Sofiane Feghouli, ancien enfant terrible de Grenoble, a su mûrir pour s'imposer à Valence. Yvon Pouliquen, qui l'a lancé chez les pros, et Vahid Halilhodzic, son sélectionneur, nous éclairent sur sa trajectoire. «Je le vois jouer pour la première fois avec les -18 ans. Tout de suite, je l'intègre à l'entraînement avec l'équipe première et, quinze jours plus tard, il démarre chez les pros». Avec Sofiane Feghouli, tout est d'abord apparu très limpide. Du talent plein les pattes, un entraîneur qui croit en lui très jeune, à 17 ans, et des débuts professionnels prometteurs. Pouliquen, le coach qui l'a lancé chez les pros, continue, «il avait déjà tout : la technique, la vision du jeu et il était très attentif et respectueux des consignes». Le problème avec Feghouli, c'est que rien n'a coulé de source, qu'il lui a fallu emprunter des chemins de traverse pour enfin à 22 ans, donner la pleine mesure de son talent. Rapide flash-back : à Grenoble, il se révèle en Ligue 2, de très grands clubs européens se penchent sur son berceau, et il se brûle les ailes en Ligue 1. Le natif de Saint-Ouen ne joue que 26 matchs en deux saisons. La faute à une blessure au ménisque mais aussi à une sévère brouille avec ses dirigeants de l'époque. Pouliquen : «On a trop vite oublié qu'il n'avait que 20 ans» Si Pouliquen ou Halilhodzic, son sélectionneur en équipe d'Algérie, le décrivent comme «un très bon garçon, timide et réservé», il cumule les erreurs de jeunesse. A six mois de la fin de son contrat, il refuse de prolonger et s'engage avec Valence. Pour ne rien arranger, alors que Grenoble enchaîne une septième défaite de rang, il adresse un bras d'honneur aux supporters qui lui reprochent ses performances en demi-teinte. Aussitôt, Feghouli est écarté de l'équipe. C'est le début d'une longue période de disette. «Mais il faut pouvoir assumer un statut de nouvelle star, on a très vite oublié qu'il avait tout juste 20 ans», le défend Pouliquen qui avait alors quitté ses fonctions au GF38. «Ce qui est certain, c'est que si j'avais été encore entraîneur de Grenoble, je n'aurais pas attendu les six derniers mois de son contrat pour le faire prolonger». A Valence, sa première année est délicate entre séjour sur le banc et prêt (Almeria). «C'est un problème d'apprentissage : passer du statut de gamin à l'âge adulte, ce n'est jamais simple», diagnostique Vahid Halilhodzic. Halilhodzic : «Il aurait sa place en équipe de France» Et puis, il y a 12 mois, le puzzle se met doucement en place et Feghouli reprend le fil d'une carrière jusqu'ici sinusoïdale. Le 23 octobre 2011, il goûte à sa première titularisation sous le maillot de Valence. Il ne quittera plus le onze de la troisième équipe de Liga. «Je ne suis pas surpris, il a connu un passage difficile mais il a un tel talent», constate Pouliquen. Halilhodzic répond en écho : «Quand tu joues dans une grande équipe avec de grands joueurs, tu progresses plus vite qu'ailleurs. Aujourd'hui, il tient la baraque, c'est un pilier à Valence». Unai Emery puis Mauricio Pellegrino lui ont donné les clés au milieu de terrain. Cette saison, il n'a pas raté une rencontre et a déjà inscrit trois buts. «Ses qualités techniques et dans la finition, sa capacité à éliminer balle au pied, sa bonne vision du jeu me laissent croire qu'il peut devenir un très grand», prévient le sélectionneur d'Algérie. «Pour bénéficier de ce statut, il doit améliorer son physique, son jeu de tête et son agressivité». Aujourd'hui, Pouliquen et le technicien bosnien sont formels : Feghouli «aurait sa place en équipe de France». «Il n'est pas moins bon que les milieux des Bleus», juge Pouliquen. Voilà déjà quelques temps qu'il a quitté son berceau isérois mais les grands clubs lui font toujours la cour. Après Valence, c'est désormais Manchester United qui souhaite le séduire. Comme le symbole d'une trajectoire qui n'a sans doute pas encore atteint son sommet.