Le mouvement populaire a fait de nouveau preuve, comme un certain 22 février 2019, de responsabilité et de bon sens : ne pas laisser le pays sombrer dans l'abîme. Hier, vendredi 20 mars 2020, les Algériens auraient manifesté pour l e 57e vendredi consécutif contre le système toujours en place. Mais plutôt que d'investir les rues et les places des différentes villes du pays, où la mobilisation populaire est restée de mise plus d'une année durant, les hirakistes ont convenu de rester chez eux. Un choix délibéré et tranché depuis déjà quelques jours, notamment sur les réseaux sociaux. La propagation meurtrière du Covid-19 dans le monde comme en Algérie oblige, certes, à pareille attitude prudente. Néanmoins, il y a lieu de relever que les Algériens ont fait, encore une fois, preuve, comme un certain 22 février 2019, de responsabilité et de bon sens : ne pas laisser le pays sombrer dans l'abîme. Ainsi, les artères urbaines et les boulevards des grandes villes du pays, notamment Alger, Oran et Constantine, étaient quasi déserts hier. Pas le moindre rassemblement ou petit mouvement de foule n'est venu remettre en cause la détermination décidément ferme du mouvement citoyen à se montrer de nouveau exemplaire devant l'Histoire. Ne pas participer à la propagation de la pandémie en marchant comme de coutume. Se protéger soi-même, et donc ses proches et son entourage. La voix de la raison a été prépondérante Des voix avaient pourtant appelé, pas plus tard que vendredi dernier, à poursuivre les marches et les rassemblements. Les uns ne réalisant pas encore la gravité de la situation induite par l'arrivée du virus dans notre pays, les autres pensant simplement pouvoir braver la pandémie. Le lendemain samedi, et le mardi aussi, jour de marche des étudiants, des manifestants, quoiqu'en nombre très réduit, avaient répondu présent. Les images partagées sur les réseaux sociaux et montrant des enfants, des vieilles dames et de vieux messieurs, marchant côte à côte, dans un espace compact, et sans protection, avaient, cependant, commencé à choquer. Un large mouvement d'indignation a pris place, et la question de la poursuite des marches populaires ou non commençait à diviser, parmi le hirak. Mais les premiers décès dus au Covid-19 étaient déjà là, et de nouveaux cas de contamination au virus étaient enregistrés chaque jour. Les nouvelles et les images en provenance d'Europe et de Chine ont fait le reste. C'est alors que d'autres voix, très nombreuses cette fois-ci, se sont élevées pour faire entendre raison. L'argument allait de soi : le hirak était maintenant suffisamment ancré dans les mœurs algériennes, que le fait de suspendre momentanément les marches et rassemblements hebdomadaires, pour des raisons de santé et de sécurité publiques, ne pouvait en aucun cas éteindre la flamme de l'engagement populaire. Bien au contraire. D'ailleurs, il n'aura pas fallu longtemps pour que les plus motivés à poursuivre les actions de rue se ravisent et corrigent leur position. Certains se sont même excusés, en public, d'avoir sous-estimé le danger. Et, dès mercredi, des avocats, membres du collectif de défense des détenus d'opinion, ont commencé à partager des statuts sur leurs comptes et pages facebook, pour dire qu'ils ne se porteraient plus volontaires dans le cas où des manifestants seraient arrêtés par les services de sécurité dans la rue, étant donné les nouvelles mesures prises par le chef de l'Etat, notamment l'interdiction des manifestations publiques.