Dans un entretien accordé à la Chaîne III de la Radio nationale dont il était l'invité de la rédaction, le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), Me Farouk Ksentini, a plaidé pour consacrer l'Etat de droit dans la prochaine révision de la Constitution, dès l'article 1. Il a fait référence aux sacrifices des chouhada citant les exemples d'Abderrahmane Taleb, Fernand Iveton et Ahmed Zabana, pour dire qu'ils ne se sont pas fait guillotiner pour que l'Algérie ne soit pas un Etat de droit. Il estime qu'à travers l'adoption de la nouvelle Constitution, l'Algérie doit devenir un Etat de droit et se comporter comme tel en toutes circonstances. A propos de la séparation des pouvoirs entre le législatif, l'exécutif et le juridique, il faut, dit-il, la séparation des pouvoirs mais aussi le partage du pouvoir. C'est pourquoi, explique-t-il, il opte, pour sa part, pour le régime semi-présidentiel. Le président de la CNCPPDH est attiré par le modèle turc quant à la place qu'il faut accorder de l'Armée. Il propose d'adjoindre à la disposition de l'article 70 qui stipule que le président de la République est le garant de la Constitution, la notion de gardien de la Constitution, en rappelant que le chef de l'Etat est le chef suprême des forces armées. Cette conception ne comporte aucune incompatibilité, selon lui, qu'il s'agisse d'un Etat musulman ou d'un Etat laïque. A propos du nombre de mandats et de leurs durées, Me Farouk Ksentini se dit favorable à la limitation à deux mandats en allongeant à sept ans la durée du mandat, parce que, explique-t-il, il faut laisser le temps au président de la république. Le président de la CNCPPDH a évoqué dans son intervention relative à la révision de la Constitution, le problème de la liberté de la presse. Commentant le rapport du département d'Etat américain sur la situation des droits de l'homme en Algérie, il le trouve nettement excessif et orienté contre l'Algérie. Mais, ajoute-t-il, c'est peut-être le rôle des institutions qui s'occupent des droits de l'homme d'exagérer les choses. Il rappelle que la liberté de la presse est un fait incontestable en Algérie et que la démocratie s'enracine. Il propose que la liberté de la presse soit inscrite dans la Constitution. Inévitablement, le président de la CNCPPDH a abordé la question de la justice qu'il faut revoir de fond en comble, insiste-t-il. Me Farouk Ksentini rappelle que le document du regretté professeur Mohand Issad n'a pas été appliqué. Rien de ce document n'a été retenu, a-t-il affirmé. Pourtant, fait-il remarquer à propos de ce document, c'est un texte très moderne et efficace. Il fait observer que l'on a fait tout le contraire de ce que voulait le professeur Issad. Comme à son habitude, le président de la CNCPPDH est très sévère à l'égard du code de procédures civiles qu'il trouve ahurissant. Il faut s'en débarrasser de toute urgence, lance-t-il. Il a le même jugement sur la pratique de la détention préventive qui s'aggrave malgré toutes les critiques que lui-même a adressées à l'appareil judiciaire pour que cette pratique ne soit pas toujours aussi abusivement mise en œuvre. Son application est incorrecte, dit-il. Pour Me Farouk Ksentini, la situation est telle que l'on ne peut plus parler de liberté provisoire qui dans les faits n'existe plus. Le président de la CNCPPDH a abordé d'autres questions ayant trait à l'économie et à l'école. Il constate que le peuple est devenu un peuple d'importateurs et qu'il faut qu'il se transforme en peuple d'entrepreneurs et de producteurs. Quant à l'école, c'est là, explique-t-il, que se prépare l'avenir du pays. Il plaide pour une école de l'excellence, compétitive, performante. Un argent considérable est mis dans ce secteur, sans contrepartie, juge-t-il.