La première sortie il y a quelques semaines de Amar Saadani contre le DRS avait clairement signifié l'existence d'un conflit entre cette institution sécuritaire et le clan présidentiel auquel appartient son auteur. Les détracteurs de ce camp avaient alors tenté de ruiner la charge explosive des propos de Saadani sur le DRS en accablant l'intéressé dont ils ont mis en avant le côté gaffeur, imprévisible et impulsif de même que les aspects troubles de son ascension au sein des arcanes du pouvoir. Qu'il ait après cela apparu avoir mis un bémol à ses attaques contre le DRS, leur a fait dire qu'il s'était fait remonter les bretelles et sommé de se taire. Amar Saadani est revenu à la charge avec une sidérante violence et en s'en prenant frontalement au tout-puissant patron du DRS. Telle qu'assénée, sa décharge démontre que le statu quo qui a semblé devoir rester immuable entre les cercles du pouvoir touche à sa fin. Au profit de qui ? De Bouteflika pense ses partisans, du DRS et de son chef estiment les détracteurs du premier en avançant que la sortie de Amar Saadani est l'ultime tentative du clan présidentiel pour forcer la voie à un quatrième mandat pour Bouteflika. Depuis un mois, le bruit court dans les cénacles et cercles politiques que la sourde bataille que se livrent les deux clans du pouvoir a atteint un point de non-retour et qu'il fallait s'attendre à ce que l'un ou l'autre engage ouvertement les hostilités. Le camp présidentiel en a manifestement pris l'initiative en faisant donner Amar Saadani Personne ne croit que Saadani, même gaffeur de la pire espèce, s'en est pris et si outrancièrement au tout-puissant et terrifiant patron du DRS par pulsion suicidaire. Le secrétaire général du FLN est un pion dans la manœuvre qui a pour objectif d'en finir avec la toute-puissance et l'inamovibilité du général Mediene alias Toufik. Il a engagé le fer avec ce dernier assuré d'être couvert par le cercle en puissance de neutraliser la velléité de celui-ci de s'en prendre à lui. L'étonnant est que ceux qui rabâchent sur tous les tons que le clan de Bouteflika et celui de Toufik sont les deux faces détestables du système prennent position pour l'un ou l'autre, comme si de leur lutte il allait en sortir quelque chose de bon pour la clarification politique et la perspective de démocratisation dans le pays. Que Amar Saadani roule pour le clan présidentiel, cela ne fait aucun doute, ceux qui le combattent et ridiculisent agissent consciemment ou non pour l'autre camp. A décharge pour le secrétaire général du FLN, il faut lui reconnaître d'avoir « osé » dire tout haut ce que pensent tout bas tous les Algériens. En ce sens pour aussi gaffeur qu'on le présente, il a le mérite même en étant instrumentalisé d'avoir ouvert un débat sur la place et le rôle du DRS auquel se refusaient les Algériens tétanisés qu'ils ont été par la toute-puissance dissuasive de cette institution. Que l'on cesse donc de nous présenter Saadani comme l'hurluberlu ne proférant que des insanités et que l'on arrête de même de nous vendre que s'en prendre à la toute-puissance du DRS, c'est s'attaquer à la stabilité et la sécurité nationales.