Les Turcs votaient dimanche pour élire leurs députés dans un scrutin crucial pour l'avenir du président Recep Tayyip Erdogan, qui espère une large victoire de son parti, au pouvoir depuis treize ans, pour renforcer sa domination contestée sur le pays. Près de 54 millions d'électeurs sont appelés aux urnes jusqu'à 17h00 (14h00 GMT), au terme d'une campagne électorale sous haute tension après un attentat à la bombe qui a fait deux morts et plus d'une centaine de blessés vendredi lors d'une réunion publique du parti kurde dans son fief de Diyarbakir (sud-est). Vainqueur de tous les scrutins depuis 2002, le Parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur) de M. Erdogan est assuré d'arriver en tête dimanche soir. Mais, pour la première fois depuis le début de son règne, il se présente affaibli face aux électeurs, victime du déclin de l'économie et des critiques sur sa dérive autoritaire. Les sondages le créditent de 40 à 42% des voix, en net recul par rapport à 2011 (49,9%). L'ampleur de cette perte de confiance sera cruciale pour le chef de l'Etat, qui a décidé de jouer son va-tout à l'occasion de cette élection. Premier ministre à poigne pendant onze ans, il a été élu chef de l'Etat en août dernier et a rendu sur le papier les clés de l'exécutif et du parti à son successeur, l'ancien ministre des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu. Mais, bien décidé à garder les rênes du pays, M. Erdogan plaide depuis pour la présidentialisation du régime et le renforcement de ses pouvoirs, contre ses détracteurs qui redoutent avec cette réforme une «dictature constitutionnelle». Pour satisfaire son ambition, M. Erdogan a besoin d'un raz-de-marée électoral. Si l'AKP rafle les deux tiers (367) des 550 sièges de députés, il pourra voter seul la réforme constitutionnelle qui renforce ses prérogatives. S'il n'en obtient que 330, il pourra la soumettre à référendum. Sinon, son rêve s'écroulera. «La participation est élevée, c'est un bon signe pour la démocratie», s'est réjoui le chef de l'Etat en votant à Istanbul, «la Turquie montre des signes de stabilité et de confiance».