Résumé : Mohamed est remonté contre Ouiza. Ses cousins ont eu le dernier mot. Elle allait être enterrée dans son village natal. Mohamed le prend pour un affront. Il refuse de les y emmener. Maria le voyait comme un monstre sans cœur. Si avant, elle le détestait, maintenant, elle le hait encore plus... Maria n'a jamais connu la famille de sa mère. Celle-ci avait perdu ses parents tragiquement, il y a longtemps. Elle n'a ni tante ni oncle. Elle ne lui connaît pas de cousins et de cousines proches ou éloignés. Le fait qu'elle soit enterrée ailleurs ne la dérange pas, mais ne pas y assister l'enrageait au plus haut point. Elle voudrait prendre ses affaires et partir d'ici, mais c'est déjà la fin de la journée. Elle ne trouvera pas de transport, et Mohamed la rattrapera vite. Il le lui fera payer à coups d'injures et de coups comme d'habitude. Elle ne se fait pas de soucis pour ses frères. Ils s'en sortiront sans elle. D'ailleurs elle n'a jamais vu son beau-père les toucher. Ce sont ses enfants, il en prendra soin. Maria passe son temps à pleurer. Elle a pris une décision qui allait changer sa destinée. Elle profitera de l'absence de Mohamed pour partir d'ici. Elle ira se recueillir sur la tombe de sa mère avant de poursuivre son chemin. Elle ignore où elle se rendra, mais vu que rien ne la retient ici, elle n'avait pas le choix. L'unique personne à qui elle aurait manqué était sa mère, et celle-ci n'est plus. Elle et son beau-père ne s'étaient jamais entendus. Elle ne veut pas devenir un jouet entre ses mains. Elle ne se voit pas se plier à ses quatre volontés ou subir sa violence. Ce soir-là, Mohamed rentre au milieu de la nuit. Elle l'entend parler et espère que les voisins tentaient de le raisonner. Cela ne s'est jamais vu de ne pas assister à la veillée funèbre de sa femme et d'empêcher ses enfants de s'y rendre. Elle ouvre doucement la porte de la chambre et le voit s'attabler avec une canette de bière. Il lui parle, la regardant comme si elle était une personne. -T'as vu ? Ils dorment tous ! Je n'ai plus personne pour m'attendre, pour s'inquiéter sur mon sort, à qui parler ! Personne pour prendre soin de moi ! Il faudra que je me trouve une nouvelle femme ! Je pourrais prendre Maria ? Il faudra que je voie ça avec un imam ! La jeune fille referme la porte, sans bruit et pousse le verrou. Elle réalise que s'il prenait l'habitude de s'enivrer, il ne pourrait jamais différencier entre le bien et le mal. D'ailleurs, il a toujours été mauvais, et l'alcool n'arrangerait pas les choses. Elle l'entend aller et venir devant leur chambre, tente d'ouvrir deux ou trois fois avant d'aller à sa chambre. Elle soupire de soulagement. S'il avait tenté quoi que ce soit, elle ignore ce qu'elle aurait fait. Au petit matin, alors qu'il n'a pas fini de dégriser, elle en profite pour prendre ses affaires et les économies de son beau-père. Elle a pris soin de mettre dans le sac le premier livret du premier mariage de sa mère. Elle embrasse ses petits frères. Elle ne se fait pas de souci pour eux. Il ne pourra rien leur arriver. Même sans elle, ils s'en sortiront. Ils ne risquent rien auprès de leur père. Ce qui n'était pas son cas. À la moindre erreur, elle recevra la raclée, et sa mère n'est plus là pour la protéger. Hier soir, il lui a donné des sueurs froides. Ivre, il pensait que c'était possible entre eux. "Il n'est plus rien pour moi !", pense-t-elle. "Comme il est remonté contre les cousins de maman, il n'ira pas à son enterrement ! Je ferais mieux de me dépêcher !" En larmes, elle risque un dernier coup d'œil vers ses frères qui dormaient encore profondément. Quand elle sort dehors et marche à travers les ruelles, elle croise quelques personnes qui pressaient le pas, se dirigeant vers la même destination qu'elle, les arrêts de bus. Il y a aussi des taxis clandestins. Elle ne peut pas tarder sur les lieux et demande à l'un d'eux de la mener au village "x". -Tu me parais trop jeune pour voyager seule, remarque-t-il. -Ammi, dit-elle avec respect. J'ai de l'argent pour régler la course. Ma mère va être enterrée ce matin. Je veux être présente ! Son mari Mohamed est monté contre mes oncles et ne voulait pas m'emmener ! -Oui, c'est ce qu'on raconte au village ! Allez, monte ! Je veux bien t'y emmener ! Il n'a pas le droit de faire ça à ses enfants ! Maria monte à l'arrière. Quand le taxi démarre, elle pleure, consciente qu'elle partait pour de bon. Là, elle se rend à l'enterrement de sa mère. Mais après, où ira-t-elle ? (À suivre) A. K.