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Impacts de la baisse du cours des hydrocarbures et perspectives 2015/2020
Publié dans La Nouvelle République le 31 - 03 - 2015

Avec un territoire de 2,5 millions de km2, 39 millions d'habitants au 1er janvier 2015, une prévision de 50 millions en 2030, une dette publique par rapport au PIB selon la Coface en 2014 de 9,9% et des réserves de change appréciables, certes en baisse, selon la Banque d'Algérie de 179 milliards de dollars fin 2014 non compris les 173 tonnes d'or, l'Algérie peut éviter le scénario dramatique de l'impact de la chute du cours du pétrole des années 1986 (crise économique, sociale, politique, cessation de paiement et rééchelonnement en 1994). Mais cela suppose qu'existe une volonté politique de profondes réformes structurelles permises par une mobilisation sans faille de tous les acteurs économiques, politiques et sociaux. L'objectif stratégique, tenant compte de nos différentes sensibilités, en ces moments de grands bouleversements géostratégiques, est de rassembler toutes les forces sociales et non de diviser. Le langage de la vérité, sera l'exigence fondamentale pour surmonter les ajustements économiques et sociaux inévitables entre 2015/2020, objet de cette contribution, analysant la période 2007/2014 et les perspectives 2015/2016.
3.- Baisse inquiétante des réserves de change et du fonds de régulation des recettes. Les réserves internationales d'un pays sont, généralement l'ensemble des disponibilités composant le portefeuille des actifs que sa Banque centrale détient (devises, or, droits de tirages spéciaux (DTS). Pour l'Algérie, environ 83% des réserves sont placées à l'extérieur, dont 40% en euros ( la baisse du cours de l'euro abaissant proportionnellement la valeur des réserves de change) , 40% en bons de trésor américain et 20% dans les banques internationales (AAA) permettant à l'Algérie de recevoir des intérêts évalués entre 4 et 4,5 milliards de dollars par an fonction des taux d'intérêts des banques centrales et de la durée du placement. Les réserves de change selon le FMI ont évolué ainsi. en milliards de dollars : 110 milliards de dollars en 2007, 143,1 en 2008, 148,9 en 2009, 162,2 en 2010, 182,2 en 2011, 190,7 en 2012, 194,0 en 2013, 187,6 en 2014 et pour 2015/2016 dont les prévisions 2015/2016 sont établies sur un cours de 89 dollars le baril, à 172,6 en 2015 et 157,1 en 2016. Or, le cours du Brent (le prix de cession du gaz étant indexé sur celui du pétrole) s'établissent depuis juin 2014 entre une fourchette de 55/58 dollars pour le Brent et 45/50 pour le WIT. Pour le gouverneur de la banque d'Algérie dans une déclaration en date du 19 mars 2015, les réserves de change de l'Algérie se sont établies à 178,94 milliards de dollars au 31 décembre 2014 contre 194,012 milliards de dollars à fin 2013. Aussi, après une dizaine d'années de hausse continue, les réserves de change de l'Algérie sont en recul. Rongées par la hausse des importations et la chute des cours du pétrole, elles ont chuté de 15 milliards de dollars entre fin mars et fin décembre 2014. Or la loi de Finances prévisionnelle 2015 donne un déficit supérieur à 52 milliards de dollars. Au rythme actuel de la dépense publique, de versements de salaires sans contreparties productives, le puisement des réserves de change s'établirait entre 30/40 milliards de dollars par an entre 2015/2020. En cas d'un cours du baril moyen de 60 dollars ces dernières s'épuiseront horizon 2019 ; à un cours de 70 dollars horizon 2021/2022, le cas étant plus dramatique à un cours en dessous de 60 dollars. Comme conséquence nous aurons un dérapage du dinar et une tendance inflationniste que l'on comprime provisoirement par