Le développement de l'aquaculture dans la wilaya de Skikda a connu récemment un souffle nouveau, grâce à une meilleure approche administrative entrant dans le cadre de l'encouragement des investissements hors hydrocarbures afin de donner des opportunités pour l'exploitation d'un grand potentiel laissé trop longtemps en jachère. En effet, l'aquaculture en eau de mer ouverte est la mieux indiquée dans une région balnéaire regorgeant de sites qui offrent de grandes potentialités pour le développement de l'élevage de poisson. Ce secteur est même devenu une nécessité pour combler le déficit de production de poisson de la pêche maritime sachant que cette dernière est en constante baisse surtout à cause de la pollution marine, tel qu'estimé par de nombreux experts. Un investissement coûteux, mais rentable Le coût exorbitant d'un projet aquacole n'encourage guère les investisseurs à se lancer dans ce créneau et c'est tant mieux pour les véritables promoteurs. Sachant que l'essentiel des équipements est importé, même le granulé, l'aliment du poisson et les alevins. Une seule cage flottante coûte plus de 600 millions de centimes alors que pour lancer un projet d'aquaculture, l'investisseur doit disposer d'au moins 5 cages flottantes pour rentabiliser son placement. En outre, les banques n'accordent que deux crédits pour l'investissement avec un apport personnel de 30% et avec intérêt, alors que le deuxième crédit d'exploitation est accordé sans intérêt. Il va sans dire que l'investissement est fortement rentable. Un alevin de 3 grammes coûte 10 DA, il faut 18 mois d'élevage pour atteindre un poids commercial de 500 grammes. Actuellement, la vente de poisson comme la daurade est cédée à une moyenne de 1 000 DA le kg. Pour produire 1 kilo de poisson, il faut 2 kilos de granulés alors que la tonne de cet aliment est cédée à 1 000 euros. Sachant aussi que chaque cage d'un diamètre de 25 mètres a une capacité de production de 70 tonnes de poisson. Pourtant, l'Etat encourage aussi l'investissement dans les activités liées à l'aquaculture dont la fabrication de l'aliment de poisson qui reste un créneau vierge. L'engouement des investisseurs pour l'aquaculture est important sauf que dans cette wilaya, aucun projet en mer ouverte n'est actuellement concrétisé, contrairement à d'autres wilayas comme Boumerdès, Tizi Ouzou ou Oran où le poisson, comme le loup et la daurade, des élevages aquacoles, est disponible sur le marché. A contrario, l'aquaculture en eau douce est très répandue. Sept projets ont été concrétisés pour l'élevage de la carpe au niveau des barrages de Kenitra et Zit El-Emba avec une production totale de 61 tonnes réalisée en 2016. Six projets validés Le directeur de la pêche et des ressources halieutiques, Hocine Bousbiâ, s'est montré très optimiste quant à l'avenir de l'aquaculture dans cette wilaya dans l'entretien qu'il nous a accordé. Il parle d'un objectif de 3 000 tonnes de poissons (daurade et loup de mer) et la création de 120 postes d'emploi direct avec un coût d'investissement qui dépasse les 170 milliards de centimes. Il nous expliquera que sur les 9 dossiers de création de fermes aquacoles pour la pisciculture marine en cages flottantes en mer ouverte déposés en 2016, la commission de wilaya a examiné et avalisé 6 dossiers, qu'elle considère comme sérieux pour leur concrétisation. Les promoteurs sont de Skikda, de Sétif et d'Alger. Il citera des projets de cages flottantes en mer ouverte au niveau de deux sites à Béni Saïd, dans la commune de Collo, un autre à Ben Zouit, dans la commune de Kerkera et 3 autres dans la commune de La Marsa. Ces dossiers traités sont actuellement au niveau du domaine et la concession est en cours d'élaboration. Les trois autres dossiers sont en cours de traitement, nous explique le DPRH. L'on citera l'exemple de la Sarl Rusica-fish-Farm, investissant à Ben Zouit, dans la commune de Kerkera, qui a un projet de 8 cages flottantes en mer ouverte pour un coût de 39 milliards de centimes, et qui attend toujours l'attribution des titres de concession en mer et sur terre, en souffrance au niveau du domaine et cela depuis 3 mois, alors que, légalement, cela peut s'effectuer en 3 jours. Par ailleurs, la wilaya de Skikda dispose à La Marsa d'une ferme aquacole pilote pour la maîtrise des techniques de reproduction et de pré-grossissement de la crevette locale, dite la matsagone. En 2016, des lâchers en mer ont été effectués à Skikda, à Jijel et à Annaba afin de renforcer le stock de crevettes dans la région. Dans ce cadre, le DPRH de Skikda attire l'attention des promoteurs intéressés par les activités de l'aquaculture et aussi des autres activités liées à l'aquaculture, "des possibilités d'investir les créneaux vierges comme la fabrication de l'aliment, des écloseries, des cages flottantes et d'autres équipements", et ce, pour une meilleure relance de cette activité, donc une meilleure rentabilité et, partant, un prix du poisson relativement moins cher. L'Itpa de Collo : 30 stagiaires en formation La formation d'agents et de techniciens en aquaculture est assurée depuis 2003 au niveau de l'Itpa de Collo, le seul institut à l'Est qui forme les techniciens supérieurs en aquaculture alors que les deux autres écoles d'El-Kala et d'Annaba dispensent des formations pour agents techniques et techniciens en aquaculture. Le directeur de l'Itpa de Collo, M. Nouredine Remita, nous expliquera les différentes filières dispensées par l'institut qui accueille actuellement 30 stagiaires. Notre interlocuteur nous révèlera aussi que les cadres de l'Itpa assurent des activités de formation dites à la carte en dehors de la formation résidentielle dans le cadre de l'intégration de l'aquaculture dans l'agriculture notamment au niveau des wilayas du Sud comme In Salah, Ghardaïa et Djamaâ, dans la wilaya d'El-Oued. Il nous dira aussi que, personnellement, il considère que l'aquaculture saharienne a un bel avenir particulièrement dans les régions agricoles qui disposent de bassins. En outre, cet élevage d'espèces aquatiques ne nécessite pas un grand investissement. A. BOUKARINE