« Il vaut mieux que l'homme exerce son despotisme sur son compte en banque personnel que sur ses concitoyens » (John Maynard Keynes). Combattre la corruption, la bureaucratie dévalorisant le couple intelligence/ travail sur lequel doit reposer tout développement fiable et donc d'asseoir un Etat de droit, ce rêve si cher à tous les Algériens sera-t-il réalisé ? C'est l'objet de cette présente contribution d'une brûlante actualité et de surcroît très sensible en soulignant avec force que la corruption socialisée devient un danger menaçant les fondements de l'Etat et donc la sécurité nationale. Le commandement de l'ANP s'est engagé par la voix de son vice- ministre de la Défense nationale, chef d'état major de l'ANP en date du 17 juin 2019 à ce « qu'aucune exception ne sera faite à quiconque, cette voie sera celle que l'institution militaire veillera à entreprendre avec détermination, posant ainsi les jalons de l'affranchissement de l'Algérie du vice de la corruption et des corrupteurs avant la tenue des prochaines élections présidentielles» et que devant la gravité de la situation, que toutes les solutions sont ouvertes grâce au dialogue productif, pour trouver rapidement une issue à la crise dans le cadre constitutionnel 1.-Mauvaise gouvernance, bureaucratie et corruption Les différents scandales financiers en Algérie, qui touchent l'ensemble des secteurs publics et privés, la corruption s'étant socialisée, relatés chaque jour par la presse nationale, dépassent souvent l'entendement humain du fait de leur ampleur, encore que tout Etat de droit suppose la présomption d'innocence afin d'éviter les suspicions et les règlements de comptes inutiles. Pourtant, ces constats témoignent de la désorganisation des appareils de l'Etat censés contrôler les deniers publics et surtout le manque de cohérence entre les différentes structures en cette période difficile de transition d'un système étatique à une véritable économie de marché concurrentielle renvoyant à la refondation de l'Etat objet de cette modeste contribution. Ces scandales jouent comme facteur à la fois de démobilisation des citoyens par une névrose collective du fait que ces montants détournés sont la propriété de toute la collectivité nationale, et comme frein à l'investissent national et international porteur de croissance et de création d'emplois durables. Cependant, et il faut le souligner, c'est pour la première fois de l'histoire de l'Algérie que des procès publics ont lieu, du fait que la corruption existe depuis l'indépendance politique. Cela dénote de l'urgence d'une moralisation de la vie publique, en mettant en place d'autres mécanismes qui évitent que ces pratiques ne se reproduisent. La mise en place de ces mécanismes transparents renvoie à plus de liberté, d'efficacité économique, de justice sociale, (indépendance de la justice), de moralité des institutions et de démocratie. Il ne s'agit pas de créer des commissions sans lendemain qui n'ont jamais fonctionné et se pose la question quel est le rôle des institutions dont la Cour des Comptes institution dépendant de la Présidence de la République selon la Constitution, de l'Inspection Générale des Finances, étant paradoxal qu'elle dépende d'un Ministre pouvant être juge et partie et des commissions parlementaires ? Aussi s'agit-il de s'attaquer à l'essence de ce mal qui ronge le corps social qui est la bureaucratie paralysante qui envahit tout le corps social, en fait impliquant la refonte de l'Etat.C'est que la lutte contre la mauvaise gestion et cette corruption qui se généralise tendant à être socialisée, implique avant tout une moralisation de la pratique des structures de l'Etat eux mêmes au plus haut niveau, niveau de dépenses en contradiction avec les pratiques sociales malgré des discours moralisateurs, avec cette montée de la paupérisation qui crée une névrose collective. Car c'est seulement quand l'Etat est droit est qu'il peut devenir un Etat de droit Quant à l'Etat de droit, ce n'est pas un Etat fonctionnaire qui gère un consensus de conjoncture ou une duplicité provisoire, mais un Etat fonctionnel qui fonde son autorité à partir d'une certaine philosophie du droit d'une part, d'autre part par une assimilation consciente des besoins présents de la communauté et d'une vision future de ses perspectives. La manière dont sont gérés les services collectifs et l'administration alors que l'on s'appesantit souvent sur la gestion uniquement des entreprises publiques ayant à leur disposition une fraction importante du budget de l'Etat, la gestion de ces segments contredit les règles élémentaires de ce que les économistes font rentrer dans le cadre de l'économie publique. S'il faille éviter les règlements de comptes inutiles et qu'une personne est innocente jusqu'à preuve du contraire, (présomption d'innocence), pourtant comment croire aux discours, mobiliser les citoyens au moment où certains responsables au plus haut niveau ou leurs proches sont impliqués ou supposés impliqués dans les scandales financiers et peuvent-ils avoir l'autorité morale auprès tant de leurs collaborateurs que de la population algérienne ? La problématique du contrôle permanent durant la phase de la nouvelle politique économique algérienne implique le passage d'une économie à dominance étatique centralisée à une économie décentralisée impliquant l'ensemble des acteurs économiques et sociaux, loin de toute injonction administrative de type bureautique étouffant l'épanouissement des énergies créatrices. De ce fait le contrôle institutionnel (Cour des Comptes, Inspection Générale des Finances IGF, Direction Générale des Impôts) sans parler des contrôles routiniers des services de sécurité, devra s'insérer dans ce nouveau cadre pour une moralisation de l'Etat lui même par une plus grande DEMOCRATISATION des décisions économiques, sociales et politiques solidaires, où chaque acteur a un rôle strictement défini. La mise en place d'une économie de marché concurrentielle à base de concertation sociale dans le cadre de l'interdépendance