Les milliers d'Algériens, à l'instar des autres touristes, en vacances d'été en Tunisie et qui devaient rentrer à partir de jeudi dernier au pays, ne se sont pas acquittés, au niveau des postes-frontières, des fameux 30 DT par personne. Cette taxe de sortie du territoire ne sera appliquée, finalement, qu'à partir du 1er octobre. Une échéance tant attendue par les argentiers de Tunis, pour ses retombées qu'ils jugent positives sur l'économie du pays, mais qui, d'un autre côté, reste tant redoutée aussi bien par les touristes que par une partie des professionnels du secteur qui voient en elle une mauvaise affaire pour la destination "low cost" du sud de la Méditerranée. Si lundi dernier, lors d'une réunion interministérielle, la ministre du Tourisme du gouvernement de Mahdi Jomaâ a fini par gagner une partie dans ce qui s'apparente à un bras de fer entre elle et son collègue des Finances, elle est loin d'avoir réussi à désamorcer une bombe devenue à retardement. Alors que l'administration des finances à défendu jusqu'au bout son idée de mettre en application cette décision dès jeudi 28 août, la ministre du Tourisme n'a pas cessé de plaider pour une application de cette imposition à partir de 2015. Finalement, les termes de l'article 30 de loi de finances 2014 adoptée le 7 août par l'Assemblée nationale constituante entrera en vigueur le 1er octobre soit à l'entame de la moyenne saison et la veille de la campagne des fêtes de fin d'année. Cette taxe, avant d'opposer dans la forme les responsables des deux secteurs des finances et du tourisme, avait déjà mis face à face les professionnels de l'hôtellerie et les politiques tunisiens. En effet, au départ, l'idée était d'instaurer une taxe de séjour de 2 dinars tunisiens par touriste et par nuitée. Face aux arguments des hôteliers, le gouvernement a opté pour une taxe de 30 dinars tunisiens que doit payer chaque touriste étranger non résidant en Tunisie lors de sa sortie du territoire tunisien sous forme d'un timbre fiscal payable au niveau des postes-frontières. Derrière cette décision, qui ne peut être qu'impopulaire, et qui a renvoyé du gouvernement tunisien l'image d'une équipe en plein cafouillage, se trouve un enjeu financier de taille. Tablant sur 4 millions de touristes non tunisiens et non résidents, par an, la Tunisie espère récolter, une cagnotte de 52,5 millions d'euros durant l'exercice 2015 et 17,5 millions d'euros pour les quatre derniers mois de l'année en cours. Echéance repoussée ou bombe à retardement ? Certaines parties continuent à présenter cette imposition comme une taxe de séjour alors qu'il s'agit de tout sauf de cela (voir encadré). Tous les observateurs contactés sont unanimes à dire que cette taxe n'est qu'une imposition de passage des frontières pour au moins 4 raisons. Primo, la taxe de séjour est imposée au touriste qui, selon la définition de l'OMT, est une personne en déplacement hors de chez elle passant au moins une nuitée dans un hébergement à but lucratif. Or, dans notre cas, c'est le fait de passer la frontière, même pour une excursion d'une journée sans passer de nuit, qui justifie l'imposition de 30 dinars tunisiens. Secundo, seuls les touristes non tunisiens et étrangers non résidents en Tunisie qui sont imposés alors que la taxe de séjours cible, exclusivement, la population des touristes, y compris les nationaux résidents. Tertio, la taxe touristique est une ressource destinée à financer des actions engagées à cause de la fréquentation touristique d'un territoire ou pour préserver et promouvoir ce dernier. Or, pour le cas tunisien, cette taxe est destinée à couvrir les déficits de l'ensemble de la balance des paiements. Enfin, en dernier lieu, la taxe de séjours essaie, dans sa philosophie, d'épargner tous ceux qui sont de condition modeste, qui sont obligés de passer par un hébergement à but lucratif pour des raisons de santé, d'activités professionnelles... Sur le marché régional, la Tunisie est réputée pour être une destination à bas coût. Ainsi, le bon rapport qualité-prix, l'absence de contraintes de passage des frontières, le visa en l'occurrence, sont parmi les éléments qui ont toujours joué en faveur du produit tunisien sur le marché algérien. Avec l'institution de cette taxe, la seule dans la région avec la taxe de 25 dollars USD imposée par l'Egypte, c'est comme si on assistait au démantèlement de toute cette argumentation de vente. Indépendamment du montant de la taxe, juste son institution risque de provoquer, dans le mental de l'Algérien, une sorte de barrière, entre lui et sa destination préférée jusqu'ici. S'il est vrai que des concepts tels que ceux de raison d'Etat et souveraineté peuvent primer sur certaines considérations, y compris d'amitié et de fraternité entre les peuples, le passage d'un certain nombre de voyants macroéconomiques au rouge n'est pas une raison suffisante pour faire passer une taxe de traversée des frontières pour une taxe de séjour touristique et pour faire payer aux enfants d'un même peuple le droit de se rendre visite. M. K. Nom Adresse email