La Pharmacie centrale des hôpitaux (PCH) dispose d'un stock de 140 millions de masques et de traitements combinés à la chloroquine et azithromycine pour 800 000 patients. Son DG fait le point de situation. Liberté : L'Algérie manquait cruellement de dispositifs médicaux de protection au début de l'épidémie. Qu'en est-il actuellement ? Dr Tarek Djaboub : Le manque des bavettes et des masques FFP2 est un problème mondial pas uniquement en Algérie. A cause de la forte demande, les prix ont flambé sur le marché international. La bavette coute actuellement jusqu'à 0,65 dollar. C'est certainement exagéré. Nous avons, quand même pu avoir nos commandes qui sont de l'ordre de vingt millions de bavettes. Elles sont déjà disponibles au niveau de la PCH. Ajoutez à cela les quantités distribuées aux établissements sanitaires. Nous recevrons bientôt une commande de plus de 100 millions d'unités. Quelles sont les quantités dont a besoin le pays pour protéger la population d'une potentielle deuxième vague de contamination au moment du déconfinement ? Les prévisions sont établies au niveau de la direction générale de la prévention au ministère de la Santé, pour une période de trois mois à compter du début de l'épidémie. Les besoins sont fixés à 140 millions de masques de protection. Ils sont satisfaits. La PCH possède son propre circuit d'achat. La chine est notre seul fournisseur à l'international. Il n'a mis, pour l'heure, aucune limite à nos commandes qui restent ouvertes. Nous en recevons pratiquement un jour sur deux. Nous avons quatre producteurs locaux qui nous approvisionnent aussi, même s'ils sont confrontés aux problèmes de disponibilité de la matière première. C'est quand même grâce à eux que nous avons pu faire face à l'épidémie à ses débuts. Des dépenses supplémentaires sont consenties à cause de l'épidémie au coronavirus. Est-ce que l'Etat a débloqué une allocation budgétaire spéciale, d'autant que la Pharmacie centrale des hôpitaux a toujours éprouvé des difficultés à recouvrer ses créances auprès des hôpitaux ? Le problème de recouvrement des créances auprès des hôpitaux se pose toujours. Mais la PCH a amélioré relativement sa trésorerie grâce aux lignes de crédits dont elle a bénéficié. Pour répondre à votre question, bien sûr que pour les commandes liées au Covid-19, nous bénéficions du concours de l'Etat, qui n'est pas encore défini. Il se chiffre néanmoins en milliards de dinars. Une première enveloppe de l'ordre de 3,7 milliards de dinars a été déjà allouée. Elle va être augmentée eu égard à l'évolution de la situation. Ce budget n'est pas destiné uniquement à l'achat des dispositifs de protection, mais aussi pour l'acquisition de la Chloroquine. Justement l'hydroxychloroquine est un médicament vendu, à la base, en officine. Ce n'est plus le cas ? Effectivement, le produit était vendu directement en officine. La PCH ne l'achetait pas. En cette situation de crise, toutes les quantités ont été réquisitionnées et centralisées à notre niveau. Nous avons trouvé, néanmoins, une formule pour que les malades, qui étaient sous ce traitement (lupus, polyarthrite rhumatoïde ndlr) soient toujours servis. Les pharmaciens d'officine les identifient et nous leur donnons le traitement. Par ailleurs, les hôpitaux sont approvisionnés en quantités suffisantes en chloroquine et en azithromycine (un antibiotique, ndlr), qui sont prescrits de pair aux patients infectés au covic-19. Une boite vaut un traitement. L'un dans l'autre, nous avons de quoi traiter 800 000 à un million de patients. Les dons sont aussi centralisés au niveau de la PCH. Pouvez-vous faire un point de la situation ? Nous recevons certes des dons de bavettes, mais il ne faut pas croire que ce sont de grandes quantités. A vrai dire, les dons sont plutôt diversifiés. Nous avons eu de la literie, des respirateurs, du gel hydroalcoolique, des ambulances… Avec la charge supplémentaire induite par la gestion de la crise endémique, comment organisez-vous la logistique ? La vocation primaire de la PCH est de servir les quelques 1255 structures hospitalières publiques ou privées. Elle a cinq annexes régionales (Alger, Oran, Annaba, Djelfa et Biskra). Nous recevons la marchandise ici (siège nationale de la Pharmacie centrale) à partir de l'aéroport et le port, puis nous procédons à la répartition aux annexes, qui se chargent, à leur tour, à la distribution aux structures de santé. Aujourd'hui, nous sommes en situation de crise. Nous avons une sujétion publique. A ce titre, nous avons entrepris de servir aussi les pharmacies d'officine par l'intermédiaire des grossistes. Ils sont au nombre de quinze répartis sur l'ensemble du territoire national. L'épidémie du Covid-19 impacte sur le marché global des produits pharmaceutiques. Est-ce que la PCH dispose de stocks conséquents de traitements hospitaliers vitaux ? Il ne faut pas confondre entre le circuit ville et le circuit hospitalier. La PCH se positionne sur le deuxième segment. Je peux dire que les stocks disponibles suffiront pour une période minimale de six mois. Pour certains produits, nous pouvons tenir une année. Evidemment, il faut s'attendre à des problèmes d'approvisionnement en matière première, à des dysfonctionnements dans les transports… Espérons que la décantation intervienne avant les six mois. Au-Delà, il y a ce qu'on appelle des ruptures justifiées, c'est-à-dire qu'on ne ramène pas un médicament car on ne trouve pas où l'acheter. Je donne l'exemple de l'arrêt de fabrication d'un produit, ou les variations induites par le fournisseur (changement de site de production…).