Après sept romans, l'écrivain libanais Charif Majdalani s'est vu décerner le 2 novembre un Prix spécial par le jury du prix littéraire français Femina pour «Beyrouth 2020. Journal d'un effondrement». Le livre, entamé au mois de juillet dernier, raconte au quotidien la crise que vit le Liban avec ce point d'orgue qui est l'explosion du port de Beyrouth le 4 août dernier. Un récit intime et politique sur le deuil d'un pays. «A l'origine, je ne voulais pas faire du journal ou, du moins, je voulais écrire quelque chose qui raconte notre réalité, a affirmé Charif Majdalani, invité de l'émission De vive(s) voix sur RFI. Donc, j'avais imaginé un faux journal. Un journal que tiendrait un personnage de fiction. Mais plus je l'écrivais, plus je m'apercevais que j'étais en train de raconter tout simplement la réalité avec des noms d'emprunt – c'était ridicule. Du coup, je me suis dit : ce n'est pas la peine de faire de la fiction, parce que cette soi-disant fiction que je raconte est absolument la réalité la plus brute. En fait, cela faisait écho à tout ce qui s'est produit pendant ce qu'on appelle la «révolution». C'est-à-dire l'insurrection qui a commencé en octobre dernier et qui était dirigé contre la classe politique corrompue qui a mis la main sur l'Etat pour ses propres intérêts et qui a établi avec ses citoyens un rapport mafieux. Tout cela a ruiné l'Etat. Tout cela s'est fait avec la complicité des banques. Tout cela, tout le monde le sait. Le prix spécial du jury, je pense, qu'il a été surtout décerné par solidarité pour le peuple du Liban et je le dédie évidemment au peuple libanais et à tous ceux qui étaient victimes de cette année terrible. J'en suis très heureux. Cette mention spéciale est quelque chose importante pour nous, parce que c'est une année spéciale que nous avons vécue.» Né à Beyrouth en 1960, Charif Majdalani quitte le Liban en 1980 à destination de la France pour suivre des études de lettres modernes à l'université d'Aix-en-Provence. Il revient au Liban en 1993 après avoir soutenu sa thèse sur Antonin Artaud. Dans un premier temps, il occupe un poste d'enseignant à l'université de Balamand puis à l'université Saint-Joseph de Beyrouth où il est professeur de lettres. Lors du sommet de la francophonie 2002, il publie un livre Le petit traité des mélanges. Parallèlement à l'enseignement, on peut lire sous sa plume des articles d'opinion dans divers journaux français et libanais (L'Orient-Le Jour, An Nahar, Le Monde, Libération). Il a tenu pendant un an, entre 2007 et 2008, une chronique dans le journal La Montagne et est, depuis 2006, membre du comité de rédaction de L'Orient littéraire. Depuis 2012, Charif Majdalani est président de la Maison internationale des écrivains à Beyrouth. Charif Majdalani est l'auteur de cinq romans, traduits dans six langues. Parmi les titres qu'il a publiés, on peut citer : Histoire de la Grande Maison (Seuil, 2005), Caravanserail (Seuil, 2007), Villa des femmes (Seuil, 2015), Des vies possibles (Seuil, 2019). Au cours de sa carrière d'écrivain, il a reçu le Prix Tropiques et le Prix François Mauriac de l'Académie française en 2008 et le Prix Jean Giono en 2015.