Le secrétaire général du Rassemblement national démocratique (RND), Ahmed Ouyahia, était, hier, l'invité de l'émission “Fi el-ouadjiha” de la Radio nationale, Chaîne I. Cette sortie, qui intervient quatre jours après la réunion des 48 coordinateurs de wilaya et une série de meetings, coïncide, par ailleurs, avec le 10e anniversaire de la création du parti. Lors de l'émission d'hier qui a duré une heure et demie, le patron du RND est revenu sur plusieurs sujets brûlants de l'actualité nationale. Il s'est exprimé sur le changement de gouvernement et le souhait émis par le SG du FLN et actuellement chef de l'Exécutif. “Tout parti, qu'il soit majoritaire ou pas à tous les niveaux des institutions de l'Etat, devra avant tout être à l'écoute du citoyen et servir le pays. L'option du changement du gouvernement ne relève pas d'un seul parti politique. Et aucun parti politique n'a le droit de changer l'Exécutif. Il y a des lois.” Interrogé sur les prochaines élections législatives et communales, le patron du RND a estimé qu'“aucun parti politique n'est actuellement prêt si ces échéances doivent être avancées à une date très proche. La Constitution est claire au sujet du mandat des élus qui devra expirer au printemps prochain. On ne peut changer d'échéanciers que si le pays est en danger. Or, l'Algérie est prospère. Qui sera prêt ? Aucun parti n'a encore préparé le terrain. Un dialogue s'impose car la Constitution ne permet pas d'avancer ou de faire reculer les dates de ces échéances.” Ouyahia s'est également prononcé sur la loi électorale et le processus de surveillance des prochaines élections. “Nous allons dénoncer, dira-t-il, tout dépassement. La compétition sera ouverte, il y aura beaucoup de listes, et nous sommes à l'aise au niveau du RND sur cette question.” Révision de la Constitution : “Ce n'est pas un gâteau !” Ahmed Ouyahia a réitéré la position de sa formation politique en affirmant que “le chef de l'Etat est le seul habilité à pouvoir changer la loi fondamentale du pays. Même si la proposition venait d'une Chambre parlementaire, le dernier mot revient au Président, et c'est la Constitution qui le dit ! Vous devez savoir que le RND n'oriente en rien le ministre de la Jeunesse et des Sports ou le ministre des Transports, qui sont de notre parti. Ils obéissent à la politique générale d'un gouvernement et d'un Président avant tout.” À ses yeux, si tel ou tel parti doit être consulté sur le contenu de la prochaine Constitution, cela devra s'inscrire avant tout dans l'esprit d'œuvrer pour l'intérêt du pays. “Le président de la République n'a pas cessé, depuis 1999, de dire que la Constitution doit faire l'objet d'une révision. Pour notre part, nous ne sommes pas pressés. Nous aurons une opinion en temps opportun. Mais sachez une chose, la révision constitutionnelle n'est pas un gâteau !” dira-t-il encore. Alliance présidentielle : “Elle ne sera pas dissoute”. Evoquant les “conséquences positives” de la politique menée par Abdelaziz Bouteflika, le patron du RND a estimé que l'alliance présidentielle a échoué dans sa structuration au niveau des localités où les partis procèdent toujours à la restructuration de leurs instances. Plaidant pour la nécessité de l'élargissement du soutien au président de la République, Ouyahia dira encore : “D'autres alliances devront voir le jour pour arriver à canaliser les efforts des uns et des autres. Mais notre objectif demeure la structuration de l'alliance présidentielle qui n'arrive toujours pas à s'ancrer dans les communes. Nous avons une plate-forme à respecter et une feuille de route à honorer. Il n'est pas question de dissoudre cette alliance tant qu'il y a un programme en cours de réalisation, à savoir celui du président de la République.” Climat sécuritaire et investissements : “L'Algérie prospère, mais…” Constant dans ses positions, Ahmed Ouyahia a plaidé pour la poursuite de la lutte antiterroriste, le recouvrement de la paix et de la stabilité et lancé un appel pour fournir plus d'efforts et travailler davantage, et à ne pas compter sur les hydrocarbures en tant que principal pourvoyeur de richesses du pays. “L'Algérie, dira-t-il, vaut ce qu'elle vaut en dehors des hydrocarbures.” Le patron du RND a invité