des subventions et des transferts sociaux mal ciblées et mal gérées, environ 60 milliards de dollars en 2014 soit 27/28% du PIB, mais jusqu'a quand ? Le calcul du taux d'inflation, autant que le taux de croissance, se calcule annuellement d'une période T2 par rapport à la période T1. Un faible taux en T2 par rapport à un taux élevé en T1 donne cumulé un fort taux accélérant al détérioration du pouvoir d'achat. Les données du gouverneur de la banque d'Algérie en 2013 reflètent l'évolution de 2014 par rapport à 2013. Le taux d'inflation officiel selon le FMI reprenant les données de l'ONS a été de 1989 à janvier 2015 : 17.87% en 1989 ; -25.88% en 1991 ; un pic de 31, 68% en 1992 pour rechuter à 21, 9% fin 1995 et avec une stabilisation de 5% en 1998 ; en 1999 : 4/2% ; en 2000 : 2% ; 2001 et 2002 : 3% ; en 2003 : 3,5% ; en 2004 : 3,1% ; en 2005, 1,9% ; en 2006 de 3,7% en 2007, - 4,8% en 2008, 5,8% en 2009, 3,9% en 2010 , 4,5% en 2011- 8,9% en 2012 - 5% en 2013 - 4,50 en 2014 % et 4,65% en janvier 2015. Sans les subventions, mal ciblés et mal gérés le plus pauvre bénéficiant autant que le riche et facilitant le trafic aux frontières, l'Algérie étant un des plus gros importateur au monde de céréales et un des pays qui subventionne le plus les carburants le taux d'inflation en 2014 dépasserait les 10%. Le taux d'inflation officiel est biaisé, devant l'éclater par produits selon le modèle de consommation par couches sociales (fonction de la stratification du revenu national) et surcroît comprimé artificiellement par les subventions. Car la perception de l'inflation est différente d'une personne qui perçoit 200 euros par mois de celle qui perçoit 10 000 euros n'ayant pas le même modèle de consommation. Un agrégat global comme le revenu national par tête d'habitant peut voiler d'importantes disparités entre les différentes couches sociales. Une analyse pertinente devrait lier le processus d'accumulation, la répartition du revenu et le modèle de consommation par couches sociale, devant déflater par le taux d'inflation réel pour déterminer le véritable pouvoir d'achat. Par ailleurs, ce mouvement erratique du dinar par rapport tant à l'euro que le dollar qui connait une cotation exceptionnelle au 21 mars 2015 (plus de 97 dinars un dollar) ayant perdu près de 20% de sa valeur en glissement annuel, se répercute tant sur le pouvoir d'achat des ménages que des opérateurs qui ne disposent que de très peu de visibilité sur les perspectives d'évolution de la valeur de la monnaie nationale. Ces derniers sont exposés aux risques de change, la réglementation de la Banque d'Algérie ne permettant pas l'achat à terme de devises devant trouver une solution pour ne pas décourager l'investisseur qui a besoin de visibilité à moyen terme. Par ailleurs, les réserves de change, outre qu'elles sont actuellement une des clefs de la diplomatie algérienne, (toutes ces délégations qui viennent en Algérie le font par intérêt matériel) permettent de sécuriser l'investissement et surtout d'éviter un dérapage plus important de la valeur du dinar, par rapport aux devises. Il existe une corrélation d'environ 70% entre la valeur actuelle du dinar et ce stock de devises via la rente des hydrocarbures, autrement, le dinar flotterait à une parité de 300/400 dinars l'euro.Rappelons tout de même qu'il existe une disparité importante entre le cours officiel et le cours sur le marché parallèle de la cotation du dinar algérien avec un différentiel variant entre 45 et 50%. Qu'en est-il maintenant de l'impact de la chute du cours des hydrocarbures sur le fonds de régulation des recettes ? Précisons que le dérapage du dinar de 20% par rapport au dollar gonfle artificiellement de 20% le fonds de régulation