La crise mondiale a poussé notre pays, à l'instar des autres nations de par le monde, à abandonner momentanément son modèle d'économie de marché. Les avis des experts et autres observateurs quant à la nouvelle politique économique que prône le pays, révélée à travers la loi de finances complémentaire pour 2009, semblent se rejoindre sur presque la majorité des dispositions. En effet, hormis quelques points de divergence, une catégorie d'économistes, du moins ceux qui se sont exprimés jusque-là, ont approuvé la nouvelle orientation réservée à l'économie nationale par les pouvoirs publics. De par leur position, certains d'entre eux ont revivifié leur fibre nationaliste, d'autres se sont rendus à l'évidence, celle-là même qu'impose la conjoncture mondiale. La notion de patriotisme économique, protectionnisme économique, peu importe l'appellation, refait surface. Cette théorie revient avec insistance ces derniers mois dans les sujets de discussions de l'opinion publique nationale. Un consensus généralisé autour de l'intérêt suprême du pays semble se dessiner progressivement au sein surtout des spécialistes soucieux de l'avenir de leur pays. La compétition moderne, qui bat son plein actuellement dans le monde, s'effectue par les entreprises et les universités. En termes plus clairs, pour reprendre l'expression du professeur Mourad Preure, professeur de stratégie et de géopolitique, les conquêtes territoriales n'ont de sens que si elles se justifient économiquement. Mieux, elles cèdent progressivement la place aux “invasions” commerciales. Une chose est certaine, la crise a montré les conséquences, voire les limites de l'ultralibéralisme qui a envahi la planète ces dernières décennies. L'économie fondée essentiellement sur le marché a, par conséquent, prouvé ses insuffisances. Le meilleur exemple à choisir pour illustrer un tel constat vient directement des Etats-Unis, pays réputé pour être un fervent défenseur, voire précurseur de ce modèle économique et qui a fini par recourir au patriotisme pour sauver… sa peau face à la crise. L'écrasante majorité des pays occidentaux ont fini par abandonner leur idéologie “libéraliste” et la remplacer l'espace d'une période à déterminer par une autre ayant pour fondement la protection de leur économie. Les récentes décisions prises par l'Etat constituent une véritable rupture avec ce qui a été appliqué par le passé. Les pouvoirs publics semblent prendre conscience des points faibles de l'économie nationale dans ce magma d'incertitudes multidimensionnelles. M. Preure plaide, à ce propos, pour un meilleur cadre de dialogue et une concertation plus large avec tous les acteurs économiques du pays, à commencer par le patronat. L'efficience du patriotisme économique, explique-t-il, ne peut être garantie que par une compétitivité, la capacité d'innovation des entreprises et des universités. Toutes ces compétences doivent être mises au service de la jeunesse à qui l'on doit offrir les conditions nécessaires pour son épanouissement et son bien-être dans son pays et de la dissuader enfin de le quitter. “Je pense que ces mesures sont positives, mais doivent se conjuguer avec une modernisation réelle et la mise en œuvre des réformes. Ces décisions ne peuvent être efficaces sans une politique moderne et déterminée de la PME. Chose qui manque cruellement pour notre pays”, affirme l'économiste. Toutefois, protectionnisme ne veut pas dire se recroqueviller sur soi-même et s'enfermer par appréhension du monde extérieur. Au contraire, il y a lieu de multiplier les opérations de partenariat avec les étrangers. “L'économie nationale doit être attractive dans laquelle se redéploient des entreprises à haute valeur ajoutée, des centres de recherche, des lieux de savoir… Bref, notre pays doit rayonner sur les plans économique, scientifique, culturel pour pouvoir s'imposer en tant que puissance à l'avenir”, suggère M. Preure. Ainsi, les vulnérabilités constatées sur les plans économique, juridique, technologique, commercial, financier gagneraient à être identifiées d'abord et prises en charge par la suite, tout en mobilisant l'initiative publique et privée. Il faut arriver de ce fait à allier la logique de l'Etat et ses intérêts avec ceux de l'opérateur privé.