Dans une allusion à la décennie noire, Mme Michaelle Jean reconnaît que “l'Algérie a vécu une période très difficile, souvent seule”. Tapis rouge pour Michaelle Jean qui a été accueillie hier matin à Alger, à sa descente d'avion par le président de la république. La dernière fois que la canadienne avait rencontré Abdelaziz Bouteflika remonte à l'année 2000 au cours d'une interview qu'il lui avait accordée quand elle était journaliste à Radio Canada. Depuis, Mme Jean a renoncé à sa carrière de reporter pour un destin autrement plus prestigieux. Il y a un peu plus d'un an, elle était nommée au poste de gouverneure générale et commandant en chef du territoire américain du Commonwealth. Sa visite d'Etat en Algérie est une première escale dans un périple africain qui la conduira ensuite au Mali, au Ghana, en Afrique du Sud et au Maroc. C'est aussi son premier voyage officiel à l'étranger. Aussitôt après être arrivée à Alger, Mme Jean s'est entretenue en tête à tête avec son homologue à la résidence d'Etat de Zéralda. Son programme très chargé comprend aussi la présidence d'un forum d'affaires à Djenane El-Mithaq, l'animation d'une conférence au siège de la télévision, la signature de protocoles d'accord ainsi que des rencontres avec des ONG, des membres de la société civile et des journalistes. La gouverneure générale se dit “très émue” par son déplacement dans notre pays. “Ce voyage représente pour moi un retour aux sources. Ce sera un moment très particulier pour moi parce que je me souviens de l'attention que nous avons porté à toutes ces années difficiles qui ont été vécues par l'Algérie. J'ai été particulièrement frappée par le courage des femmes algériennes. Pour une femme journaliste qui suivait cela de près, il y avait quelque chose d'assez saisissant, de voir toutes ces femmes descendre dans la rue, porter courageusement un désir de liberté et d'affirmer cette liberté. C'était déjà une première façon d'entrer dans la réalité algérienne, pour moi. Là je vais y mettre les pieds”, a-t-elle révélé dans un entretien accordé conjointement à l'ENTV et à l'APS. À l'évocation de la décennie noire, Mme Jean admet volontiers que l'Algérie, “qui est engagée dans la lutte contre le terrorisme, a vécu une période très difficile, souvent seule. Il a fallu hélas le 11 septembre pour que le monde réagisse à ce phénomène”. L'engagement des autorités algériennes pour l'éradication des mines antipersonnel est également salué par la gouverneure. Très enthousiaste, elle dresse un tableau reluisant des relations entre son pays et le nôtre. 41 après l'établissement des relations diplomatiques, elle assure que les liens de coopération et d'amitié gagneraient à être raffermis. À la question de savoir en quoi le Canada pourrait aider l'Algérie, Mme Jean défend son pays de vouloir jouer le rôle du grand frère. “Vous savez ce qu'il y a de particulier pour nous canadiens, c'est que lorsque nous allons quelque part, nous n'avons pas l'attitude de donneurs de leçons. Nous nous présentons dans un esprit vraiment de reconnaissance du mérite et de ce que les citoyens et citoyennes des pays où nous allons ont réussi à accomplir et à réaliser”, réplique-t-elle. Désirant connaître les attentes des algériens, elle se montre surtout réceptive aux aspirations des jeunes et des femmes. “Je sais déjà, par exemple, que nous avons plus d'une centaine, presque 200 projets importants sur 80% du territoire algérien, et qui sont vraiment des projets de soutien pour les efforts quotidiens des femmes, des hommes en Algérie, des communautés, des régions, et ça pour moi, c'est important”, avance la gouverneure générale. S'exprimant sur les chantiers de développement où l'expertise et les investissements canadiens sont les bienvenus, elle cite entre autres, l'agriculture, l'hydraulique, l'exploration et l'exploitation minière, l'énergie électrique, etc. Il est à rappeler que le montant des investissements canadiens en Algérie est encore dérisoire, pas plus de 3 milliards de dollars canadiens. Le volume des échanges quant à lui est de 4,4 milliards. Samia Lokmane