Les membres de l'Assemblée populaire nationale (APN) ont voté à main levée, jeudi, à la majorité absolue, les projets de loi organique relatifs à l'élargissement de la représentation de la femme dans les assemblées élues et celui définissant les cas d'incompatibilité avec le mandat parlementaire, lors d'une séance plénière présidée par Abdelaziz Ziari, président de l'APN, et en présence du ministre de la Justice, garde des Sceaux, Tayeb Belaïz. Ce dernier a d'emblée félicité la femme algérienne pour ce nouvel acquis et affirmé que ce pourcentage qui dépasse les 33% dans toutes les assemblées élues n'est que «temporaire». «Ce système de quota n'est que temporaire, en attendant d'arriver dans les plus brefs délai à l'égalité complète, puisque la Constitution ne différencie pas entre l'homme et la femme en ce qui concerne leurs droits et devoirs», atteste-t-il, en décrivant ce système comme «un mal nécessaire» qui permettra d'arriver à «un partage équitable», car selon lui, la situation de la femme dans les assemblées élues n'a pas changé depuis l'indépendance, chose qui ne convient pas à la société algérienne et à son avenir. Concernant les cas d'incompatibilité avec le mandat parlementaire, le garde des Sceaux a bien précisé que chaque élu doit impérativement se consacrer complètement à l'activité parlementaire ainsi qu'aux préoccupations des citoyens qui l'ont élu. «Un élu, quand il accepte d'être un membre du Parlement, ne doit exercer aucune autre tâche que celle-ci», souligne le ministre. Ces deux projets de loi s'inscrivent dans le cadre des réformes politiques. Pour ce qui est de la loi relative à la représentation de la femme dans les assemblée élues et qui était l'un des points phares des réformes promises par le président Bouteflika et qui a soulevé le plus de polémique, les articles 1, 4, 5, 6, 7, 8 et 9 ont été maintenus. Par contre, les articles 2 et 3 ont été modifiés. L'article 2 stipule un système de pourcentage de représentation féminine proportionnel au nombre de sièges par wilaya. Ainsi, le taux est de 20% pour les wilayas de quatre sièges, 30% pour plus de 5 sièges, 35% pour 14 sièges et plus, et enfin 40% pour plus de 32 sièges. La communauté algérienne à l'étranger a droit quant à elle à un pourcentage de 50%. La nouvelle loi établit un taux de 20% pour 14 des 48 wilayas que compte le pays, alors que le 3 stipule désormais une répartition des sièges selon le nombre de voix obtenues par liste. Le choix initial de 30% représentait un pourcentage conforme à la convention des Nations unies sur l'élimination de toutes formes de discrimination envers les femmes. S'agissant de la loi définissant les cas d'incompatibilité avec le mandat parlementaire avant l'adoption du texte, les députés ont voté chacun des 15 amendements proposés. Le changement a eu lieu sur le dernier paragraphe de l'article 3 qui stipule l'élimination de l'appartenance aux bureaux d'organisations, considéré comme un cas de non-incompatibilité avec le mandat parlementaire, avec entre autres des activités temporaires exercées dans un but scientifique, culturel, humanitaire ou honorifique, des missions temporaires de moins d'une année au profit de l'Etat, ainsi que les missions relatives à l'enseignement supérieur et à la recherche scientifique. Entre refus et abstention Le parti Nahda et le FNA ont voté «non» pour le projet de loi relatif à l'élargissement de la représentation de la femme dans les assemblées élues, tandis que les députés du MSP et le Parti des travailleurs se sont abstenus. Ahmed Hdibi, député de Nahda et l'un des auteurs de plusieurs moutures dans ce projet de loi, qui n'ont pas été retenues par la commission chargée de l'étude de ce projet, ne s'est pas gêné outre mesure pour critiquer, en marge de la session plénière de l'APN, tous ceux qui s'adonnent à la politique en déclarant que la politique est devenue un moyen pour certains de «s'enrichir», d'où la nécessité d'une enquête en ce sens. Il déclare que la loi concernant la femme n'est qu'un leurre de la part de l'alliance car, selon lui, elle n'a plus de carte en main pour gagner les élections. Il va plus loin encore en accusant le gouvernement de faire dans la «corruption politique», en se posant la question : «Comment se fait-il que dans les partis de l'alliance, la femme est absente, alors qu'ils veulent l'imposer dans les assemblées élues ? Ce n'est pas logique !» D'après lui, le fait que la femme soit élue par quota dénigre son statut et la place comme citoyenne de seconde zone. «C'est une grande humiliation pour elle», se désole-t-il et conclut : «Ils ont résumé toute la loi dans l'article 7, uniquement pour avoir plus d'argent.» Cet article stipule l'octroi d'une aide financière aux partis politiques qui mettent le plus de femmes dans leurs listes électorales. Pour Ramdane Taâzibt du PT, ce projet de loi n'est pas la solution adéquate pour régler le problème de la représentation des femmes dans les assemblées élues, en s'appuyant sur des expérience étrangères qui ont démontré l'échec de ce système de quota. Pour ce qui est du vote du projet de loi définissant les cas d'incompatibilité avec le mandat parlementaire, les députés du FNA et de Nahda ont quitté la salle avant le vote. Ceux du MSP se sont encore distingués par leur abstention au vote en compagnie de ceux du PT. Quant aux députés dissidents du MSP, ils ont voté «non». Ramdane Taazibt a expliqué le refus de son parti par l'insuffisance de cette loi à régler la problématique du «mélange de l'argent avec la politique». «Il est vrai qu'un article stipule l'incompatibilité des hommes d'affaires, des importateurs et les détenteurs de grands capitaux, mais ne règle pas l'éligibilité de ces personnes. Chose que nous avons émise dans notre amendement, et qui a été refusée», estime-t-il.