C'est une rétrospective de l'histoire de l'immigration à travers le chant, allant de la période d'avant-guerre à l'après-guerre, rythmée par la projection sur scène d'un café parisien, le Barbès Café, un espace vécu comme un lieu de rencontre et d'échange entre immigrés pour, notamment, avoir des nouvelles de leurs familles, restées au pays, à l'époque où l'immigration était un départ forcé, un moyen de subsistance. Le spectacle “Barbès Café", présenté samedi dernier, au Théâtre régional Kateb-Yacine de Tizi Ouzou, est à la fois un univers de chants et de projections de documentaires qui reviennent, notamment, sur la lutte des immigrés pour le recouvrement de leurs droits (évènement du 17 octobre 1961), mais aussi, le combat pour l'égalité. Les images retracent des manifestations de rue, à travers lesquelles les émigrés revendiquent leurs droits syndicaux et dénoncent le racisme. Une génération que la France n'a pas vu grandir, mais appelée à vivre avec eux. Barbès Café est également un vibrant hommage aux artistes ayant marqué l'exil par une voix nostalgique. Slimane Azem, El-Hasnaoui, Hnifa, Chikha Rimiti, Salim Halali, et bien d'autres artistes qui ont chanté l'exil et aussi la liberté du peuple algérien, puisque Barbès Café revient longuement sur cette période coloniale, comme vécue particulièrement depuis l'exil. Citons par exemple, Ay Ajrad (les sauterelles), une chanson écrite et interprétée par Slimane Azem, dans laquelle il compare les colons à une nuée de sauterelles venues ravager le pays, ou encore son morceau Dahr-d waggur (la lune est apparue) où il fait référence au croissant et à l'étoile, gravés sur l'emblème national, comme un message de liberté et d'indépendance. Organisé à l'initiative de l'Agence algérienne pour le rayonnement culturel (Aarc), le spectacle est, selon les organisateurs, inspiré des genres musicaux des différentes régions d'Algérie. Ces chansons ont aussi contribué à l'apparition de la musique moderne algérienne. Elles étaient le fait d'hommes et de femmes nés en Algérie et qui, pour la plupart, devaient travailler le jour et chanter la nuit. Leurs noms sont bien connus : Aït Farida, Slimane Azem, Dahmane El-Harrachi, Cheikh El-Hasnaoui, Bahia Farah, Kamel Hamadi, H'nifa, Mohamed Mazouni, Missoum, Oukil Amar, Ourida, Hocine Slaoui, Akli Yahiaten et tant d'autres encore". Barbès Café est une œuvre écrite par Ameziane Aziche, manager culturel parisien, en collaboration avec Naïma Yahi et avec la complicité de Mohammed Ali Allalou et Aziz Smati, anciens de la Radio algérienne. La mise en scène a été confiée à Géraldine Benichou. En plus de la wilaya de Tizi Ouzou, le spectacle Barbès Café est attendu à Alger, à la Salle Ibn Zeydoun (Riad El-Feth), les 27 et 28 novembre à 19 h. Barbès Café est interprété par pas moins de 14 artistes. Sur scène, à Tizi Ouzou, ils ont pu maintenir le show durant presque deux heures, avec un rythme à la fois chaud et chaleureux. Une mémoire musicale revisitée. K T