des recettes calculé en dinars algériens ainsi que la fiscalité hydrocarbures voilant l'importance du déficit budgétaire. Créé en 2000, ce fonds est alimenté par les différences entre le prix du pétrole vendu sur le marché et le prix de référence (37 dollars le baril) retenu par la loi de Finances. Or le solde budgétaire par rapport au PIB a évolué ainsi : en 2007 6,2%-2008, 9,1%-2009, négatif 5,4%,-2010 négatif 0,4%-2011, négatif 0,4%-2012, négatif 5%-2013, négatif 1,5% et 2014, négatif 2,5%. Le solde budgétaire /PIB hors hydrocarbures est encore plus inquiétant négatif durant toute la période 2007/2014 : négatif 42,6% en 2007, -51,5% en 2008, 42,9% en 2009, 37,6% en 2010, 43,8% en 2011, 47,1% en 2012, 33,8% en 2013 et 36, 9% en 2014. Fortement sollicité pour les dépenses d'équipement, le fonds de régulation des recettes est passé de 5 238,80 milliards de dinars à fin 2013, contre 4 773,51 milliards au deuxième semestre 2014 représentant un décaissement de 465,29 milliards de dinars, soit environ 6.1 milliards de dollars. En pourcentage du PIB selon le FMI il aurait évolué ainsi : 34,6% en 2007, 38,9% en 2008, 43,1% en 2009, 40,2% en 2010, 37,2% en 2011, 33,4% en 2012, 33,4% en 2012, 31,6%% en 2013, 27,1% en 2014. Sur la base de plus de 89 dollars le baril, moyenne 2015/2016, le FMI tablait sur un taux de 21% en 2015 et 15,6% en 2016. Or, la loi de finances 2015 prévoyait des recettes budgétaires de 4.684,6 milliards de dinars et des dépenses publiques de 8.858,1 milliards de dinars, soit un déficit budgétaire de 4.173,3 milliards de dinars , plus de 52 milliards de dollars au cours de la monnaie nationale établi par la loi de Finances, 79 dinars un dollar, autrement dit environ 22,1% du PIB, qui devait être alimenté par le fonds de régulation des recettes. Au vu de la conjoncture pétrolière, le déficit sera donc plus important. La loi de finances pour 2015, en réalité, se base sur un cours de 120 dollars le baril (37 dollars étant un artifice comptable peu réaliste). Or sur la base d'un cours de 60 dollars le baril, le fonds de régulation des recettes au rythme de la dépense actuelle devrait s'épuiser dans 24 mois et à un cours entre 60/ 70 dollars dans 36 mois, d'où l'importance d'une rationalisation des choix budgétaires pour éviter une dérive économique qui entrainerait forcément de fortes tensions sociales. En résumé, qu'en sera t-il avec la chute du cours des hydrocarbures avec un système bancaire dominé à 85% par les banques publiques et avant la crise pétrolière du programme quinquennal d'investissement initialement de 262 milliards de dollars sur la période 2015-2019 , et en janvier 2015, le montant ayant été porté par le ministre des Finances, qui avait écarté toute loi de Finances complémentaire , à plus de 280 milliards de dollars ? Il s‘agira impérativement de redéfinir les priorités. Le problème central stratégique pour l'Algérie entre 2015/2025, est de réaliser la transition d'une économie de rente à une économie hors hydrocarbures, fondée sur le savoir, des entreprises compétitives et la bonne gouvernance. L'on devra privilégier des co-localisations et des co-partenariats gagnants/gagnants public/privé local ou international, devant démystifier l'apport du secteur privé productif, des fonds souverains ciblés(10/15% des réserves de change) en référence à l'expérience de la Norvège et aux pays émergents dont la Chine. L'Algérie doit et peut s'insérer intelligemment dans le cadre des valeurs internationales dont son espace naturel est l'espace euro-méditerranéen et africain, l'Afrique, continent qui devrait tirer la croissance de l'économie mondiale à l'horizon 2030/2040. (Suite et fin)

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