Le président de la ligue professionnelle de football fait le bilan de la phase aller du championnat et dévoile sa feuille de route pour la suite de la saison sportive. Liberté : Quelle appréciation faites-vous de la phase aller du championnat national ? M. Kerbadj : Je pense que pour un début, nous avons quand même noté quelques points positifs comparativement aux saisons précédentes, notamment en ce qui concerne la programmation. Pour une fois, n'est pas coutume, le calendrier est respecté à la lettre. Depuis le début du championnat on n'a pas entendu la moindre réclamation en ce sens de la part des clubs. On a fait en sorte aussi d'éviter au maximum les sanctions du huis clos à l'encontre des clubs. Et l'amendement apporté sur le code disciplinaire a été initié par la ligue. Désormais, il n'y aura de huis clos qu'en cas d'incident grave comme par exemple jet de projectiles entraînant blessure ou envahissement du terrain. Il ne faut oublier un fait nouveau cette saison à savoir le lancement du championnat espoirs pour les deux ligues. Nous avons été sur le terrain depuis plusieurs années et on connaît les grands soucis des clubs à retenir leurs joueurs issus des jeunes catégories, d'où notre décision de mettre en place ce championnat qui servira de bon relais pour les jeunes joueurs afin d'intégrer progressivement l'équipe des séniors et éviter leur déperdition. Il est vrai que tout n'est pas encore parfait, il y a aussi des lacunes à corriger qu'on va essayer d'améliorer à partir de la phase retour, mais je pense que pour un début, il y a quand des points positifs. Avec la rentrée en lice incessamment de clubs engagés dans les compétitions africaines, la programmation ne risque-t-elle pas d'être chamboulée ? Je peux vous dire dès maintenant qu'il n'y aura aucun risque de toucher à la programmation. La question a été tranchée avec les clubs et nous avions mis les points sur les “i” avant le démarrage du championnat. Nous avions dit que les concernés par les compétitions internationales seront obligés de disputer leurs matches de championnat 48 heures avant leur départ ou après leur retour des rendez-vous africains, un point c'est tout. La ligue n'est pas prête à se retrouver a gérer les matches retard, elle ne fera de cadeau à personne et elle n'acceptera pas de revenir à l'anarchie. Que chacun assume ses responsabilités. Je suis là pour diriger le championnat, pour veiller entre autres au respect du calendrier, et non pas à gérer les problèmes des autres. Depuis le début du championnat, les arbitres ont fait l'objet de critiques acerbes de la part des clubs, peut-être plus que les précédentes saisons. Quel est votre avis à ce sujet ? Justement et contrairement aux années précédentes, il y a eu une décision courageuse de rajeunir le corps arbitral et de lancer de nouveaux jeunes referees qui n'ont pas, je pense, assez d'expérience pour gérer la grosse pression et les intimidations qu'ils subissent à chaque match de la part des joueurs, dirigeants de clubs et des supporters. Je reconnais qu'il y a de nouveaux arbitres qui n'ont pas encore toutes les aptitudes psychologiques pour gérer le mauvais traitement dont ils font l'objet à chaque match. Je suis persuadé, toutefois, qu'ils connaissent parfaitement les lois, ils sont bien formés de ce côté-là. Il leur faut juste le temps et de l'expérience. Il y a eu des matches où l'arbitrage n'a pas été à la hauteur, mais il y a eu aussi de jeunes arbitres qui ont été excellents pendant cette phase aller, sauf qu'à aucun moment, j'ai vu ou entendu quelqu'un mettre en exergue leur bon arbitrage et je trouve cela vraiment regrettable. Vous savez, j'ai assisté à plusieurs matches de championnat, où on a failli lyncher l'arbitre à cause d'un penalty ou une faute sifflée contre l'équipe locale, alors qu'en vérité et en voyant les images, il avait raison. Je l'ai vécu lors du match MCEE-ASK, je l'ai vécu un peu partout et dernièrement à Sétif pour le match ESS-USMA. C'est pour dire que s'il y a des erreurs d'arbitrage, c'est à cause aussi de cette grosse pression des dirigeants et des supporters. Et puis il faut savoir que l'arbitrage est un domaine qui n'est pas du ressort de notre instance. Ni la ligue ni son président ne gèrent l'arbitrage. Il y a une commission fédérale chargée des arbitres qui dépend du président de la FAF. Ce n'est pas une spécificité de chez nous. Mais si les arbitres sont aujourd'hui plus que jamais critiqués, c'est parce qu'il y a eu des tas et des tas d'erreurs d'arbitrage en championnat, vous n'allez quand même pas dire le contraire ? Absolument pas, il y a eu des erreurs, qui ont influé sur les résultats, je ne pourrais nier ce fait. Il y a une commission chargée de ce domaine qui va bien sûr faire l'évaluation des arbitres et faire en sorte de combler les lacunes. Mais je reste persuadé que nos arbitres, les jeunes également connaissent parfaitement les lois du jeu. Il leur faut du temps pour gagner en expérience. C'est un passage obligatoire, on doit patienter. Il faut aussi que nos clubs adhèrent et soient professionnels envers les arbitres. On parle de plus en plus de corruption qui ronge le corps arbitral. Qu'en pensez-vous ? Je n'adhère pas à ce