Les ministres limogés, notamment ceux de l'Industrie et du Commerce, auraient vraisemblablement payé pour leur intention d'appliquer certaines mesures décidées par Abdelmadjid Tebboune. Quarante-huit heures après le limogeage, pour le moins spectaculaire du désormais ex-Premier ministre, Abdelmadjid Tebboune, et son remplacement par le chef de cabinet de la Présidence, Ahmed Ouyahia, le président de la République, Abdelaziz Bouteflika vient de procéder à un léger remaniement du staff gouvernemental. Il a remercié les ministres de l'Industrie, du Commerce et de l'Habitat, en l'occurrence Mahdjoub Bedda, Ahmed Saci et Youssef Chorfa qu'il a remplacés respectivement par Youcef Yousfi, Mohamed Benmeradi et Abdelwahid Temmar. Cela alors que ce lifting du gouvernement, opéré jeudi dernier, a été, par ailleurs, émaillé par le couac de la nomination éphémère de Messaoud Benaggoun du MPA comme ministre du Tourisme avant son éviction moins d'une heure plus tard ! Bizarrement, le même Benaggoun avait déjà fait l'objet, faut-il le rappeler, d'une nomination qui n'avait duré que 48 heures lors du remaniement de mai dernier... Cela pour la forme. Dans le fond, les ministres remerciés, notamment ceux de l'Industrie et du Commerce auraient, vraisemblablement, payé pour leur intention d'appliquer certaines mesures décidées par Abdelmadjid Tebboune telles que la remise à plat de l'industrie automobile ou encore l'élargissement de la liste des produits soumis à des quotas d'importation. Tebboune aurait d'ailleurs, quant à lui, fait les frais de sa volonté de "séparer l'argent de la politique" mais aussi de ses orientations économiques qui, c'est un secret de Polichinelle, auront incommodé particulièrement les hommes d'affaires proches du cercle présidentiel. Ce qui lui avait valu, faut-il le rappeler, avant même son limogeage, un sévère recadrage de la part du chef de l'Etat. Ce dernier n'avait pas hésité à critiquer certaines mesures de Tebboune dont celle relative à l'élargissement de la liste des produits soumis à des quotas d'importation. Et ce serait cette mesure particulière qui semble avoir coûté sa place au ministre du Commerce. Des importateurs s'étant notamment plaints que des produits commandés avant la mise en place des quotas étaient bloqués en douane. Le même sort sera réservé au désormais ministre sortant de l'Industrie, Mahdjoub Bedda pour avoir, de son côté, publiquement affirmé sa volonté de remise à plat de l'industrie automobile, non sans accuser des acteurs du secteur de procéder à des "importations déguisées tout en empochant d'importantes subventions". S'agissant du secteur de l'Habitat, un portefeuille non moins important, la désignation du wali de Mostaganem, Abdelwahid Temmar, à la place de Youssef Chorfa sent comme une volonté d'effacer toute trace d'Abdelmadjid Tebboune qui était à la tête de ce département avant sa désignation comme Premier ministre. En somme, les trois nouveaux ministres sont issus du cercle présidentiel. En effet, Youcef Yousfi, ancien chef de la diplomatie (de fin 1999 à la mi-2000) et ancien ministre de l'Energie et des Mines (2010-2015), tout comme Mohamed Benmeradi, qui fut ministre de l'Industrie (2010-2012) dans un précédent gouvernement Ouyahia, n'ont, en réalité, jamais quitté le sérail : ils sont devenus, depuis leur départ du gouvernement, conseillers auprès du chef de l'Etat, l'un pour les questions de l'énergie, et l'autre pour l'économie. Abdelwahid Temmar, désigné ministre de l'Habitat, dont il fut anciennement directeur général de l'Urbanisme, est, quant à lui, issu du réservoir des hauts fonctionnaires, donc également acquis au pouvoir. Les 24 autres ministres dont certains n'ont jamais quitté le gouvernement depuis leur arrivée, à l'instar du vice-ministre de la Défense, Ahmed Gaïd Salah, le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Tayeb Louh, ou encore celui de l'Enseignement supérieur, Tahar Hadjar, ont tous été reconduits dans l'équipe gouvernementale désormais dirigée par le revenant Ahmed Ouyahia. Farid Abdeladim