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Le livre rêvé des dévorations
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 08 - 11 - 2010

Le rêve littéraire du chroniqueur : écrire un grand traité de la digestion. Une sorte de livre culinaire qui mêle l'arôme à la métaphysique, la cuillère et les divinités. Le cru et le cuit. Selon certains, le livre de cuisine a été le livre le plus vendu durant le dernier salon du livre à Alger. Les Algériens y trouvent une sorte de manuel compensatoire du cannibalisme national peut-être. Conclusion tirée par les cheveux ? Non. L'histoire algérienne est une troublante histoire de dévorations. On mange avec tout : les yeux, les mains, les pieds et la langue. Cet instinct de dévoration a eu différents noms : bien-vacant, pénurie, agences foncières, lot de terrain, terrorisme et anti-terrorisme, redressement. Même pour l'immigration clandestine, les haraga utilisent une métaphore de dévoration «vaut mieux être mangé par les poissons que par les vers». Quand un Algérien est vaincu, on dit «ils l'ont mangé». Quand il recourt à la corruption, on dit «il a fait manger». Cet usage de la métaphore est universel mais selon des proportions. Pas ici. Il y a dans les airs un rapport de force, un système de contraintes et de chasse qui a laissé dans la culture générale cette sensation que tout se passe entre la mâchoire et l'assiette. Freud aurait appelé ça le stade oral collectif : une phase de développement du nourrisson gigantesque qui en est encore à la dévoration du sein et la déglutition du lait. Définition parfaite de l'économie nationale de l'allaitement et du sevrage. D'où le succès du livre de cuisine dans un pays qui ne produit pas ce qu'il mange : confession sur une sorte de panique généralisée qui trouve son expression dans le basculement dans le culinaire et l'assaisonnement sans fin. On pourra dire aussi que les Algériens cherchent une identité : dans l'assiette, le vêtement ou la création linguistique, mais cela serait trop beau que de limiter le diagnostic à une esthétique. Il s'agit d'autre chose. Une autre preuve ? Le ramadhan. Nous sommes le seul peuple qui vit et revit ce mois dans une sorte de panique généralisée, de peur, de violence dans la quête et l'achat. Pendant ce mois, on a fini par ne plus remarquer cette évidence nationale : tout le monde parle de nourriture pendant ce mois : les affaires religieuses, l'Etat (cycles d'importations de viande qui semble aller de plus en plus loin dans les confins du monde pour trouver des vaches hallal), le pratiquant, l'Imam et l'ENTV. La «caméra cachée» ou la causerie religieuse interviennent après le rassasiement, pas avant, comme dans toute ascèse. La justice s'occupe de condamner les déjeuneurs que la police s'occupe à pourchasser et les citoyens à persécuter.
Conclusion provisoire : il faut sonder cet instinct, ce comportement qui a peur de la dévoration en se défendant par une dévoration plus vigoureuse. Qu'est-ce que l'histoire nationale ? Un repas pour tous, servie après l'indépendance mais mal servie. Le cosmos : une figue sidérale à conquérir ? Le paradis ? Un resto universitaire. La guerre de Libération ? Une dévoration entre intestins. Le Pouvoir ? Une mâchoire. La réflexion ? Une mastication prospective. C'est sans fin. De quoi faire rêver d'un écrivain qui irait se cacher dans une grotte pour écrire une sorte de prolégomènes de la dévoration. Une introduction à la digestion comme fondement et représentation de l'univers. Un traité majeur qui ira sonder, dans le plus profond mystère, cette attitude de l'Algérien qui a érigé le rassasiement comme meilleure réponse contre la peur d'exister et le vide du cosmos. Remplir le cosmos en remplissant l'estomac qui est son portrait caché.

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