L'écrivain recevra, le 16 octobre prochain, en marge de la Foire du livre de Francfort, le Prix de la paix des libraires allemands. Une importante distinction pour un auteur prolifique et parfois polémique ; une récompense qui reconnaît une écriture descriptive et une plume aiguisée. L'organisation des libraires allemands a annoncé, jeudi dernier, que c'est l'auteur algérien, Boualem Sansal, qui recevra, en octobre prochain, le Prix de la paix des libraires allemands (d'une dotation financière de 25 000 euros). “En récompensant cet intellectuel qui critique ouvertement la situation politique et sociale en Algérie, l'Organisation des libraires allemands entend apporter son soutien au mouvement pour la démocratie en Afrique du Nord”, a déclaré de Berlin, Gottfried Honnefelder, le président de cette association. Boualem Sansal est le deuxième algérien à recevoir cette importante distinction, après Assia Djebar (en 2000). Ce qui semble cocasse dans toute cette affaire est que Boualem Sansal est tout sans en paix dans son écriture, puisque son propos est d'une brûlante actualité, notamment la décennie noire de l'Algérie ou encore les questions relatives à l'islamisme. C'est un écrivain tourmenté qui conteste et critique les contradictions de son pays et par extension le dérèglement du monde d'aujourd'hui. Audacieux, l'auteur du Serment des barbares (son premier roman, sorti en 1999 et couronné par le Prix tropiques) combine une écriture éclatante et éclatée, qui se veut sciemment descriptive, et arbore un style élégant traitant de thèmes largement actuels et polémiques. Il n'est, certes, pas étonnant que Boualem Sansal reçoive le Prix de la paix, car sa plume est tourmentée, et son propos est largement politique. Il pose le doigt là où ça fait mal et n'hésite pas à appuyer sur la plaie jusqu'à ce que la douleur se transforme pour devenir une sorte de désespoir hystérique. L'histoire occupe une place importante dans l'œuvre de Boualem Sansal puisque c'est à partir de celle-ci qu'il ouvre une lucarne sur le présent ; et au lecteur de faire le reste, c'est-à-dire de se projeter dans l'avenir… et de tirer non seulement les conclusions, mais aussi de comptabiliser les erreurs. Né en 1949 à Alger, Boualem Sansal est un docteur en économie. Après un riche parcours d'enseignant, de consultant et de haut fonctionnaire au ministère de l'Industrie (limogé en 2003 pour ses prises de position), il sort son premier roman en 1999, chez Gallimard éditions (en France), et connaît un franc succès. Ami du grand Rachid Mimouni, l'auteur de Harraga (2005), fait partie des auteurs qui ont beaucoup d'affection pour leurs personnages, mais qui les placent dans une réalité douloureuse, fiction fortement inspirée du réel. Il faut dire qu'il ne ménage aucunement son lecteur, et lui impose de regarder la vérité en face. De regarder le monde tel qu'il est vraiment. En plus de son talent avéré, l'auteur de le Village de l'Allemand (Grand Prix RTL-Lire 2008) reçoit – sans doute – ce prix de la Paix pour son fort engagement artistique, sa virulence et sérénité. Un écrivain qui n'a pas peur des mots pour dire les maux, “pour une meilleure compréhension entre les peuples”.