débat. Je ne le pense pas. Même si la corruption doit exister, il n'y a rien qui puisse le prouver. Les gens parlent de corruption pour un ou deux dirigeants de club, sans pour autant présenter de preuves. Celui qui détient des preuves, je ne vois pas pourquoi il ne déballe pas tout sur la table. Sincèrement, je trouve que le moment est venu pour dire basta à ce genre d'agitation et de suspicion qui ne font que nuire à l'image de marque de notre football et notre pays en général. Celui qui a des preuves, on est partant pour aller jusqu'au bout, sinon je pense qu'il faut prendre des mesures afin de mettre un terme aux accusations juste pour des accusations. Il n'y a peut-être pas de fumée sans feu ? Non je suis désolé, on parle là d'un sérieux sujet, un grave délit. On ne peut rester dans la suspicion. Soit on a du concret pour prouver nos accusations, soit on se tait. Il est inacceptable d'accuser des arbitres de corruption sans présenter de preuves. Vous n'êtes pas sans savoir que les instances juridiques de la FIFA sont sans pitié là-dessus. À partir d'une simple déclaration, l'instance mondiale peut s'autosaisir de n'importe quel dossier pour enquêter, comme cela a été le cas en Grèce. Donc lorsqu'on n'a pas de preuves, je pense que chacun doit faire attention à ce qu'il va dire. Les sanctions de la commission de discipline ont souvent créé une polémique chez certains clubs… Il faut d'abord que les gens sachent que la commission de discipline est un organe présidé par un cadre de l'Etat, un homme dont tout le monde approuve l'intégrité. Cette commission travaille en toute liberté et indépendance et ne se réfère qu'au règlements généraux et code disciplinaire que l'ensemble des clubs ont acquiescé. Elle prend ses décisions uniquement sur la base des rapports des arbitres et commissaires des matches. Même si je suis le président de la LFP, je n'ai pas les prérogatives de m'immiscer dans son travail. Je ne connais d'ailleurs les sanctions qu'après avoir reçu le PV. Il faut savoir qu'on n'est plus au temps des injonctions ou donner des ordres. L'ère des sanctions à la tête du client est révolue. On a constaté que la commission de discipline n'a jamais pris en considération les images de télé dans son traitement de certains dossiers, pourtant c'est ce qui se fait un peu partout ailleurs… C'est parce qu'on n'a pas les moyens de sanctionner à partir des images de télé. Ce serait bien de revenir à la vidéo pour consolider le dossier, mais le problème c'est qu'il n'est pas évident d'avoir l'enregistrement de tous les matches, pour la simple raison qu'il y a des stades que la télévision ne couvre pas. Si la commission sanctionne un club pour une faute à partir des images de télé, comment va-t-elle faire si la même faute est commise dans un autre stade où il n'y avait pas de cameras ? Vous voyez, tant qu'on n'est pas sûrs d'avoir les vidéos de toutes les rencontres, on ne pourra pas adapter ce principe des images pour traiter les cas disciplinaires. Vous avez assisté au match ESS-USMA, que pensez des incidents qui l'ont émaillé ? Je suis malheureusement sorti avant la fin de la partie, disons que j'été obligé de quitter le stade parce qu'on a failli m'agresser. Il y avait quelques énergumènes qui se sont pris à moi à cause de l'arbitrage qui a été, à mon sens, pourtant bon. Sur le plan technique, l'ESS a pu terminer la phase aller avec le titre de champion d'hiver. Quels sont vos pronostics pour la suite de la saison ? De par son bon parcours réalisé lors des derniers matches, je dirais que l'ESS mérite amplement le titre honorifique de champion d'hiver. Il y a aussi des clubs qui l'auraient mérité, à l'image de l'USMA et le CRB qui ont montré de bonnes choses dans cette phase aller. Au vu de l'écart au classement général, d'autant plus en tête, je pense que c'est une bonne chose pour notre championnat. Comme ça on aura droit à une phase retour qui sera sans nul doute très disputée. Est-ce que la Ligue envisage toujours de délocaliser les derbys algérois du 5-Juillet ? Je tiens à préciser que le dernier mot revient aux cinq clubs algérois. C'est à eux de décider s'ils veulent jouer au 5-Juillet ou à Blida. On n'obligera personne. On a eu une discussion avec les responsables de l'OCO au sujet de l'état du terrain et ils nous ont promis de faire le maximum pour effectuer des travaux afin d'essayer de l'arranger. On va voir ce que cela va donner. En tout cas la balle est dans le camp des clubs algérois, s'ils veulent continuer à jouer au 5-Juillet quel que soit l'état de la pelouse, sachant les risques de blessure qu'encourent les joueurs, la Ligue ne pourrait s'y opposer. Quelles seront les priorités de la LFP pour la phase retour du championnat ? Nous allons œuvrer avec la commission fédérale d'arbitrage afin d'essayer de recadrer les arbitres et combler les lacunes constatées lors de la phase aller du championnat. Nous aspirons à sensibiliser davantage les comités des supporters et tenter de les impliquer dans ce qui se passe au niveau des tribunes. Nous n'avons pas la baguette magique, c'est la responsabilité de tout le monde, services de sécurité, responsables des stades et non pas uniquement la Ligue professionnelle. M. B.