Quand le FMI souligne qu'une baisse prolongée des prix du pétrole est un risque pour l'Algérie, cela est moins une mise en garde qu'un rappel de la réalité structurelle d'une économie qui dépend outrageusement de ses recettes hydrocarbures. Le rappel de l'institution financière internationale sur la vulnérabilité de l'Algérie prend son sens dans un contexte économique mondial déprimé. Le rapport sur l'Algérie, dont un résumé a été rendu public vendredi par le FMI, n'a rien d'alarmiste. Il rappelle, chose vécue par l'Algérie dans le milieu des années 80, l'impact profond d'une baisse prolongée des prix du pétrole sur le budget de l'Algérie. On peut même dire que par rapport à celui de la Banque mondiale, le rapport du FMI est un peu plus optimiste en termes de prévisions de croissance de l'économie nationale pour 2012, qui serait de 3,1% contre 2,5% en 2011. La Banque mondiale, elle, prévoit une croissance de 2,7% seulement pour 2012. Quant aux recettes pétrolières, un récent rapport du FMI permet de penser qu'elles ne seront pas fortement affectées sur le court terme. Dans son rapport sur les perspectives de l'économie mondiale, le FMI estime que le cours du baril devrait rester aux alentours de 99 dollars en 2012 et ne subira qu'un « timide repli en 2012, en dépit des perspectives moins favorables de l'activité mondiale ». Il n'y a donc pas de péril immédiat. Pour le FMI, c'est l'orientation budgétaire expansionniste prise ces dernières années qui rend la situation budgétaire vulnérable aux fluctuations des cours du pétrole. Selon le FMI, pour que le budget de l'Algérie soit en équilibre, il faut un prix du baril supérieur à 100 dollars. Or, en cas de dégradation de la situation économique et de récession, le prix du baril pourrait connaître un recul prolongé et donc peser nécessairement sur les politiques budgétaires de l'Algérie. MAUVAIS SCENARIO Et ce risque de dégradation de la situation économique mondiale n'est plus une simple hypothèse de travail. Le FMI vient en effet de réviser à la baisse les perspectives de la croissance mondiale pour 2012 : elle ne sera que 3,3% au lieu des 4% établis en septembre dernier. C'est le mauvais scénario qui, en entraînant une baisse durable du prix du baril, devra nécessairement pousser les autorités à réduire les investissements publics et entraînera un fléchissement de la croissance et une hausse du chômage. Or, en 2012 déjà, les recettes pétrolières représenteront 24,8% du PIB contre 27,4% de 2011. Le déficit budgétaire va se creuser pour atteindre 6% du PIB contre 4% en 2011. Sans surprise, les membres du conseil d'administration du FMI soulignent que les défis de l'économie algérienne sont ceux de sa diversification, de l'amélioration du climat des affaires, de faire reculer le chômage et de réduire les vulnérabilités à moyen terme. Il faut, estiment-ils, que l'Algérie recherche une «meilleure intégration» à l'économie régionale et mondiale. UN APPEL A LA PRUDENCE Les autorités algériennes sont invitées à «redoubler d'efforts» pour préserver la stabilité macroéconomique, à revenir à la prudence budgétaire et diversifier l'économie avec un secteur privé plus solide. «Réduire davantage le chômage, en particulier chez les jeunes, et améliorer les débouchés économiques pour tous restent des besoins pressants. Des réformes structurelles plus résolues sont vitales pour atteindre ces objectifs», estime le FMI. Avec en plus une mise en garde claire qui semble liée aux augmentations salariales concédées par les pouvoirs publics. « Bien que les cours élevés du pétrole permettent de répondre aux revendications sociales urgentes et maintenir la stabilité sociale, cela devrait être géré avec prudence», indique le FMI, afin d'éviter les tensions inflationnistes et maintenir la viabilité budgétaire à moyen terme. Pour l'institution financière, la forte augmentation des dépenses courantes en 2011 a rendu la position budgétaire» vulnérable au risque de chute prolongée des cours du pétrole». En clair, il faut limiter les hausses de salaires et les recrutements et mieux cibler les transferts sociaux et les subventions. Il faut également accroitre les efforts pour mobiliser des ressources budgétaires hors hydrocarbures et réformer l'administration fiscale afin de réduire la dépendance du budget à l'égard des recettes hydrocarbures. Le FMI souligne également l'importance «d'assurer la bonne qualité et l'efficience des dépenses publiques».