L’illusion télévisée d’une “dignité retrouvée�

Moubarak suggère que l’expérience démocratique nous a été imposée de l’extérieur. Le ministère des Affaires étrangères, un des ministères dits — abusivement dans certains cas — de souveraineté, ne fait que commettre un sibyllin communiqué pour blâmer, mollement et plus d’une semaine après l’offense, “certains pays de la région rétifs aux progrès démocratiques�. Le texte abscons n’a même pas eu le courage, ou la volonté, de désigner le personnage à l’origine de la réaction gouvernementale tellement ésotérique et tardive que seuls des initiés pourraient faire le lien avec un propos inamical et une réponse initiatique.
Il n’en pouvait être autrement : déjà du temps de sa présidence de l’Assemblée nationale, Belkhadem avait donné les preuves avec ses amis iraniens qu’il n’était pas chatouilleux du côté de la souveraineté et de l’ingérence “fraternelle�, celle-ci fût-elle d’effets sanglants pour les Algériens.
Bien plus tôt, le roi d’Arabie avait inopinément décidé qu’Abassi Madani devait compter parmi les représentants de délégations nationales de pèlerins. Les princes des champs pétroliers ont un peu l’habitude de voir en nous une province tout juste digne d’assouvir leur penchant pour la chasse aux animaux exotiques. L’incident n’a coûté qu’une théâtrale convocation de l’ambassadeur du royaume.
Il y a quelques semaines, les pays voisins ont convenu qu’il n’était pas avantageux pour le Maghreb qu’un sommet se tînt à Alger, et le boycottage des chefs d’État conviés fut unanime. L’absence injustifiée de l’excentrique leader libyen n’a pas empêché le Président algérien de se rendre à Syrte et de participer à un stérile sommet africain sur l’eau et la défense où les quelques chefs d’État présents, après avoir subi le discours farfelu de Kadhafi sur l’armée africaine unique, se sont promis d’étudier la possibilité de politiques communes en matière d’agriculture et de sécurité.
Les médias publics ont voulu présenter la récente invitation tunisienne, adressée à Bouteflika pour le sommet arabe, comme un geste de considération. Le tact aurait pourtant exigé le préalable d’une expression officielle des autorités tunisiennes sur les graves incidents de Sfax. Sans compter que le rejet du sommet maghrébin d’Alger appelle une clarification publique des motivations des uns et des autres, avant que les rapports ne reprennent leur cours normal, comme si de rien n’était.
Il faut une dose d’assurance sur l’apathie nationale en matière de relations d’États pour que des partenaires, réputés “frères�, nous déconsidèrent, nous dénigrent et nous évitent, pour ensuite nous inviter, sans douter de notre disponibilité, à honorer les forums qu’ils organisent.
Il est vrai que ces forums n’ont jamais valu pour notre Président, candidat permanent, que leur pesant de mirage télévisé. Celui d’un Président à travers lequel l’Algérie aurait rejoint les premiers rangs de la scène internationale. Ne serait-ce que pour cela, il faudrait le reconduire, nous suggère-t-on.
Mais, à l’étranger, les faits sont têtus : on n’hésite plus à nous heurter. Ils le sont ici aussi et l’ENTV n’y peut rien : dans l’indolence de nos laborieuses réactions officielles, se contredit la promesse d’une dignité retrouvée.
M. H.