La campagne électorale s'est achevée lundi à minuit. Tous les partis et leurs candidats attendent maintenant le verdict des urnes. Seul le chef de l'Etat a rompu le silence imposé depuis cette date sur le sujet des élections. Il l'a fait sous la forme d'un ultime appel au peuple lui demandant de se rendre aux urnes massivement ce jeudi, jour du scrutin. Il s'est exprimé dans ce sens hier à partir de Sétif où il s'est rendu pour présider aux cérémonies commémoratives de l'anniversaire des massacres du 8 Mai 1945. Faite quelques heures avant que ne débutent les opérations du scrutin, son adresse aux Algériens à voter en force donne à comprendre que Bouteflika a eu du doute sur l'impact de ses précédents appels de même nature dans l'opinion publique. Son ultime intervention provoquera-t-elle la prise de conscience citoyenne espérée par lui en faveur d'une participation électorale massive qu'il a présentée comme devant être la réponse du peuple aux tentatives de déstabilisation du pays et d'ingérences étrangères dans les affaires nationales algériennes ? L'ambiance qui a été celle de la campagne électorale, à savoir une absence d'engouement populaire flagrante pour le débat électoral, ne plaide pas en faveur d'une lecture optimiste. Son forcing en faveur de la participation, Bouteflika l'a justifié dans ses précédentes interventions avant celle de Sétif hier en faisant valoir que le rendez-vous du 10 mai va être aussi important pour la nation que le fut celui du 1er Novembre 1954. A Sétif, il a invoqué tour à tour toutes les révoltes populaires menées par le peuple algérien contre l'occupation coloniale et, bien entendu, les massacres du 8 Mai 1945 dont ce rendez vous devrait être, selon lui, le prolongement. Pour persuader que ses appels à voter n'ont aucune connotation partisane, mais sont dictés par l'intérêt national de l'Algérie et du peuple, Bouteflika a demandé aux électeurs de voter pour qui ils veulent, pour le courant politique de leur choix, mais de voter quand même. En s'investissant à nouveau et personnellement à quelques heures de l'ouverture des bureaux de vote dans l'opération de mobilisation de l'électorat en faveur de sa participation massive au scrutin, Bouteflika a pensé être en mesure d'inverser la tendance abstentionniste prononcée qui s'est affichée. Le chef de l'Etat n'est évidemment pas candidat, mais plus que tous ceux qui le sont et les partis qui les ont présentés, il est concerné par ce qui va advenir dans le scrutin du 10 mai. Non pas par la coloration politique de la majorité parlementaire qui en émanera, mais par le comportement de l'électorat. L'enjeu pour lui et les autres détenteurs du pouvoir réel dans le pays est que le scrutin valide les réformes politiques qu'ils ont lâchées. Ce qu'ils ne pourront faire valoir que si les électeurs y participent massivement. Faute de quoi, il apparaîtra clairement que les Algériens n'y souscrivent pas et l'expriment par l'abstention. L'impact en terme de crédibilité des élections législatives qu'ils ont promis libres, régulières et transparentes sera nul à l'étranger pour les tenants du pouvoir dans ce cas de figure, et rendra irrémédiablement infranchissable le fossé qui les sépare des citoyens.