"Ce n'est pas parce qu'il a été condamné dans le cadre du procès des 83 kg qu'il est forcément coupable des faits qui lui sont reprochés dans cette affaire." Le tribunal criminel d'Oran a jugé, mardi passé, le dernier membre d'un réseau de trafic de drogue démantelé en 2010. Accusé de possession et commercialisation de stupéfiants en bande organisée, S. Mokhtar, 41 ans, a écopé de huit années de prison ferme, soit la même peine à laquelle ses complices avaient été condamnés lors du premier procès alors qu'il était en fuite. Selon les termes de l'accusation, l'affaire remonte à juin 2010 lorsque, sur la base de renseignements faisant état de l'existence d'un réseau de trafic de drogue opérant entre le Maroc et Oran, les services de police ont opéré une perquisition au domicile de Kh. Kacem au douar Boudjemaa. L'opération s'avère fructueuse puisque les policiers découvrent 28 kilogrammes de kif dissimulés derrière le miroir d'une salle de bain. Arrêté, Kacem n'hésite pas à livrer les noms de ses présumés complices, dont S. Mokhtar auquel appartiendrait la marchandise prohibée. "Le kif appartient à Mokhtar, qui l'a importée auprès d'un certain R. Omar, à Oujda", affirme-t-il aux enquêteurs. Il maintiendra ses déclarations jusqu'au procès à l'issue duquel il est condamné à 15 ans de réclusion criminelle alors que ses acolytes écopent de peines allant de cinq à huit ans de prison. Pendant ce temps, S. Mokhtar, propriétaire d'un bain-douche à haï Nedjma, ex-Chteïbo, reste introuvable, et lorsqu'il sera arrêté en 2011, c'est dans le cadre d'un autre dossier de trafic de drogue. Les enquêteurs découvriront, en effet, qu'il avait loué un local dans le quartier d'El-Akid Lotfi, où il avait stocké 83 kilogrammes de résine de cannabis. Il sera jugé et condamné à 15 années de réclusion criminelle... Mardi dernier, il rejettera toute implication dans l'affaire des 28 kg de kif trouvés dans la maison de Kacem. "Il m'a incriminé par simple vengeance. Il avait un différend financier avec mon frère, et comme celui-ci est en prison, il s'en est pris à moi. Voilà toute l'affaire !", a-t-il soutenu devant une juge manifestement très sceptique. Transférés de la prison pour apporter leurs témoignages, les présumés complices de l'accusé nièrent connaître l'accusé, à l'exception de Kh. Kacem qui revint cependant sur ses premières déclarations en reconnaissant avoir cité le nom de Mokhtar par vengeance, confirmant la thèse avancée par le prévenu. Revirement qui a fortement irrité la juge, laquelle a promis des poursuites pour fausse déclarations. Dans son réquisitoire, le ministère public a refusé de croire à la bonne foi de l'accusé et des témoins. "Comment peut-il être innocent alors que, pendant qu'il était recherché, il a eu l'audace de louer un lieu d'entreposage de 83 kg de kif ? Cet homme a agi en professionnel du crime, et les témoignages de ses complices constituent un acte de solidarité entre les membres d'un même réseau." Il requerra la peine de 20 ans de réclusion. La défense, elle, s'appuiera naturellement sur les témoignages à décharge et le revirement de Kh. Kacem pour plaider l'innocence de son mandant. "Ce n'est pas parce qu'il a été condamné dans le cadre du procès des 83 kg qu'il est forcément coupable des faits qui lui sont reprochés dans cette affaire", a-t-elle soutenu en demandant l'acquittement. Au terme de la séance de délibérations, S. Mokhtar a été reconnu coupable de possession et commercialisation de stupéfiants en bande organisée, et condamné à huit ans de prison. S. Ould Ali