Si le Conseil de la nation bloque le projet de loi de finances pour 2005, le président de la République jouit du droit constitutionnel de la promulguer par ordonnance. Le ministre des Finances, Abdelatif Benachenhou, sera auditionné, aujourd'hui, sur le projet de loi de finances 2005 par la commission des finances du Conseil de la nation, avons-nous appris de sources parlementaires. Ce projet, adopté par l'Assemblée nationale quelques jours avant l'Aïd El-Fitr, sera débattu en plénière de la Chambre haute en début de semaine prochaine. Au terme du débat, il sera loisible de savoir si la disposition portant interdiction de l'importation des boissons alcoolisées sera effectivement reconduite ou pas. Aucun sénateur n'est encore en mesure de pronostiquer l'issue du vote de leur institution. D'autant que les élus RND, qui sont majoritaires au Sénat, n'ont reçu, jusqu'à présent, aucune consigne sur la position à adopter par rapport au projet de loi de finances 2005. A priori, le projet de loi de finances pour 2005 sera adopté, sans grands remous, dans la forme entérinée par l'Assemblée populaire nationale. “Il n'est pas dans l'intérêt du pays de bloquer la loi de finances juste pour un article qui sera probablement annulé à la faveur d'une loi de finances complémentaire”, nous a-t-on confié au Sénat. Il s'avère néanmoins difficile pour le gouvernement d'encaisser, pour la seconde fois, les contrecoups d'un amendement qui risque de compromettre l'adhésion de l'Algérie à l'Organisation mondiale du commerce. Il est donc fort probable, selon des parlementaires, que le Conseil de la nation corrige l'erreur de l'APN en rejetant l'article controversé. Afin de permettre, malgré tout, l'adoption de la loi de finances dans les délais impartis par la Constitution, c'est-à-dire 75 jours au plus tard à compter de la date de son dépôt à l'APN (article 120, alinéa 1), le Chef du gouvernement devra convoquer immédiatement la commission paritaire du Parlement. Cette dernière aura à statuer, en référé, sur l'objet du litige. Le projet de loi de finances repassera alors par les deux Chambres parlementaires pour une seconde lecture. La loi fondamentale donne, toutefois, au président de la République la possibilité de contourner carrément l'écueil du Parlement. L'article 120, alinéa 2 lui permet de promulguer par ordonnance le projet de la loi de finances, tel qu'avalisé par le Conseil des ministres, afin qu'il soit expurgé de tous les amendements introduits par les députés. La contrainte liée à l'entrée en vigueur de la loi de finances le 1er janvier libère le chef de l'Etat de l'obligation de soumettre cette ordonnance, empreinte d'un caractère d'urgence, à l'approbation des parlementaires. Le premier magistrat du pays jouit aussi du droit de saisine du Conseil constitutionnel sur la conformité de la loi de finances avec les dispositions constitutionnelles, après son adoption par le Conseil de la nation. Les membres de l'institution, présidée par Mohammed Bedjaoui, rendront alors leur avis, dans un délai record de quelques jours. Des parlementaires écartent, toutefois, un quelconque recours au Conseil constitutionnel. Ils expliquent que l'interdiction d'importation des boissons alcoolisées pose un problème commercial et non pas juridique et encore moins constitutionnel. Le sort du projet de loi de finances pour 2005 sera connu dans quelques jours. Si le gouvernement — et au-delà, la présidence de la République — décide de ne pas laisser passer l'amendement de l'APN, comme ce fut le cas l'année dernière, une crise parlementaire sera inévitable. S. H.