mondiale – loin de TOUT MONOPOLE -impliquera de définir à l'avenir avec précision le rôle de l'Etat dans le développement économique et social et par là la nature du contrôle à mettre en œuvre. La dilution des responsabilités à travers la mise en place de différentes commissions témoignent de l'impasse du contrôle institutionnel en dehors d'un cadre cohérent, où les règlements de comptes peuvent prendre le dessus, alors que l'objectif est une totale transparence pour crédibiliser toute décision. Et lutter contre la bureaucratisation qui enfante la corruption. Le bureau comme l'a montré le grand sociologue Max Weber est nécessaire dans toute économie mais il doit être au service de la société. Il est nécessaire au fonctionnement de toute économie mais non fonctionner comme en Algérie comme pouvoir bureaucratique qui fonctionne en vase clos et qui est le pouvoir numéro 1, car les pratiques sociales contredisent souvent les discours si louables soient-ils. 2. La sphère informelle, produit des dysfonctionnements des appareils de l'Etat produit la corruption La lutte contre le terrorisme bureaucratique en Algérie renvoie à la problématique de la sphère informelle, en fait à la construction d'un Etat de droit qui implique une bonne gouvernance et pose la problématique d'une manière générale à la difficile construction de l'économie de marché concurrentielle et de la démocratie tenant compte de notre anthropologie culturelle. Car la sphère informelle, produit de la bureaucratie, contrôle plus de 40% de la masse monétaire en circulation somme colossale, avec une intermédiation financière informelle réduisant la politique financière de l'Etat sans compter toutes les implications socio- politiques et socio- économiques. Elle ne s'applique pas seulement aux catégories socio-économiques. La rumeur souvent dévastatrice, dont la voie orale est dominante en Algérie, alors que le monde avec la révolution d'Internet devient une maison de verre, n'étant que la traduction de la faiblesse de la gouvernance. Or son intégration est urgente loin des mesures autoritaires (répressives) qui produisent l'effet inverse, et ce, afin de pouvoir favoriser une saine concurrence et l'émergence de la véritable entreprise lieu permanent des richesses et donc favoriser les flux d'investissements nécessaires pour une croissance hors hydrocarbures condition de l'atténuation de la pauvreté et du chômage, la vocation de Sonatrach n'étant pas de créer des emplois. Aussi si l'Algérie du XXIème siècle, veut s'insérer harmonieusement dans le concert des Nations, la politique économique et sociale au sein de l'espace euro méditerranéen et arabo-africain ( par le dialogue fécond des cultures) devra avoir pour fondement la bonne gouvernance liée à la réhabilitation de l'entreprise, au savoir par la maîtrise de la connaissance , la ressource humaine étant l'élément déterminant. Et il n'y aura pas de développement en Algérie sans la réhabilitation du savoir et des couches moyennes productives base d'ailleurs de tout pouvoir fiable. Le nivellement par le bas (populisme) est source de démotivation et l'antinomie même du développement durable. Or le développement durable en Algérie est bloqué du fait de la faiblesse des réformes micro-économiques et institutionnelles et sur la nécessité de l'intégration de la sphère informelle qui renvoient à la construction d'un Etat de Droit, base de l'économie de marché et ce, afin de pouvoir favoriser une saine concurrence et attirer les flux d'investissement nécessaires pour une croissance hors hydrocarbures condition de l'atténuation de la pauvreté et du chômage, la vocation de Sonatrach n'étant pas de créer des emplois. Car où en est la réforme de l'école dont la dévalorisation du niveau devient alarmante ? Après les scandales financiers à répétition qui touchent tous les secteurs que dévoile quotidiennement la presse nationale et les importants découverts d'une minorité de monopoleurs rentiers auprès d'autres banques publiques, nous assistons à des recapitalisations à répétition des banques publiques qui se chiffrent à plusieurs milliards de dollars US mais que l'épongement de la dette publique sans s'attaquer grâce à la rente des hydrocarbures épuisable à terme sans s'attaquer aux causes qui sont l'inefficacité de la dépense publique, la mauvaise gestion et la corruption , risquant de revenir à la case de départ. Ainsi la réforme bancaire, lieu de distribution de la rente, doit toucher fondamentalement la nature du système et donc la propriété et pas seulement la rapidité de l'intermédiation financière (aspect purement technique), rapidité qui paradoxalement pourrait faciliter des détournements plus rapidement si l'on ne s‘attaque pas à la racine du mal qui ronge le corps social. Ainsi se pose la question suivante : combien de banques ont-elles une comptabilité décentralisée selon les normes internationales, seules condition d'audits internes sérieux ? Il convient de se poser la question de savoir si l'on peut continuer dans cette voie hasardeuse, situation qui menace le fondement de l'Etat lui-même et la sécurité nationale. Dans ce cadre, la sphère informelle produit historique de l'extension de la bureaucratie rentière qui tire sa puissance de l'existence même de cette sphère tissant des réseaux diffus de corruption n'est que la traduction de la faiblesse de la démocratisation du système économique et politique, donnant d'ailleurs du pouvoir à ceux qui contrôlent l'information ; Transparency International dans ses rapports 2000/2019 classant l'Algérie parmi les pays qui connaît un taux de corruption élevé Ainsi les surfacturations et l'utilisation de la distorsion du taux de change permettent la fuite de capitaux. La méthode résiduelle de la Banque mondiale l'évalue à plusieurs dizaines milliards de dollars avec d'importants mouvements pour certaines périodes fonction de la situation politique et socio-économique et des produits hors des frontières ; fonction de la distorsion des prix intérieurs et internationaux.