Pour les Américains, ce sont des terroristes. Pour la majorité de la population arabe, ce sont des “résistants” qui se battent courageusement contre l'occupation de leur pays par l'armée américaine. Qui sont donc ces guerriers qui ont tué plus de 200 soldats américains depuis le 1er mai dernier, date de la fin officielle des combats proclamée par George W. Bush ? Selon plusieurs spécialistes des questions arabes et du terrorisme, la vérité se situe sans doute entre ces deux descriptions : Deux composantes majeures constituent l'opposition armée en Irak. Il y a, d'une part, les barons déchus du baathisme qui n'ont plus rien à perdre et, d'autre part, tous les combattants attirés par “l'Irak terre de Djihad”, explique Antoine Basbous, directeur de l'Observatoire des pays arabes. Les premiers se sont distingués depuis la fin officielle de la guerre par des attaques ciblées et souvent très précises contre des convois de l'armée américaine ou des policiers irakiens qu'ils qualifient de “traîtres” à combattre au même titre que les occupants étrangers. Ils opèrent avec des méthodes de guérilla classiques : embuscades, tirs au mortier sur des blindés, attaques aux lance-missiles contre des avions civils et militaires...Ils n'utilisent en revanche presque jamais les attentats suicides. La réussite de leurs attaques, y compris dans le centre de Bagdad, pourtant fortement surveillé par les troupes américaines, montre qu'ils connaissent très bien le terrain et qu'ils sont capables de manier des armes difficiles à utiliser, comme les lance- missiles Stinger, très efficaces contre les avions et les hélicoptères. Selon des reportages et des informations publiés dans la presse occidentale et arabe, ces résistants “nationalistes” ne sont pas tous des partisans de Saddam Hussein. Il y aurait même parmi eux d'anciens opposants au régime déchu, mais qui ne supportent pas la gestion de l'après-guerre par Washington. Aujourd'hui, aucune statistique n'est disponible sur le nombre exact, et aucun renseignement sérieux n'a réussi à identifier leur chef. Un temps, les Américains ont soupçonné Saddam Hussein de diriger personnellement la résistance. Puis aujourd'hui, les soupçons sont tournés vers le numéro deux de l'ancien régime, Ezzar Ibrahim Al-Douri, qui reste introuvable en dépit d'une récompense de 10 millions de dollars. Autre composante de la résistance irakienne : les islamistes. Ils viennent de tous les pays arabes et transitent essentiellement par les frontières poreuses entre la Syrie et l'Irak. Pour eux, l'Irak est devenue une terre de Djihad. Ils veulent y faire subir aux Américains la même défaite humiliante que celle subie par les Russes en Afghanistan. Contrairement aux combattants nationalistes, les guerriers islamistes utilisent les voitures piégées et les kamikazes dans leurs attaques contre les forces de la coalition ou la police irakienne. Pour eux, les victimes civiles qui tombent dans ces opérations sont chanceuses car elles iront au Paradis au même titre que les kamikazes auteurs des attentats. Un avis loin d'être partagé par l'autre frange de la résistance. La poursuite de telles opérations pourraient, estiment-ils, à terme, amener la population à soutenir les troupes de la coalition. Qui les arme ? Qui les finance ? Ont-ils des liens avec le réseau Al-Qaïda d'Oussama Ben Laden ? Le mystère reste entier sur l'organisation de ces combattants et leurs sources de financement. Et là encore, peu d'informations sérieuses sont disponibles sur ces combattants. Il est vrai que dans cette région, les armes et l'argent ne sont pas des choses qui manquent. Et les gens qui ont des raisons d'en vouloir aux Américains y sont également nombreux. L. G.