Résumé : Le défilé de mode est un succès. Nacéra est bousculée. Elle reçoit des fleurs, des compliments et plusieurs cartes de visite. La reconnaissance du public pour son travail est pour elle la meilleure récompense. Elle relève la tête et constate que Maissa et sa mère étaient parties. La nuit était bien avancée lorsque Djamel la déposera chez elle en lui recommandant de se mettre tout de suite au lit. Dans sa chambre, elle put enfin se détendre et se débarrasser de ses chaussures à haut talons qui l'avaient torturée de longues heures, avant de se jeter toute habillée sur sa couche. Durant quelques minutes, elle repense à son défilé de mode qui avait eu un grand succès, et aux représentants de la presse qui, dès le lendemain, publieraient de longs articles sur l'événement. La jeune femme se passe la main dans les cheveux et se relève. Le maquillage de ses yeux avait coulé, et son rouge à lèvres n'avait pas résisté, tant elle avait été obligée d'embrasser toutes ceux et celles qui l'avaient approchée pour la féliciter. Heureusement que Hind et ses ouvrières étaient là pour tout empaqueter et remettre de l'ordre dans les loges. Elle était sur le point de prendre une douche avant de penser à dormir quelques heures, lorsque sa mère vint la rejoindre. -Ah ! Tu es enfin là. -Oui, maman. Je crois que tu es rentrée tôt. -Moi ? Mais bien sûr. Après ce que je viens de découvrir, comment veux-tu que j'aie le cœur à rester sagement assise sur une chaise pour suivre ton défilé ? -Pourquoi ?, demande Nacéra, qui connaissait déjà la réponse de sa mère. Cette dernière s'approche d'elle et la regarde dans les yeux avant de lancer d'une voix où résonnait la colère. -Ta sœur est enceinte. -Et alors ? Elle est mariée, non ? -Oui. Mariée depuis quelques semaines. Mais sa grossesse est bien visible, ce qui sous-entend... Elle ne termine pas sa phrase et devint toute rouge avant de se laisser tomber sur le lit de Nacéra. Cette dernière se rendit dans la cuisine pour lui ramener un verre d'eau. -Tiens, bois un peu d'eau, maman. Je t'expliquerai ensuite. La vieille femme encore sous le choc prend quelques gorgées avant de demander d'une voix tremblante. -Tu le savais ? Nacéra pousse un soupir et hoche la tête. -Oui. C'est d'ailleurs pour cela que j'ai hâté le mariage. -Et tu ne m'en as rien dit ! Tout le monde s'est conduit comme si je n'existais pas. -Pas tout le monde, mère. Il n'y avait que moi et Maissa qui étions au courant. Fort heureusement d'ailleurs. -Oui. Tu peux le dire. Fort heureusement. Elle hoche la tête et se frappe les mains. -Maissa, Maissa. Je pensais qu'en lui accordant une certaine liberté elle allait en comprendre les limites. Je voulais qu'elle réussisse dans ses études, qu'elle prouve que je ne suis pas indigne d'être sa mère. -Arrête de te torturer, maman. Le mal est fait, et heureusement que j'ai pu arrêter les dégâts à temps. -Oui. Je comprends maintenant ta hâte de la voir casée au détriment de ses études et de son avenir. Mais je ne te pardonnerai jamais de m'avoir caché une telle chose. -Qu'aurais-tu donc fait, maman ? Tu aurais peut-être piqué une crise de nerfs à te rendre malade tout en attirant les mauvais regards sur nous. Et puis la famille aurait découvert la faille et nous aurions été obligées de tout dévoiler, au risque de provoquer un scandale. -Et maintenant, Nacéra ? Qu'allons-nous faire ? -Mais rien. Maissa est mariée, et son mari a reconnu sa paternité. Tout est donc rentré dans l'ordre. Le moment venu, nous pourrions toujours parler d'un bébé prématuré. -Oui. Il faudrait être dupe pour le croire. Nacéra entoure les épaules de sa mère. -Maman, ne sois pas aussi sévère. Personne ne saura la réalité si on ne s'amuse pas à trop la brandir. Et puis, tant pis. Même si cela se sait, Maissa est la légitime épouse du père de son enfant. Sa mère pousse un long soupir. -Qu'ai-je fait de mal dans ce monde pour mériter un tel affront ? Voulant apaiser sa mère, Nacéra tente de changer de sujet en parlant de son défilé. -Ne dis pas cela, maman. Parlons plutôt de moi. Mes tenues ont eu un franc succès. Ta fille va devenir une célèbre couturière. -Tu l'es déjà. Ce que j'aurais voulu, c'est de te savoir chez toi, bien casée. Nacéra ébauche un sourire et repense à Djamel. Sa mère oubliera sûrement l'erreur de Maissa si elle lui apprend qu'elle va elle-même se marier. -Eh bien maman, je voulais justement t'en parler. Sa mère lève les yeux vers elle. -De quoi donc ? -De mon mariage. (À suivre) Y. H.