Cette précision apportée par Amar Saâdani vient confirmer les craintes de l'opposition. "Nous avons dit à la direction du FFS que la légitimité de toutes les institutions de l'Etat n'est pas un sujet sur lequel nous sommes prêts à débattre les 23 et 24 février." Ces lignes rouges sont, pour le FLN, une façon de baliser le terrain de la conférence, et d'éviter que cette dernière ne soit une tribune pour remettre en cause la légitimité des institutions, la présidence de la République en premier. Mais cette ligne rouge ne concerne pas le gouvernement. Amar Saâdani, qui a déjà commencé à se démarquer de l'Exécutif conduit par Abdelmalek Sellal, n'a jamais caché son ambition de voir le poste de Premier ministre revenir au parti majoritaire au Parlement, c'est-à-dire au FLN. Doit-on s'attendre, alors, à un tir groupé contre le gouvernement lors de la conférence du consensus ? C'est fort probable. En tout cas, le FLN fera tout pour inscrire la question du poste de Premier ministre à l'ordre du jour. Autre précision de taille apportée par le patron du FLN : le président Bouteflika approuve cette conférence. Cette précision a le mérite de confirmer les dires de l'opposition qui affirmait dès le début que l'initiative du FFS n'était qu'une façon de sauver la face au pouvoir après le boycott des consultations autour de la révision de la Constitution, et surtout, la radicalisation de l'opposition qui réclame à présent des élections anticipées. Il y a lieu de rappeler que lors de la première phase des consultations menées par le FFS, le FLN avait réservé sa réponse concernant cette démarche. Il avait, entre autres, exigé que la question de la légitimité du président Bouteflika soit considérée comme une ligne rouge. S'il consent à présent d'y prendre part, c'est qu'il a reçu des garanties concernant cette question précise. Même si le FFS s'est toujours défendu de jouer au médiateur entre le pouvoir et l'opposition, son initiative avait eu l'effet contraire auprès de l'opposition qui, tout en acceptant le principe de débattre avec les responsables du FFS, a signifié une fin de non-recevoir à une démarche vouée à l'échec, selon elle. Le FLN vient, donc, au secours du FFS, pour donner un certain crédit à la conférence du consensus qui devrait, selon toute vraisemblance, entériner le projet de révision "consensuelle" de la Constitution. Et puisque Saâdani affirme que le président Bouteflika approuve la démarche, on devrait y trouver tous les partis du pouvoir, à commencer par le RND, le TAJ et le MPA, sans compter les nouveaux partis et quelques personnalités qui espèrent qu'on leur renvoie l'ascenseur. Le FFS, qui s'est réjoui de la participation du FLN à sa conférence, n'a pas manqué d'affirmer qu'il ferait tout son possible pour réunir le maximum d'acteurs politiques autour de la table, mais il est clair que l'opposition n'y prendra pas part et que la conférence ressemblerait beaucoup plus à un monologue. C'est, d'ailleurs, cette conclusion qui aurait conduit le président Bouteflika à songer à un passage en force concernant la révision de la Constitution, étant persuadé que, quoi qu'il fasse, l'opposition ne cautionnerait pas sa démarche. Saâdani retarde le congrès Amar Saâdani a, encore une fois, retardé la date de la tenue du congrès du FLN. Après avoir annoncé sa tenue durant le 1er semestre de l'année en cours, il vient d'affirmer que ce dernier n'aura pas lieu avant la révision de la Constitution. Un gain de temps précieux pour le patron contesté du FLN, sachant qu'il ne peut, en l'état actuel des choses, "ficeler" un congrès sur mesure. Ses opposants redoublent d'activisme et même les changements opérés au sein des mouhafadate ne semblent pas avoir calmé la fronde de la base. Amar Saâdani, malmené ces derniers temps dans la presse, a dû recourir au bureau politique de son parti pour tenter de se défendre. Le procédé renseigne sur les craintes de se voir, non seulement éjecté du parti, mais sacrifié pour avoir trop parlé. Une posture de victime que Saâdani serait bien tenté d'enfiler, le temps de retarder le plus longtemps possible la tenue du congrès et le tenir, le cas échéant, selon ses propres intérêts. A.B.