Faire un spectacle pour produire de la joie est en soi un acte républicain notamment en ces moments de tourmente nationale. Soolking, ce nouveau Roi de scène a su, après les plateaux internationaux, gagner le sien, celui de ses compatriotes. Malheureusement la mort a fauché des vies avant bien que ne fauche le son musical le ciel d'Alger. Il aurait fallu 5 morts et plusieurs blessés pour que cette entité soit publiquement invoquée. Un concert d'une star, presque une icône pour les jeunes, au lieu de donner de la joie pour une jeunesse en désarroi, se mue en mouroir. Voilà qu'un stade, ses accès se transforment en catafalque. Paix à leur âme. Que justice soit faite. L'erreur fatale et coupable n'aurait pas été dans le nombre - il y a eu des rencontres de football qui ont drainé des dizaines de milliers de spectateurs - si l'organisation n'était pas un travail de stagiaire malgré l'enracinement d'un faux professionnalisme et une éternité dans les carrières des responsables. L'Algérie déplore cette disparition et implore l'exemplarité dans l'identification et la mise au ban des auteurs insoucieux. L'on ne peut concevoir qu'à la veille d'un aussi important événement, l'on se permet d'aller se balader dans les Streets de Manhattan de surcroît quand on est en charge de la construction d'un grand concert. Pourtant la ministre de la Culture, avions-nous appris, avait « inspecté les lieux ». L'on aurait voulu savoir ses instructions, directives en la matière. Et là, devant nos morts, au chevet de nos blessés, on attend des mesures. Si, six mois de Hirak, autant de vendredis, de mardis, de coupures de routes, aucune vie - presque - n'était à pleurer, il aurait suffi d'un fatal quart d'heure pour que le drame ait lieu dans un lieu censé donner de la fête. Les pouvoirs publics ne doivent pas se suffire à la confection attristée de superficielles sincères condoléances. Ils doivent agir contre l'inamovibilité, l'esprit pacha et les fausses ambitions de certains gestionnaires de quelques portions culturelles. Les caisses de l'Organisateur - impénétrables, comme un secret des dieux - vont se mettre en offre pour dédommagement et dépôt de gerbes de fleurs sur les pierres tombales des défunts. Cet organe utile par ailleurs passe pour alimenter les pauvres comptes de pauvres artistes. Le parcours du combattant y est de mise. Le récent exemple est celui de cette artiste qui habite dans un gourbi et à qui l'on aurait offert un chèque dérisoire qu'elle avait vaillamment refusé. Que de gens sont partis sur la pointe des pieds sans pouvoir dire à ces gens-là, les supposés détenteurs de leurs droits : Attendez que l'on crève et faites de nous des héros. Des sommités, des génies, des inégalés. Attendez que l'on crève et rendez-nous les honneurs, ces takrimates vides et dépeuplées. De nos cadavres, tirez vous' en des gloires et des trophées. Faites-vous décorer par nos étoiles étiolées. Ni vos discours, ni vos condoléances, ni même vos fausses larmes ou vos émotions contrefaites n'animeront nos dépouilles. Un titre d'héroïsme, de martyre, un papier cadré bien encadré, doré, vous rendra utiles de le discerner aux parents, proches, amis et alliés des victimes. Si l'on demandait à tous les chanteurs, compositeurs, artistes, dramaturges ce qu'ils pensent de cette entreprise qui gère leur avenir, ils vous diront des choses amères, des choses ingurgitables, comme du temps d'un certain ONCI. Les indéboulonnables. La responsabilité de ces morts ne doit être imputable à personne, ni à quiconque ou à quelques éléments de circuit, d'orientation. Elle est dans le cœur même de l'organisateur, elle dépasse une simple responsabilité civile pour s'installer dans son insouciance vis-à-vis des conséquences de la circonstance tragique. Cependant la responsabilité politique est dans la tutelle. Ce concert n'est pas une inauguration protocolaire d'un banal festival. Que chacun assume son segment d'implication passive, de mauvaise délégation d'attributions ou d'absence de supervision, de pilotage et de bon suivi.