Le Premier ministre Ahmed Ouyahia a annoncé lundi l'élaboration d'un projet de loi amendant la loi actuelle sur la monnaie et le crédit. S'exprimant en marge de l'ouverture de la session ordinaire du Conseil de la nation, le Premier ministre a indiqué que ce projet de loi permettra d'ouvrir la voie au financement non conventionnel de l'économie nationale. Cette révision de ce texte fait suite à la volonté naissante de mobiliser les financements non conventionnels. En ces temps de contraction de nos ressources financières, liée à la baisse des cours du pétrole, principal moteur de l'économie algérienne, et la volonté affichée des pouvoirs publics de ne pas avoir recours à l'endettement extérieur, la problématique du financement de l'économie se pose avec acuité. L'option d'avoir recours aux financements non conventionnels avait été actée par le président de la République lui-même, en juin dernier. Mais depuis, les pouvoirs publics n'ont fourni aucune indication sur cette méthode de financement. Pour sa part, le Premier ministre qui annonce un projet de loi ne fournit, également, aucun détail sur ce projet en préparation. L'analyste financier, Ferhat Aït Ali, pour qui la loi actuelle doit être revue dans son intégralité, estime que le Premier ministre va se contenter d'amender quelques articles qui lui permettront de ponctionner encore plus les provisions et réserves. La méthode de financement non conventionnel n'a jamais été utilisée auparavant en Algérie. Mais la technique existe ailleurs. Depuis des semaines des experts essayent d'expliquer, à travers la presse, ce qu'est cette méthode en avançant les risques. Selon ces experts, le financement non conventionnel peut prendre la forme de mesures d'assouplissement de certaines normes de la politique monétaire conventionnelle ou d'injections massives de liquidités dans le système financier dans des circonstances qui les justifient. Le financement non conventionnel est utilisé mais dans une économie de marché structurée ayant un potentiel de création de valeur ajoutée, ce qui n'est pas le cas en Algérie. Pour Ferhat Aït Ali, il s'agit ni plus ni moins que du recours à la planche à billets. D'ailleurs, ajoute-t-il, cette révision de la loi sur la monnaie et le crédit est destinée à revoir les possibilités de financement par la Banque d'Algérie et le Trésor à travers des émissions monétaires. Le recours à la planche à billets engendrera, selon l'analyste financier, une dévaluation massive du dinar ce qui laminera les plus petites bourses. Ce qui rejoint l'avis de certains experts qui jugent qu'en Algérie, une telle option est à haut risque. D'abord, l'inflation est à un niveau élevé : plus de 7%. Actionner la planche à billets provoquerait une explosion des prix, avec un risque sur la stabilité sociale. Par ailleurs, cela produirait une dévaluation du dinar, ce qui risque de fortement déstabiliser les entreprises de production qui dépendent fortement des importations de matières premières. Concernant l'éventualité de l'entrée de la finance islamique dans le panorama des produits bancaires et financiers, Ferhat Aït Ali n'y croit pas beaucoup. Il en veut pour preuve qu'il existe déjà sur le marché cinq banques islamiques mais qui n'arrivent pas à tirer leur épingle du jeu. Saïd Smati