Les dénonciations du ministre du Commerce, Bekhti Belaib, concernant des pratiques mafieuses de certains barons de l'import-export viennent raisonner comme un violent aveu de faiblesse. Du haut de son poste, il est réduit à faire des constats d'échec comme un «vulgaire citoyen de seconde zone». La république qu'il représente est-elle réduite à une simple plaignante désœuvrée ? Ne pouvait-il pas engager une procédure judiciaire? Il semblerait que non, puis qu'il n'est pas le seul ministre à se trouver dans ce cas de figure. Le cas Belaïb rappelle étrangement celui du ministre Nouri aux prises avec la mafia de l'immobilier dans le détournement de terres de Dounia Parc. Le ministre de l'Environnement était venu de la même manière se plaindre devant la presse d'une situation décrite comme délicate, voire explosive. 65 hectares de terres auraient, rappelle-t-on, été octroyés illégalement dans des circonstances plus qu'obscures. Mais là encore, et à ce jour, aucun recours n'a été déposé devant les tribunaux! El Hadi Ould Ali, quant à lui, vient d'ordonner la fermeture pour six semaines du stade du 5-Juillet pour un énième remplacement coûteux de pelouse (au temps de l'austérité). Pourtant, les Algériens pensaient qu'après des rénovations de plus de 400 millions d'euro, le stade était enfin sorti de la salle de réanimation. C'était sans compter sur l'incompétence de certains, et probablement, l'avidité d'autres. Le ministre de la Jeunesse et des Sport qui devait sanctionner le directeur du stade (puisqu'il est responsable de sa gestion) nous a sorti un tour de passe-passe digne des plus grands prestidigitateurs afin de ménager la chèvre et le chou. Il promet en grande pompe une commission d'enquête ministérielle afin de déterminer les causes de l'invasion des champignons. La même commission que réclamait le peuple et qu'il (le ministre) trouvait inutile pour déterminer les responsabilités dans le cuisant échec olympien. Dans le ministère de l'Education voisin, l'herbe n'est pas plus verte. Madame Benghebrit, qui fait face à des charges systématiques des milieux islamistes, semble devoir montrer patte blanche à chaque événement qui transgresserait les mœurs qu'ils imposent. Le retrait du livre de géographie de première année du cycle moyen et les excuses qui s'ensuivirent témoignent de la fragilité des assises de la ministre. Une ministre sur un siège éjectable, défiée par une professeure. La réalité est que ces ministres, des technocrates pour la plupart, sont des employés entièrement dévoués aux présidents Bouteflika (s) et qui font marcher les affaires courantes du pays. Ils servent un agenda comme on court un relais, se transmettent le témoin de l'échec ; de ministre en ministre, de revers en déboires. Ils sont les fusibles d'un pouvoir inchangé, l'enthalpie qui permet l'équilibre des pressions populaires. Ils sautent au rythme des révoltes, entretiennent l'illusion du changement lorsque l'immobilisme fatigue nos espoirs. Ils ne peuvent pas régler une situation chaotique généré et entretenue par le pouvoir, empêcher le serpent de se mordre la queue. Ils servent toutefois à semer le doute quant aux intentions claniques bouteflikienne; le «poker face» qui cultive l'ambiguïté. En 2002, Bouteflika se complimentait devant les chaînes de télévision françaises d'avoir pu débaucher Khalida Messaoudi, héroïne déchue depuis, de toute une génération. Il en a fait une vitrine de ses fausses intentions progressistes et féministes. Il en a fait aussi la cible des islamistes et l'ennemie de tout un peuple. Son limogeage, comme celui d'Amara Benyounès et tant d'autres, aura servi au final à lui faire traverser le temps et à assurer quatre mandats.