour la forme, le Conseil des oulémas afghans a donné également son quitus au président Hamid Karzaï qui, lui, voit dans les négociations le sauvetage de son propre pouvoir.Des élections présidentielles doivent avoir lieu en juillet et Karzaï installé à Kaboul par le président Bush ne veut pas lâcher le fauteuil bien qu'il soit honni par les siens et même chez ses parrains étrangers qu'il a déçus. Le coup de pouce du roi Abdallah d'Arabie Saoudite lui est indispensable pour amadouer les chefs tribaux, tous élèves du wahhabisme. Il est à rappeler que la médiation saoudienne a commencé en janvier dernier à l'initiative du prédécesseur d'Obama en personne qui s'était rendu compte que le piège afghan pouvait conduire les Etats-Unis à la déconfiture, comme l'ex-Union soviétique dans les années 1980 et qui n'a pas fini de payer le prix de sa débâcle face aux islamistes. Le chef des services de renseignements saoudiens avaient rencontré de hauts responsables du gouvernement de Kaboul pour ouvrir une ligne de communication avec les talibans, dont il ne faut pas l'oublier, ont été créés par Riyad pour lutter contre le communisme puis pour propager à travers le monde le wahhabisme et dans les pays musulmans en utilisant la violence terroriste. L'Algérie en sait quelque chose. Le très conservateur régime wahhabite d'Arabie Saoudite ne fut-il pas l'un des seuls pays au monde à avoir reconnu les talibans lorsqu'ils prirent les commandes de l'Afghanistan en 1996, y imposant leur vision ultra-rigoriste de la loi islamique. Le nouveau président américain Barack Obama s'est engagé à envoyer des renforts de 17 000 hommes dans le pays pour tenter d'inverser la tendance et sortir du statu quo actuel. Il aspire à ce que les pays européens renforcent également leur présence militaire. Dans le même temps, il a donné son onction pour l'ouverture d'un dialogue avec ce qu'il a appelé “les talibans modérés”. Le Pakistan également aux prises avec l'extrémisme islamiste voit d'un bon œil les négociations afghano-talibanes. Islamabad est la proie d'une violence islamiste inégalée au point d'admettre l'application de la charia dans ses provinces frontalières de l'Afghanistan dans l'espoir d'isoler les talibans. Les Etats-Unis soupçonnent cette zone de non-droit d'abriter les chefs talibans, dont le mollah Omar, leur idéologue qui serait caché dans la province du Balouchistan (sud-ouest pakistanais). Selon le New York Times, des responsables américains envisageraient d'élargir au Balouchistan les opérations de tirs de missiles actuellement en cours sur les zones pakistanaises à la frontière afghane. Les services de renseignements occidentaux et afghans soupçonnent depuis longtemps qu'Omar et d'autres hauts responsables du gouvernement taliban chassé par l'invasion américaine de 2001 ont trouvé refuge à Quetta, capitale du Balouchistan, ou dans sa région. Selon Washington, des frappes plus nombreuses dans les zones tribales le long de la frontière afghane ont permis de tuer plusieurs hauts responsables d'Al-Qaïda depuis l'année dernière. L'administration Obama a autorisé ces frappes, menées, selon toute probabilité, par des drones, appareils sans pilote de la CIA. Elle devrait d'ici avril annoncer la nouvelle stratégie américaine pour la région. directeur de la CIA, Leon Panetta est depuis le début de la semaine dans la région, entre Kaboul, Khandar et Islamabad. D. Bouatta