Contacté par nos soins, M. Echikr a refusé de commenter le courrier du Premier ministre adressé au ministre des Finances arguant que "c'est au ministère de la Communication de s'exprimer sur cette question". L'Agence nationale d'édition et de publicité (Anep), qui détient le monopole absolu de la publicité institutionnelle et des entreprises étatiques, peine à recouvrer ses créances auprès de plusieurs ministères et de leurs structures annexes. Selon un courrier adressé, le 17 décembre 2018, au ministre des Finances, Abderrahmane Raouya, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, évoque "des créances faramineuses" détenues par les ministères. Selon le document en notre possession, le montant des créances non encore recouvrées par l'Anep s'élève à plus de 34,56 milliards de dinars au 30 octobre 2018. Dans son courrier, M. Ouyahia fait référence au dossier que lui a envoyé le DG de l'Anep, révélant que plus de 70% de ces créances, soit 23,46 milliards de dinars, relèvent de trois départements, à savoir les ministères de l'Intérieur et des Collectivités locales, de l'Habitat et de l'Urbanisme, ainsi que celui de la Santé et de la Réforme hospitalière. Le reste des dettes concerne plusieurs autres ministères et organismes d'Etat que le Premier ministre n'a pas cités dans sa missive. Devant cet état de fait, M. Ouyahia a instruit le ministre des Finances pour, écrit-il, "concrétiser cette importante opération qui s'inscrit dans le cadre de l'assainissement de la finance publique" et de verser 3,5 milliards de dinars au profit de l'Anep à partir du compte relatif aux dépenses non prévisionnelles de l'année 2018. Autrement dit, l'Anep devra encore attendre des jours meilleurs pour pouvoir récupérer la somme de 31,6 milliards de dinars auprès des institutions et des entreprises publiques qui n'ont pas encore honoré leurs dettes. Devant cette situation financière intenable, frôlant le dépôt de bilan de son entreprise, le directeur général de l'Anep, Amine Echikr, a officiellement interpellé le Premier ministre pour intervenir auprès des institutions concernées pour honorer leurs engagements. Faute de renflouer ses caisses, notamment après le gel des projets des plus grands pourvoyeurs des annonces publicitaires, l'Anep bute sur une crise sans précédent. En effet, l'Anep, qui n'arrive pas à convaincre les institutions et les entreprises de l'Etat de respecter leurs engagements, est mise sous pression à cause des sommes colossales qu'elle n'arrive plus à verser pour payer ses insertions publicitaires dans les journaux. Contacté par nos soins, M. Echikr a refusé de commenter le courrier du Premier ministre arguant que "c'est au ministère de la Communication de s'exprimer sur cette question". Du reste, cette situation ne date pas de l'année 2018. Les directeurs qui se sont succédé à la tête de l'Anep, dont l'actuel ministre de la Communication, Djamel Kaouane, étaient, eux aussi, confrontés à cette même crise au point que, durant l'année 2017, n'était l'intervention de l'Etat pour forcer les annonceurs à s'acquitter de leurs dettes, les salaires des employés étaient quasiment compromis. Faute d'une loi qui régirait la publicité, le monopole volontairement accordé par l'Etat à l'Anep dans la distribution de la manne publicitaire et la gestion clientéliste des annonceurs a montré ses limites et met en danger cette entreprise qui, aujourd'hui, risque de baisser rideau. Devant cette situation scandaleuse, le ministère de tutelle, dont dépend l'Anep, ne fait rien pour faire bouger les choses, du moins tenter de sauver les meubles. Car, au demeurant, le DG de l'Anep, qui n'arrive pas à recouvrer les créances, ne serait pas contraint de saisir le Premier ministre pour venir à sa rescousse. FARID BELGACEM