Si elle est à saluer, cette augmentation ne risque pas moins de provoquer une incompréhension dans certains secteurs auxquels le gouvernement fait la sourde oreille. Bonne nouvelle pour les moudjahidine en cette fin de mois de janvier, leur ministre a annoncé, mercredi dernier, une augmentation de leur pension. Une augmentation conséquente qui est de l'ordre de 25% du montant perçu actuellement. Elle prendra effet à compter du 1er janvier 2010. Le ministre, qui présidait mercredi une réunion d'évaluation annuelle des wilayas, a justifié cette augmentation en expliquant qu'elle s'inscrivait dans le cadre de l'amélioration du niveau de vie de cette catégorie car, poursuit-il, “le secteur œuvre toujours à augmenter cette pension à chaque revalorisation du salaire national minimum garanti”, porté comme on le sait à 15 000 dinars depuis la dernière tripartite. Pour les pensions qui ne sont pas indexées sur le Smig, Mohamed Chérif Abbas a fait état de discussions avec le ministre des Finances en vue d'une augmentation. Le ministre des Moudjahidine, pour faire passer ces augmentations qui interviennent dans un contexte social extrêmement tendu, à cause des revendications salariales exprimées dans divers secteurs, a recours à un argument d'autorité, à savoir le président de la République avait donné des orientations dans ce sens pour “garantir une vie digne” à la catégorie des moudjahidine, des veuves de chouhada, des ayants droit et des invalides de guerre, et à “l'amélioration des prestations offertes à tous les niveaux”, a-t-il ajouté. Les augmentations des pensions des moudjahidine ne peuvent être que saluées, d'autant plus que nombre d'entre eux, contrairement à une certaine opinion répandue, sont loin de vivre dans le confort. Le cas de la moudjahida Djamila Bouhired, encore qu'elle ne soit pas la plus mal lotie, révélé par la presse, a soulevé une profonde émotion. Cette catégorie à laquelle l'Algérie restera éternellement redevable au droit à une vie descente et digne. C'est indiscutable. Sauf que l'opinion, mais en particulier le monde du travail, risque d'y voir une politique de deux poids et deux mesures du gouvernement. En effet, nombre de secteurs connaissent actuellement des tensions à cause de la question salariale. C'est le cas de la santé dont différents personnels sont en grève ouverte, ce sera le cas de l'éducation qui va renouer avec la grève à partir d'aujourd'hui. Sans parler du secteur industriel dont deux bastions, et pas des moindres, la SNVI et Arcelor Mittal, ont dû hausser le ton pour amener le gouvernement à infléchir son intransigeance. L'argument du gouvernement, selon lequel l'Etat n'est pas en mesure de répondre favorablement aux revendications salariales des travailleurs, est difficilement acceptable, dès lors qu'il a consenti une augmentation de 25 % aux moudjahidine sans que ces derniers n'aient eu à faire une quelconque action de protestation. Du moins officiellement. Après avoir décidé de revoir à la hausse les pensions des moudjahidine et de leurs ayants droit, il sera difficile pour les pouvoirs publics de faire valoir l'argument d'austérité sous peine d'exacerber les frustrations dans le monde du travail.