Se distinguant du livre (où le lecteur n'a aucune incidence sur le cours de l'histoire qui relate un vécu) et de la télévision (où le téléspectateur n'a aucune influence sur ce qu'il regarde), le jeu vidéo apparaît comme une technologie singulière. Répondant, en effet, au concept d'interactivité, il permet au joueur d'exercer un contrôle sur un monde virtuel. Dès lors que le sujet n'est plus extérieur au média, il en devient l'acteur. Cependant, ce rapport entre le joueur et le monde virtuel a connu diverses évolutions. Avec la sortie de Super Mario, le plombier italien qu'on fait sauter d'une plate à une autre. Le mode de jeu Gameplay était alors relativement basique. Plus relevé, certes, que le simple mouvement vertical proposé par un Pong ou encore le mouvement vertical et horizontal d'un Pac Man. Une étape a été franchie lors de la mise en 3D des univers vidéo ludiques. Désormais, l'écran acquiert une certaine profondeur, le joueur possédant une liberté de déplacement se rapprochant du monde réel. Or, les experts constatent deux évolutions récentes et différentes qui visent toute une participation poussée du joueur. La première consiste à briser la frontière de l'écran en poussant l'interactivité. Le modèle de cette évolution réside dans la nouvelle console de Nintendo : la Wii et sa nouvelle façon de jouer. Désormais, le constructeur nippon ne vous demande plus de faire sauter Mario mais de sauter avec Mario. Même si le comble du ridicule est atteint, ça reste fun et anodin. La seconde évolution semble plus préoccupante. Celle-ci n'extériorise pas le jeu vidéo de l'écran mais tend, au contraire, à intégrer le joueur au monde virtuel. Ainsi, dans les Sims ou dans World of Warcraft, il est demandé au joueur de se créer un personnage et de le faire évoluer dans un monde virtuel et persistant (qui ne se termine pas avec l'extinction de la machine). Rien de bien méchant pour ceux qui savent faire la part des choses. Mais un palier a été franchi avec Second Life. Il est cette fois demandé au joueur de vivre à travers le personnage créé. Par conséquent, ce personnage créé devient un monde parallèle. Il est possible de s'y réfugier pour devenir quelqu'un d'autre ! DES JEUX TROP VIOLENTS POUR DES ADOS ACCROS Counter Strike, le jeu d'action, gratuit sur le net, le plus populaire au monde, est considéré comme un sport international, notamment en Algérie. Basé sur le jeu Half Life, les gamers incarnent, selon leur choix, le personnage de terroriste ou encore de celui antiterroriste dont l'un doit déposer une bombe, l'autre la désamorcer et sauver les otages sans se faire tuer. Le jeu se déroule dans un environnement urbain, les joueurs se font que s'entretuer avec des sons de balles, d'explosions et d'éclaboussures de sang qui gicle dans tous les sens. “À vrai dire, nous ne ressentons pas cette violence car tous cela se déroule dans l'imaginaire. C'est un excellent moyen pour me déstresser et déverser mes nerfs sur des adversaires qui n'existent pas. C'est notre seule distraction”, explique Walid. Il passe près de huit heures par jour à jouer sur le Net en alliance avec des gamers du monde entier, notamment bulgares. Désormais, rien ne l'arrête, même pas l'obstacle de la langue. “Jouer avec des étrangers nous pousse à apprendre de nouvelles langues. Au début, je jouais à Counter Strike, puis j'ai découvert Lineage II, il est bien plus intéressant. Cela fait près de deux ans que je joue à ce dernier, j'ai atteint le 76e niveau”, raconte-t-il, tout en jouant sur son PC. Au cyber- game Friends, c'est un groupe de copains, âgés tous de 20 ans et plus, qui se rencontrent de temps en temps. “Au départ, nous avons commencé dans ce cyber et nous avons fait même une sélection pour le championnat du monde. Mais, maintenant, on joue à la maison car nous avons des machines plus puissantes et l'ADSL. On se voit rien que pour le fun”, remarque un de ses copains qui explique : “En ce moment, je joue avec des Bulgares, des Français, des Suédois, on s'est allié contre l'équipe d'Israël. D'ailleurs, je dois recruter du personnel pour anéantir cette équipe.” Il faut dire que même les jeux arrivent à être politisés ! PLAYSTATION III : “ASSASSIN CREED, LA GUERRE DES RELIGIONS” À peine sorti sur la Xbox 360, PS3 et PC durant le mois de novembre, dont la publicité passe encore en boucle sur la chaîne française M6, qu'il est déjà à Alger. Assassin Creed est arrivé à la capitale, version piratée bien entendu. Bien qu'il soit destiné à des joueurs plutôt adultes, pas moins de 18 ans, rien n'est mentionné sur la jaquette de la version vendue à Alger. Mais cela ne dérange personne, surtout pas les jeunes acheteurs et encore moins les vendeurs. Le jeu d'Assassin Creed se déroule en Terre sainte à la fin du XIIe siècle, lors de la IIIe Croisade, “la Croisade des rois”. L'époque n'est donc guère paisible dans ces régions déchirées par la guerre et les manigances géopolitiques. Altair, l'héros déchu de la confrérie des assassins, évolue dans ce contexte, entre Damas, Acre et Jérusalem, avec une liste des neuf futures victimes innocentes à exterminer. Plongé dans ce lointain passé sous les traits d'Altair, on se sent vite un peu perdu au milieu de ces tensions politiques entre Templiers, Anglais et Sarrazins. Ça discute, ça marchande, ça mendie, ça se bagarre… et, surtout, ça tue. Le réalisme est, en outre, renforcé par une ambiance sonore très naturelle qui rime avec le décor. Avec ses trois grandes villes, son royaume, ses neufs assassinats principaux et ses nombreux objectifs secondaires, Assassin Creed évolue. Sans parler de la liberté d'action qu'il propose, d'une durée de vie effective, plutôt aléatoire, celui-ci balancera entre quinze et vingt heures en moyenne. Le jeu est, en tout cas, chargé d'adrénaline. Mais, avant d'arriver à la fin, il faudra apprendre à devenir un véritable assassin et faire couler le sang. Beaucoup même, à l'aide d'une dague placée juste entre les doigts. Une production particulièrement impressionnante et d'un réalisme à confondre avec la vie réelle. De quoi avoir la chair de poule. Comme si les jeunes Algériens avaient besoin de ce type de violence, eux qui ont été bercés par le terrorisme ! N. A.