Pour méditer ce qui nous entoure, chacun a son arme. Plume, crayon, peinture sont utilisés. Quant au domaine de l'inspiration et son corollaire, à l'extériorisation, il est intarissable et chacun sa passion. Et celle de Amar Sbargoud, que nous avons rencontré au pied du majestueux Djurdjura, dans un petit hameau de Frikat, plus précisément à Aït Sidi Maâmar, est foisonnante. Cet artiste a choisi un autre moyen de s'exprimer, comme si le verbe et la mélodie ne lui suffisent pas, faisant de la sculpture sur liège son domaine. À quarante ans, il a à son actif deux albums et plusieurs tableaux. Pour s'adonner à sa passion, notre artiste n'a pas besoin d'outils sophistiqués. De la toile, un tranchant de cordonnier, de la terre glaise et quelques morceaux de liège donneront, entre la dextérité de ses mains, un paysage merveilleux. Quant à la matière (ingrédients naturels), le sculpteur les puise dans les bois. Alors, place est donnée au choix des thèmes. “C'est ma deuxième passion intérieure. Elle est aussi ma raison de vivre. Depuis que je me suis lancé dans ce style, j'ai retrouvé mon équilibre intérieur. L'être humain ne peut se détacher de son milieu naturel. Pour moi, je suis lié à cette nature”, nous explique modestement notre interlocuteur, rencontré dans une exposition locale. Et d'ajouter : “Tout ce que j'utilise pour réaliser ce que vous voyez est une création personnelle. C'est une manière de reconstituer ces paysages en miniature. Devant un tel tableau, un étranger — je veux dire touriste — n'a pas besoin de guide. Il va l'interpréter de manière tout à fait naturelle.” Interrogé sur les matériaux utilisés, il nous a répondu : “De la mousse, du lichen, des feuilles de fougère, azumbi (feuilles de pin) et d'autres produits qui sont indispensables pour de telles reconstitutions.” Force nous a été de relever que ses créations étaient d'une admiration sublime à telle enseigne que son stand était submergé de visiteurs. Lui reconnaissant la qualité d'artiste talentueux, des connaisseurs en la matière l'encouragent à développer cet art. Ainsi, Amar a décidé d'aller exposer toute sa collection à Alger. “Dans l'exposition que j'organiserai à Alger prochainement, je présenterai un grand tableau de neuf mètres carrés, comportant un village kabyle dans toute sa composante. C'est un travail qui m'a pris beaucoup de temps, mais j'ai tout de même pu concrétiser cette idée que j'avais depuis longtemps en tête”, a enchaîné le sculpteur avant de lancer un appel en direction des responsables de la culture : “L'artiste n'a pas de moyens. Pour développer tous ces styles confinés dans les fins fonds de l'Algérie, nous demandons aux responsables de nous aider au moins à exposer nos produits. Car, il n'est pas facile pour un artiste de trouver aujourd'hui un espace pour une exposition quelconque.” Tout comme tous ses pairs, Amar Sbargoud fasciné par la sculpture compte aller loin dans cet art, qui n'est pour lui qu'une façon de porter sa pierre à ce gigantesque patrimoine culturel qui dépasse les frontières par son universalité incontestable. O. Ghilès