Le Premier ministre a insisté lors de sa dernière intervention, à la télévision, sur l'assainissement de la sphère des importateurs et l'on commence, déjà, à voir les contours des décisions prises dans ce cadre par les pouvoirs publics. Les douanes et la communauté bancaire, principales instances engagées dans le commerce extérieur, vont renforcer leur contrôle conjoint sur les domiciliations bancaires dans le cadre de la lutte contre le transfert illicite des devises opéré par certains importateurs, a confié, dimanche, à l'APS le directeur général des Douanes, M. Kaddour Bentahar. Pour stopper l'hémorragie du transfert illicite de capitaux vers l'étranger, et traquer plus efficacement les fraudes dans le secteur de l'importation, la direction générale des douanes (DGD) et l'Association des banques et établissements financiers (ABEF) signeront, dans les tout prochains jours, un avenant à leur convention d'échange d'informations conclue en mars 2014. On s'attelle, donc, à corriger ce maillon faible des liens de coopération entre les deux instances en question, une défaillance qui a beaucoup profité aux fraudeurs, doit-on relever. Il était question depuis quelques mois que les services de la Banque d'Algérie accentuent, en 2015, le contrôle des dossiers de domiciliation des transactions courantes vers l'étranger, en ciblant les établissements bancaires et les opérateurs qui activent dans l'importation, notamment en renforçant le contrôle sur les activités et opérations d'importation à risque, celles réalisées à partir de pays à la réglementation laxiste, et l'on compte à présent renforcer encore cette procédure en introduisant à travers cet avenant un contrôle anticipé sur les demandes de domiciliations bancaires présentées par les importateurs. Selon M. Bentahar, cet avenant va permettre d'établir un échange d'informations à double sens entre les douanes et l'ABEF sur toutes les demandes de domiciliations bancaires émanant des opérateurs activant dans le commerce extérieur. L'échange informatisé, qui sera institué à cet effet, permettra aux banques d'accéder au système d'informations des Douanes (Sigad) afin de vérifier l'authenticité de la validité de l'attestation d'importation exigée lors de la souscription d'une domiciliation bancaire, explique un autre responsable de la DGD. Cette attestation d'importation, qui identifie l'entreprise importatrice à travers son numéro d'identification fiscale et, donc, sa traçabilité fiscale, est délivrée par la Direction générale des impôts (DGI). Ainsi, on vise à travers ce nouveau dispositif, de mettre fin aux fausses attestations d'importation présentées par des opérateurs véreux lors de la souscription d'une domiciliation bancaire, qu'ils utilisent pour des importations fictives. C'est qu'en dépit du contrôle instauré par la convention d'échange d'informations conclue en mars 2014 entre les douanes et les banques, des failles ont subsisté dans ce système, permettant à des importateurs délinquants de tromper la vigilance des banques et des douanes, fait savoir la même source. En effet, des enquêtes menées par les services des douanes ont révélé l'utilisation d'attestations d'importation falsifiées, et ce, par des personnes qui n'ont pas de statut légal d'importateurs mais qui réalisent, à travers cette »ruse», des opérations d'importations fictives en vue, uniquement, de transférer des capitaux vers l'étranger, relève le même responsable. Rappelons, aussi, que d'autres investigations menées ces dernières années sur le transfert illicite de capitaux vers l'étranger ont révélé les différentes formes adoptées par les fraudeurs, dont l'importation de marchandises sans valeur commerciale et leur abandon, le dédouanement de marchandises faiblement taxées et exagérément surfacturées, les transferts bancaires de devises sans débarquement de contrepartie en marchandises ainsi que la double facturation pour une même importation. La nécessité d'établir un contrôle anticipé sur toute demande de domiciliation bancaire, selon la même source qui précise que cette proposition a été présentée au ministère chargé du Budget et de la Prospective qui en a donné l'aval, s'avère capitale pour juguler ce phénomène. Enfin, la mise en oeuvre de la convention d'échange d'informations conclue en 2014 entre les douanes et les banques aura quand même mis fin à la gestion archaïque des documents douaniers, obéissant jusque-là à un traitement manuel, notamment le «D10 copie banque», naguère largement falsifié par des importateurs pour transférer illicitement des capitaux vers l'étranger. Le D10, qui atteste de l'arrivée de la marchandise, sa valeur ainsi que des tarifs douaniers appliqués à l'importation, s'échange, depuis, entre les banques et les douanes via ce système d'informations qui a mis fin aux documents scannés et transmis par courrier. L'échange de données à travers un système informatisé entre les banques, la douane et les services des impôts, devrait permettre un meilleur contrôle du transfert des capitaux à l'étranger. Mais on estime dans ce contexte qu'il faut toujours rester en éveil, car il faut prévoir que le «génie » des fraudeurs cherchera toujours à s'engouffrer à travers la moindre faille dans le système.