Les pressions inflationnistes, le manque d'emplois et le ralentissement de l'activité économique risquent d'entraîner une hausse du taux de pauvreté dans le pays. Grâce à une forte reprise de la production d'hydrocarbures et à des dépenses publiques plus élevées que prévu, la croissance économique en Algérie s'est poursuivie à un rythme relativement soutenu de 3,8 % en 2016 malgré la faiblesse des cours mondiaux du pétrole relève la Banque mondiale dans son rapport de suivi de la situation économique de la région du Moyen-Orient et Afrique du Nord, publié lundi. La croissance hors hydrocarbures s'est toutefois ralentie tandis que l'inflation s'est accélérée. Les déficits jumeaux sont restés supérieurs à 10 % amenuisant ainsi l'épargne budgétaire. À moyen terme, la Banque mondiale, s'attend à une forte baisse de la croissance ainsi que des déficits jumeaux sous l'effet de l'assainissement des finances publiques mis en œuvre par le gouvernement. « La baisse du taux de croissance du PIB par habitant qui s'ensuivra pourrait avoir des répercussions négatives sur le bien-être des ménages » avertit la Banque mondialE. Evoquant les perspectives, le rapport estime que le taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) réel de l'Algérie devrait atteindre, en moyenne, 1,2 % durant la période 2017-2019. La Banque mondiale explique que la révision à la baisse des projections de la croissance par rapport aux projections de l'automne 2016 est due à l'annonce de l'assainissement des finances publiques et au ralentissement de la croissance de la production d'hydrocarbures. Durant la période 2017-2019, un faible accroissement (2,5 %) de la production d'hydrocarbures dû à l'entrée en production de nouveaux puits et à une correction positive des cours du pétrole atténueront les répercussions négatives sur les secteurs réels hors pétrole des mesures de rééquilibrage des finances publiques et du compte courant. Le déficit budgétaire tombera à un niveau inférieur à 5 % en 2017 pour atteindre 1 % en 2019, selon les estimations, si les pouvoirs publics continuent de résolument maîtriser les dépenses. « Ce déficit devrait être financé par l'émission de nouvelles dettes du fait que l'épargne budgétaire est épuisée, ce qui portera le ratio de la dette au PIB à 14,6 % en 2018 et à plus de 20 % en 2019 » note le rapport. Les projections indiquent une diminution progressive du déficit du compte courant, qui tombera à moins de 10 % en 2019. La Banque mondiale indique que ces perspectives pourraient se dégrader pour au moins deux raisons : des cours du pétrole plus bas que prévu et le mécontentement social. Les perspectives actuelles, relève le rapport, reposent sur l'hypothèse d'une forte remontée des cours du pétrole (27 % en 2017). « Le pétrole ayant contribué pour environ 25 % à l'économie algérienne au cours des trois dernières années, des cours plus faibles que prévu auraient des répercussions négatives sur la croissance » avertit la Banque mondiale. Par ailleurs, ajoute le rapport, « la montée du mécontentement social due à la contraction des dépenses publiques, à l'augmentation de la charge fiscale et à l'ampleur du chômage des jeunes expose ces perspectives à un risque important ». Pour la Banque mondiale, « bien que les autorités commencent à manifester la volonté politique de rationaliser un système de subventions inefficace, inéquitable et généreux et que ces mesures fassent l'objet d'un consensus au niveau national, de telles réformes exigeront l'amélioration des filets de protection sociale, notamment la mise en place d'un système de transferts monétaires bien ciblé et la poursuite d'une campagne médiatique de grande envergure ». Certaines de ces mesures d'accompagnement, relève le rapport, sont en cours de conception et devraient être mises en œuvre à moyen terme. La Banque mondiale note qu'en 2016, les autorités monétaires ont permis au dinar de se déprécier davantage par rapport au dollar de 8,6 % afin d'éviter un désalignement du taux de change, ce qui a accru les tensions inflationnistes. Le taux d'inflation est passé de 4,8 % en 2015 à 6,4 % en 2016 en partie à cause des répercussions de la modification du taux de change suite à la dépréciation du dinar. Le rapport évoque la persistance de taux de chômage élevés pour les jeunes qui reflète le manque d'opportunités économiques pouvant améliorer les conditions de vie des ménages. « Le manque systématique d'emplois, conjugué au ralentissement de l'activité économique, des réformes économiques ainsi que les pressions inflationnistes, laissent craindre la possibilité d'une augmentation du taux de pauvreté national et du nombre de ménages vulnérables » avertit le rapport. Meziane Rabhi