Pour l'institution de Bretton Woods, la nouvelle politique monétaire non conventionnelle pourrait entraîner une pression inflationniste considérable et une forte baisse du PIB potentiel à moyen terme. L'économie est confrontée au défi du mécontentement social, à la lenteur de la transformation structurelle, à la faible décentralisation, à la faible participation de la main-d'œuvre féminine et à la gestion de la politique monétaire non conventionnelle nouvellement adoptée. C'est ce que relève la Banque mondiale dans son rapport du suivi de la situation économique de l'Algérie, publié mercredi dernier. Le rapport estime que la nouvelle politique monétaire non conventionnelle, adoptée par le gouvernement, qui permet à la Banque centrale de financer directement le Trésor, "est susceptible de réduire les contraintes qui pèsent sur les finances publiques à court terme, mais elle pourrait entraîner des retards dans l'adoption et la mise en œuvre de réformes budgétaires et structurelles clés dont l'économie algérienne a grand besoin actuellement". Dans ce cas, avertit la Banque mondiale, "elle pourrait entraîner une pression inflationniste considérable et une forte baisse du PIB potentiel à moyen terme". Pour l'institution de Bretton Woods, "la grogne sociale qui s'amplifie suite aux réductions des dépenses publiques, les hausses d'impôts et les taux élevés de chômage des jeunes constituent des risques importants". Si la volonté politique et le consensus national pour rationaliser les subventions "inefficaces, inéquitables et généreuses" se dessinent progressivement, une telle réforme, relève la Banque mondiale, exige de meilleurs dispositifs de protection sociale, un système de transferts monétaires bien ciblé et une campagne médiatique globale. Certaines de ces mesures d'accompagnement sont actuellement conçues pour être mises en œuvre à moyen terme. "La lenteur de la transformation structurelle entrave la diversification économique par rapport aux hydrocarbures" constate la Banque mondiale, relevant "l'absence de consensus sur les éléments clés de la stratégie, par exemple la question de savoir s'il faut promouvoir le développement des exportations ou la substitution des importations, et le rôle du secteur privé". L'institution de Bretton Woods estime qu'une plus grande décentralisation économique renforcerait le rôle des autorités locales, ce qui améliorerait l'accès aux services sociaux de base, mais cela nécessiterait un changement par rapport au modèle actuel de reddition de comptes au centre. Enfin, la faible participation des femmes au marché du travail est multidimensionnelle, note la Banque mondiale, estimant que "cette faible participation est probablement liée aux déficiences de l'infrastructure, au modèle de création d'emplois, à la portée large du dispositif de protection sociale et à la migration". Evoquant les évolutions récentes, le rapport estime que la croissance économique algérienne est bien partie en 2017. Selon les estimations, la croissance du PIB réel a augmenté de 3,7% au premier trimestre, principalement en raison de la forte production dans le secteur des hydrocarbures, qui a augmenté de 7,1%. Cependant la croissance devrait accuser un ralentissement net au second semestre de 2017 et en 2018 au fur et à mesure que les mesures d'assainissement des finances auront des effets. Avec la stabilisation de la production de pétrole, la croissance globale diminuera et l'impact de la hausse des taxes et des droits d'importation pèsera sur la croissance du secteur hors hydrocarbures. "En conséquence, la croissance du PIB devrait s'établir à 2,2% pour l'année 2017. Elle peinera à franchir la barre de 2% en 2018-2019, soit une croissance anémique pour un pays à revenu intermédiaire présentant une explosion démographique de la jeunesse", prévoit la Banque mondiale. Alors que le démarrage de la production à partir de nouveaux puits de pétrole stimulera l'activité économique, "la croissance dans le secteur hors hydrocarbures fera les frais des mesures d'assainissement budgétaire découlant de l'aversion du gouvernement aux emprunts extérieurs", estime le rapport. Meziane Rabhi