les Algériens en général et les militants de son parti en particulier à soutenir le président de la République. “L'Algérie ne pèse en dehors des richesses en hydrocarbures qu'un milliard de dollars.” Cela dit, Ouyahia a relevé avec “satisfaction” le courage et la détermination de Bouteflika dans le volet relatif au remboursement de la dette extérieur. “Tout un chacun doit reconnaître ce qu'a fourni l'Etat comme efforts, notamment dans le cadre de l'investissement. Nous espérons encore plus avec le projet proposé et relatif à la stratégie industrielle.” Affaire El Khalifa Bank : “Elle ne nuit pas à l'image de l'Algérie”. Comme il fallait bien s'y attendre, les confrères de la presse nationale ont interpellé le SG du RND sur le procès d'El Khalifa Bank et celui de la Banque commerciale et industrielle (BCIA) qui se déroulent à Blida et à Oran. “La défense fait son travail pour protéger son client. Ce qui est naturel et légitime. Mais je dirai que je suis un républicain, un légaliste et un respectueux de la souveraineté de la justice algérienne. Si cette même justice me convoque, je répondrai positivement car nul n'est au-dessus de la justice. Mais pour vous dire, je n'ai absolument aucun commentaire à faire là-dessus. Laissons la justice faire son travail.” Ouyahia dira, cependant, que l'affaire Khalifa, qu'il qualifie par ailleurs de “scandale du siècle”, “ne nuit nullement à l'image de l'Algérie et ne porte aucune atteinte aux efforts consentis dans le cadre de l'investissement. Tous les pays du monde vivent à leur manière des scandales tout en gardant leur bonne image.” En revanche, Ouyahia fera sa mise au point aux lectures que font les “observateurs” concernant le secteur de la justice. “J'avais dit en 2001, lorsque j'étais ministre de la Justice, que les lois allaient changer dans cinq ans. Mais les mentalités prendront vingt ans pour encore évoluer. Je remarque beaucoup de sorties en ce qui concerne les affaires de corruption. Il ne suffit pas d'avoir un programme pour lutter contre ce phénomène. Aujourd'hui, il faut passer au cap de la dénonciation !” a-t-il martelé. Anniversaire de Abdelhak Benhamouda : “Le RND n'a pas la mainmise sur l'UGTA”. Interrogé sur le geste du RND qui a rendu un hommage à Abdelhak Benhamouda et la lecture qui s'en est suivie de la part de ce qu'il qualifie d'“observateurs”, Ouyahia a estimé que “rendre hommage à un homme comme Benhamouda est un événement en soi, et cela coïncide avec le 10e anniversaire de son assassinat. Pour le RND, il fallait lui rendre hommage, et nous l'avons fait par devoir de mémoire. Je vous signale que c'était Benhamouda qui avait lui-même choisi le siège provisoire du RND à l'époque. Mais, je tiens absolument à préciser que nous n'étions pas là pour la mainmise du RND sur l'UGTA ! J'avais l'honneur de travailler avec lui. En ce qui concerne les observateurs, ils sont libres et responsables de leur lecture.” Interrogé, dans le même sillage, sur le cadre de vie des Patriotes, Ouyahia a déclaré que le RND “n'a jamais changé sa vision par rapport à ces ridjal ouaqifoun”, et d'ajouter que “ces hommes ont défendu leur pays quand il le fallait. Aujourd'hui, l'Etat algérien leur a exprimé toute leur reconnaissance. Ces Patriotes ont été sérieusement atteints. L'Etat ne les a pas effacés de son dictionnaire. Et au RND, nous n'avons pas une vision négationniste.” Stratégie de déploiement du RND : “Le parti a pris une grande ampleur”. Estimant que son parti constitue une force de proposition sur l'échiquier politique, Ouyahia a déclaré que le RND est prêt pour les deux prochaines échéances électorales. Et pour ce faire, il a révélé en partie la stratégie de déploiement sur le terrain de sa formation politique : “Nous sommes prêts pour 2007 ! Nous avons un cumul d'expérience, et le parti a pris une grande ampleur à travers les 48 wilayas. Nous avons même des structures à Tinzaouatine ! Nous avons une bonne base, et le parti a réussi à atteindre sa totale stabilité. Le choix de nos candidats et de nos élus sera localement défini. Désormais, les militants et les élus ne constituent qu'un instrument pour le choix d'un candidat potentiel. C'est aux populations d'opter pour leurs représentants.” FARID BELGACEM