Lionel Messi et Cristiano Ronaldo, qui ont marqué la décennie grâce à leurs exploits en club, peuvent-ils intégrer le panthéon du football sans avoir remporté une Coupe du monde ? Le Mondial-2018 représente la dernière chance des cracks argentin et portugais pour mettre fin à cet incroyable paradoxe. Pour devenir l'égal d'un Pelé, Maradona ou Zinédine Zidane, il ne suffit pas de remporter cinq Ballons d'Or ou quatre Ligue des champions. Ce qui permet de hisser au rang de légende des joueurs aussi talentueux que Messi ou Ronaldo, c'est — au-delà de statistiques personnelles ébouriffantes — aussi et surtout la conquête du trophée mondial avec sa sélection. Et cela même un Messi, et ses 61 buts en 123 capes en douze ans de carrière internationale, n'a toujours pas réussi à y parvenir dans une sélection d'Argentine sevrée de titres depuis 1997. La star du FC Barcelone a pourtant été toute proche du sacre suprême en se hissant en finale du Mondial-2014 mais l'Allemagne, son bourreau déjà en quarts de finale des éditions 2006 et 2010, a brisé encore une fois ses rêves de gloire. Pis, depuis la désillusion du Mondial brésilien, la «Puce» et ses compères de l'énième génération dorée des «Albiceleste» — les attaquants Sergio Agüero et Gonzalo Higuain, les milieux de terrain Angel Di Maria et Javier Mascherano ou encore le gardien Sergio Romero —, ont successivement perdu deux finales de Copa America en 2015 et 2016 contre le Chili... à chaque fois aux tirs au but ! Retraite en cas d'échec pour Messi ? «Ce sera très difficile de continuer (en cas d'échec) parce que nous sommes en sélection depuis de nombreuses années, avons disputé beaucoup de matches ensemble et perdu plusieurs Copa America. Et les gens voudront voir de nouveaux visages», a-t-il récemment confié à la chaîne argentine TyC Sports, alors qu'il avait brièvement mis un terme à sa carrière international après le dénouement cruel. «Si nous voulons devenir champions (du monde), nous devrons nous améliorer parce que notre niveau actuel s'avère insuffisant», a-t-il souligné en citant parmi les grands favoris le Brésil, Allemagne, France et l'Espagne. Un constat lucide tant l'Argentine, malgré la pléthore de talents dans son effectif, de la pépite de la Juventus Turin Paulo Dybala au serial-buteur de l'Inter Milan Mauro Icardi (24 ans tous deux), a connu toutes les peines pour décrocher in extremis l'un des cinq tickets directs pour la Russie. Sous la houlette de Jorge Sampaoli, son 3e sélectionneur en trois ans, l'Argentine devra s'extirper de l'un des groupes piège du Mondial-2018 avec la Croatie, l'Islande et le Nigeria. Son grand rival portugais Cristiano Ronaldo est tombé dans un groupe pimenté avec l'Espagne, l'Iran et le Maroc. Mais «CR7», qui a offert à sa sélection le premier titre majeur de son histoire lors de l'Euro-2016, n'a pas le même pression que la «Pulga». Moins de pression pour CR7 Dans une spirale positive depuis son sacre européen, avec un doublé historique en Ligue des champions avec le Real Madrid (2016, 2017), une hypothétique victoire au Mondial russe apparaîtrait comme un formidable bonus dans une carrière riche de trophées collectifs et individuels. «Je suis déjà entré dans l'histoire du football, pas seulement en gagnant ce Ballon d'Or. J'y étais déjà entré en remportant un Ballon d'Or, puis deux, trois, quatre, cinq : maintenant c'est normal que je rentre dans l'histoire comme joueur qui l'a le plus remporté», a-t-il déclaré jeudi soir après avoir glané son 5e Ballon d'Or, qui lui permet de rejoindre Messi en tête du palmarès. Malgré son hygiène de vie irréprochable et un mental de champion, celui qui soufflera ses 33 bougies début février laisse entrevoir un léger fléchissement depuis le début de saison. Sera-t-il capable d'éléver son niveau au meilleur moment cet été, à l'image de ce qu'il avait réalisé au printemps dernier en C1 ? Le Portugal, qui a fini 3e de la Coupe des Confédérations, en aura besoin. La Selecçao, encore trop dépendante des fulgurances de son capitaine, manque encore d'alternatives pour s'en passer. De quoi apparaître logiquement derrière la force collective du Brésil, de l'Allemagne ou de l'Espagne dans le rang des favoris en Russie. Comme l'Argentine de Messi.