C'est quand même triste et regrettable de constater, une fois de plus, que des conférences-débats de haut niveau n'attirent plus la grande foule à l'auditorium de l'université Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou. Et pourtant, les responsables de l'université ont eu l'idée ingénieuse de programmer, depuis quelque temps, des rencontres périodiques avec des chercheurs et des hommes d'art et de lettres. Cela fut le cas hier, où l'écrivain bien connu Amin Zaoui est revenu dans la ville des Genêts pour présenter son dernier livre intitulé L'enfant de l'œuf, paru en septembre 2017 en France aux éditions Le serpent à plumes, et en Algérie aux éditions Barzakh. Ce roman conçu sous un fond philosophique, qui sied parfaitement au style habituel de Zaoui, est une belle histoire qui lie affectueusement deux narrateurs fictifs, un chiot appelé Harys et son maître, un écrivain appelé Moul (le diminutif de Mouloud) pour rappeler la fidélité du chien à l'homme et démontrer par-là même que les animaux sont parfois plus intelligents que les humains mais aussi – et surtout – de tisser une très belle approche sur l'Algérie de ces dernières années malheureusement marquée par une bestialité humaine sans précédent, comme a tenu à le préciser l'auteur dans sa courte et brillante intervention. S'en sont suivis alors des débats fort intéressants qui, au fil des interventions, ont débordé sur la situation sociale et politique actuelle en Algérie, plus particulièrement sur le plan de la diversité culturelle et linguistique et de l'avancée de tamazight aux quatre coins du pays. "Je me réjouis de constater que tamazight est désormais considérée comme langue nationale et officielle en Algérie. Comme j'ai été heureux de savoir que tamazight est désormais enseignée dans 37 wilayas, mais il faut savoir que le parcours est encore long, car le combat ne fait que commencer", dira Amin Zaoui. Et de préciser : "Notre cher pays l'Algérie que j'aime par-dessus tout ne peut pas avancer dans tous les domaines sans accorder un intérêt vital à la reconnaissance réelle et la prise en charge effective du volet de la diversité culturelle et linguistique." Et à Amin Zaoui d'interpeller énergiquement tous les intellectuels algériens dignes de ce nom pour jouer leur rôle d'acteurs culturels pour ne pas laisser le champ libre aux politiciens et aux démagogues. Et pour conclure, l'hôte de l'université Mouloud-Mammeri a tenu à insister sur le fait que, dans notre pays comme partout ailleurs, le politique fait dans l'opposition ou l'alliance, mais l'intellectuel doit faire dans la critique, même si je regrette que dans notre pays il existe malheureusement des intellectuels de service qui changent de couleurs et de principes selon les saisons et les calculs d'intérêts. Enfin, pour tous ceux qui ont malheureusement raté hier une rencontre aussi riche en échanges et surtout en enseignements, il faut savoir que l'université Mouloud-Mammeri compte organiser une prochaine rencontre le 27 novembre avec deux invités de marque, en l'occurrence le cinéaste bien connu Belkacem Hadjadj. Mohamed HAOUCHINE