Selon le gouverneur de la banque d'Algérie, repris par l'APS, le montant des titres émis dans le cadre du mécanisme de financement non conventionnel, lancé fin 2017 suite à l'amendement de la loi relative à la monnaie et au crédit, représente environ 28 % du produit intérieur brut (PIB), en comptant le montant de 4 005 milliards de dinars comme titres émis à fin septembre 2018 destinés à couvrir le déficit du Trésor public et à hauteur de 2.264 milliards DA pour le financement de la dette publique et l'inscription ,en novembre , d'une nouvelle demande de financement de 1187,2 milliards DA. Ainsi, les titres émis dans le cadre du mécanisme de financement non conventionnel étaient passés de 19,7 % du produit intérieur brut (PIB), fin septembre 2018, à près de 28% fin 2018 et ce, en comptant la nouvelle demande pour ce financement non exploitée à ce jour. Et contrairement à certaines déclarations, existant un lien dialectique entre ce financement et le niveau es réserves de change clôturées à 82,12 milliards de dollars fin novembre 2018 et inférieur çà 80 milliards de dollars fin 2018. puisque en mettant à la disposition des entreprises des dinars, ces dernières peuvent les convertir de devises dans le cadre de leurs importation (faible taux d'intégration), accélérant la baisse de ces réserves. L'objet de cette contribution est d'analyser l'opérationnalité du financement non conventionnel qui constitue une application de la théorie keynésienne applicable à une économie de marché concurrentielle structurée, par l'injection monétaire, disposant de facteurs de production oisifs (équipement-main d ‘œuvre qualifiée) et en sous emploi alors que l'Algérie souffre de rigidités structurelles avec un dépérissement du tissu productif et une dépendance vis-à-vis du cours volatil des hydrocarbures, d'où le risque avec la planche à billets, d'un processus inflationniste. Le fondement du financement non conventionnel Le conseil des ministres a retenu ce mode de financement, étant utile de préciser sa nature. Le financement non conventionnel qui est une recette néo-keynésienne anticipant sur l'accroissement de la demande à terme (investissement et consommation) mais car en cas de rigidités structurelles et de non dynamisation du tissu productif, il accélère le processus inflationniste. Le financement non-conventionnel a été utilisé mais dans une économie de marché structurée ayant un potentiel de création de valeur ajoutée envisageable dans le cas d'entreprises en croissance ou d'entreprises en restructuration, utilisé lorsque le financement traditionnel ne permet pas à l'entreprise de pleinement se développer, ou lorsque le financement n'est simplement pas disponible. En fait, lorsqu'une entreprise a des actifs et/ou génère un flux monétaire (cash-flow), des options de financement non-conventionnel s'ouvrent à elle, en complément au financement traditionnel. Les banques centrales occidentales ont utilisé ces mesures non conventionnelles qui peuvent prennent la forme de mesures d'assouplissement de certaines normes de la politique monétaire conventionnelle ou d'injections massives de liquidités dans le système financier dans des circonstances qui les justifient, notamment lors d' apparition d'un risque de déflation, un krach boursier ou obligataire, faillite d'un établissement de crédit de taille importante et crise de confiance du secteur financier. Ainsi, la Banque d'Angleterre a ainsi lancé en juillet 2012 le Funding for Lending Scheme (FLS) afin d'encourager les banques et les sociétés d'épargne logement à prêter davantage aux ménages et aux sociétés privées non financières britanniques. Ce dispositif a permis aux établissements de crédit de refinancer des prêts à long terme en apportant en contrepartie une gamme élargie de collatéraux. Ce programme à également inspiré l'opération de refinancement à long terme ciblé (TLTRO) de la BCE. Plus précisément, les mesures non-conventionnelles sont des mesures de politique monétaire temporaires dont l'objectif est le rétablissement des canaux de transmission de la politique monétaire et in fine un soutien au crédit bancaire et à la liquidité sur le marché monétaire. Les mesures non-conventionnelles se regroupent en trois catégories. - Premièrement, les mesures d'assouplissement quantitatif (ou quantitative easing, QE) sont des mesures par laquelle la banque centrale propose une quantité illimitée de monnaie aux banques commerciales. La saturation de la demande de monnaie de celles-ci doit conduire à ce qu'elles dépensent les encaisses excédentaires, c'est-à-dire qu'elles octroient à nouveau des prêts bancaires aux ménages et aux entreprises. - Deuxièmement, les mesures d'orientation des anticipations des taux futurs consistent pour la banque centrale à s'engager sur la trajectoire future de ses taux directeurs contribuant à abaisser les taux d'intérêt à moyen et long termes et à les rapprocher du taux directeur de la banque centrale. Elles prennent la forme d'engagements explicites en faveur du maintien à un niveau très faible ou nul le taux directeur pendant une période de temps significative. - Troisièmement, des mesures d'assouplissement du crédit (ou credit easing). Celles-ci tendent de contourner le blocage du canal du crédit provoqué soit par le phénomène de «trappe à liquidité», soit de tensions sur certains segments-clefs des marchés financiers. La banque centrale agit alors comme un «intermédiaire de dernier ressort» en finançant directement l'économie. De facto, un assouplissement des critères d'éligibilité conduira les banques à moins hésiter dans leur prise de risques, et donc à accorder davantage de prêts à des entreprises de taille moyenne ou petites. Le fondement de la théorie keynésienne Les «stratégies» politiques de relance keynésienne se fondent sur l'importance du rôle de l'Etat régulateur et non Etat-gestionnaire dans l'économie. Pour Keynes, en période de récession l'Etat est en mesure de stimuler la demande lorsque celle-ci est insuffisante à travers l'injection monétaire anticipant la relance de la demande globale (investissement et consommation). Le sous emploi des facteurs de production est selon Keynes dû au fait que les entrepreneurs ont des anticipations pessimistes et sous-estiment la demande effective, le salaire n'étant pas seulement un coût mais un déterminant important de la demande. L'investissement ne peut donc «repartir» que si les anticipations des entreprises sont positives. Il s'agit de redonner confiance aux consommateurs ; de mettre en œuvre des moyens de répartition des richesses permettant aux agents économiques qui ont la propension moyenne à consommer la plus élevée (c'est-à-dire les catégories sociales les plus «défavorisées») de dépenser pour mieux relancer la machine économique ; de baisser les taux d'intérêts pour stimuler le crédit à la consommation et aux investissements et enfin d'engager une politique de grands travaux publics qui provoqueront un effet multiplicateur de revenus et accélérateur d'investissements. Professeur Abderrahmane Mebtoul expert international