Difficile de placer l'homme qu'il faut à la place qu'il faut, lorsque l'on n'est pas soit-même à sa place ! Cinquante après, à défaut d'asseoir une véritable politique industrielle, on n'a non plus jamais réussi à calquer notre économie sur un quelconque schéma déjà existant à travers la planète. Quand on n'est pas capables, soyons alors résolument copieurs ! D'autant que le monde de la copie, voire du faux, on le côtoie au quotidien chez nous. D'ailleurs, les responsables du secteur public, tous domaines confondus, ne savent plus distinguer le vrai du faux. Ils ont perdu leur flair. Parce que le vrai, le produit local, souvent synonyme de qualité, il se fait rare. De plus en plus rare ! Le mal a eu raison du bien L'homme d'affaires algérien évolue dans un environnement économique hostile. Il est constamment confronté à des aléas que seule l'administration ne voit pas, ou ne veut pas voir ! Ces aléas malfaisants sont de nature à freiner toute initiative. Le mal a eu raison du bien. Les femmes et les hommes d'affaires, intègres et honnêtes, refusent de subir le diktat de responsables véreux, parachutés aux commandes dans les différents rouages de l'Etat. Tout le monde en parle, tout le monde le sait, les plaintes s'amoncellent au niveau de la justice, mais la réaction est trop lente, parfois même jugée trop charitable. Les chefs d'entreprise algériens, organisés en forum, déplorent le climat à la fois malsain et contraignant qui entoure le monde des affaires. La seule solution que semblent avoir trouvé les décideurs pour que l'industrie publique ne soit pas trop distancée du secteur privé est d'empêcher ce dernier de prendre son envol. “Je ne peux pas avancer, donc je te retiens”, semble être la nouvelle trouvaille. Il est ahurissant de vouloir se mettre en concurrence “public-privé” ! La réussite du secteur privé n'est pas le seul fait des entreprises et de leurs staffs. C'est aussi et surtout la réussite d'un Etat à travers ses responsables qui auront su créer un arsenal législatif et fiscal favorable, un environnement des affaires sain et prospère. C'est donc leur réussite aussi dont ils peuvent en éprouver de la fierté. Dans l'absolu, il n'existe qu'une et indivisible économie nationale ! Quoique, il faut admettre que ces responsables ne sont ni dupes ni naïfs. Tout cela, ils le savent. Mais, ils préfèrent continuer à fonctionner de la sorte, car cela rapporte plus ! L'intérêt individuel passe avant tout. Et tant pis pour l'économie du pays ! L'argent, ça fait tourner la tête ! Imaginons un seul instant, mais un très court instant, pour ne pas déprimer, l'Algérie sans les hydrocarbures ! C'est-à-dire 98% de richesses, de recettes, d'activités, d'emplois… en moins ! C'est impensable ! Et pourtant, nos voisins marocains et tunisiens n'ont pas de pétrole et ils se portent mieux que nous ! Apparemment, le pétrole c'est beaucoup d'argent certes, mais il a aussi apporté avec lui la malédiction ! Ne dit-on pas que l'argent, ça fait tourner la tête ? Il y a lieu de préciser que malgré l'importante rente pétrolière, cela ne fait pas de l'Algérie un pays riche. Il y a dilapidation ici et là, c'est notoirement connu et reconnu, mais il y a surtout une très mauvaise gestion des biens de l'Etat. Ce qui fait de la majorité des travailleurs et des nombreux chômeurs, notamment, une population de nécessiteux. Et l'on continue à faire dans le prestige en arborant des projets aussi gigantesques qu'inutiles, tels que la mosquée d'Alger ou le nouveau complexe d'Oran pour abriter le GNL16 pendant quelques jours. Pendant ce temps, nos modérés voisins avancent doucement, mais sûrement. Leurs modestes économies respectives et respectables permettent une honorable contribution de la consommation à la croissance. Les travailleurs tunisiens et marocains ont atteint, aujourd'hui, un meilleur pouvoir d'achat que le nôtre. Les salaires des travailleurs algériens stagnent et ne sont jamais calculés sur le niveau de vie réel. Un SNMG à moins de 140 euros/mois, c'est juste suffisant pour une semaine si on veut nourrir décemment une famille moyenne de cinq personnes ! Joug bureaucratique ! Alors que notre pays n'exporte que 184 produits, la Tunisie en expédie 1 193 et le Maroc 1 120. L'exportation hors hydrocarbures, ce talon d'Achille de la politique économique, connaît encore de lourdes pesanteurs. L'entreprise algérienne n'arrive pas à se libérer de ce joug bureaucratique. Il n'y a aucune incitation allant dans le sens de l'encouragement du secteur productif industriel, qu'il soit microéconomique ou macroéconomique. Quant à l'économie institutionnelle, elle continue à faire dans le gigantisme… sans avoir réellement les moyens de sa politique, à savoir, les compétences, et aussi, le traitement de la question de la dépénalisation de l'acte de gestion qui plane toujours, telle une chape de plomb sur la tête des managers publics. Il est effectivement aberrant d'assimiler le risque de gestion à un délit. Recherche et industrie, main dans la main Toutefois, certaines entreprises privées arrivent quand même à se risquer et avec succès, malgré ce sale temps, en prenant de louables et courageuses initiatives. C'était le cas, il y a quelques jours, de NCA Rouiba, en lançant un nouveau produit sur le marché national, enrichissant sa gamme de jus. Autre sujet de satisfaction, le rapprochement de l'industrie avec l'université. C'est la nouvelle politique prônée par le groupe Cevital. Il est carrément question de la création d'une université pour la formation de cadres supérieurs aux standards universels. “L'université de Cevital permettra de prodiguer aux cadres des entreprises une formation complémentaire aux dimensions universelles, nous avons besoin de 100 cadres supérieurs, nous allons vers le marché international pour les avoir, le temps que nos cadres soient formés”, avait alors développé M. Rebrab lors d'une conférence organisée par El Moudjahid, au lendemain de la LFC 2009. Comme quoi, tout n'est peut-être pas gris ! Une hirondelle, aidée par d'autres, pourra faire le printemps. Ça roupille ! En attendant, sur un total de 183 économies, l'Algérie est classée 160e par le Doing Business 2010 concernant le transfert de propriété. Elle vient à la 168e position concernant le paiement des impôts. Le classement général de Doing Business 2010, édité par la Banque mondiale et la Société financière internationale, témoigne d'une dégradation avérée du climat des affaires en Algérie et ce, en comparaison avec des pays de la même région. Il y a urgence à se ressaisir. Mais, pendant ce temps, ça roupille…