La Banque d'Algérie pourra suivre et retracer les opérations entre entreprises. La mesure sera étendue aux particuliers dans quelques mois. Sans le moindre bruit et dans la discrétion la plus totale, les banques algériennes viennent de réussir un précieux sursaut sur le terrain de la modernisation des systèmes de paiement et de traitement des flux monétaires. En effet, la journée de mercredi dernier est à inscrire dans les annales financières algériennes, puisque ce jour-là le coup d'envoi a été donné pour le lancement des premiers paiements électroniques interbancaires portant sur les grandes sommes dont le seuil minimum ne peut être inférieur à 1 million de dinars. Il est vrai que l'événement n'a pas été médiatisé, la prudence ayant justifié la réserve, mais il n'en demeure pas moins que cette nouveauté, à travers laquelle la communauté financière algérienne est en passe de signer son accès dans une ère “technologique” de la pratique bancaire, véhicule également une autre valeur, au lendemain des procès intentés aux établissements de crédits suite aux derniers scandales liés aux détournements de sommes astronomiques Pour revenir au nouveau système dit RTGS, celui-ci est schématiquement conçu comme un virement électronique offrant aussi bien célérité que fiabilité pour tous les intervenants, en l'occurrence les banques, le trésor et les CCP sous l'étroite conduite de la banque d'Algérie qui s'offre ainsi un moyen de contrôle sur les flux. Ces virements intéressent pour l'instant, et dans une première étape, les entreprises auxquelles il est proposé le choix de procéder aux virements par ce système ou d'opter le cas échéant pour l'ancienne formule. Donc pour l'heure, c'est une prestation non obligatoire étant donné qu'elle est toujours “en rodage et à l'essai. Dans une seconde phase, qui ne saurait dépasser les 45 jours, le deuxième volet du système sera porté à la connaissance du public, notamment les particuliers qui pourront en bénéficier”, nous déclare enthousiaste notre source. L'avantage étant la sécurité des opérations, mais également la possibilité de permettre aux bénéficiaires de ces sommes de voir leurs comptes crédités en l'espace record de “24 heures si ce n'est le jour même de l'exécution de l'opération”. Concrètement, et sur le terrain, ce système de paiement de masse en temps réel, comme son nom l'indique, a nécessité de gros moyens logistiques et techniques, notamment dans la mise en place des infrastructures de paiements répondant à ces normes au niveau de toutes les banques qui, “pour l'instant, disposent toutes d'un point de jonction pour ces opérations”. Il va sans dire que le rôle important des télécommunications est à relever en termes de réussite et de fiabilité d'ailleurs comme nous l'apprendrons, “on a déjà enregistré une panne de ligne téléphonique”. Le mécanisme fonctionne par des envois cryptés et offre la possibilité de diffuser l'information relative au paiement en temps réel avec l'ensemble des données requises sur la situation de l'ordonnateur et l'état de son compte. Une traçabilité sans faille pour des flux importants portant sur de gros montants engagés simultanément au cours d'une même journée. Ce service ne manquera pas, à la longue, de devenir obligatoire pour la clientèle tant que, graduellement, il avance pour consacrer pleinement l'interbancarité tant recherchée et tant revendiquée par l'ensemble des opérateurs. Le deuxième volet concernera, lui, le grand public, notamment à travers le traitement rapide des chèques et l'introduction plus poussée de la dématérialisation. L'absence de communication sur cette nouveauté est justifiée par le souci de maîtriser le concept avant de le rendre public, car la moindre défaillance ou erreur peut plonger le système dans un gigantesque casse-tête financier avec tous les risques monétaires que cela peut induire. Au-delà de cette interbancarité naissante et des apports technologiques dont peut se targuer désormais la communauté financière de la place, l'événement se veut aussi une réponse aux derniers détournements relevés à la BNA. Des détournements et des malversations rendus possibles sans grand génie par les délais de traitement et de recouvrement des chèques, ainsi que par l'obsolescence flagrante des moyens de paiement et de contrôle. À travers le système RTGS, les banques algériennes veulent rassurer les partenaires de l'Algérie qui n'ont de cesse appelé à la réforme comme unique solution de débarrasser la sphère bancaire de cette vulnérabilité coûteuse. Il était temps pour agir et verrouiller le système en endiguant toute tentation à la fraude et la malversation pour peu que l'investissement soit orienté en direction de la modernisation comme cela s'est, par ailleurs, réalisé dans la maîtrise des mécanismes de paiement en devises qui se font par système protégé (Swift). Le danger était au niveau domestique et entretenu à des fins aujourd'hui connues, pour avoir servi de sources d'enrichissement illicite. Abdelkrim Wahib