Des boulangers ont tenu à souhaiter la bonne année à leur clientèle avec de larges affiches collées sur les murs intérieurs de leurs locaux, bien en vue, et indiquant que la baguette de pain est vendue à un prix de 15 dinars. A prendre ou à laisser, ces boulangers sont passés à l'action, en décidant d'une manière unilatérale d'augmenter le prix de la baguette de pain «ordinaire» à un taux de 50% (de 10 dinars, la baguette de pain est passée à 15 dinars). Après une grève de trois jours observée au mois d'octobre dernier, plus marquée à l'Est du pays, les boulangers ont surpris les consommateurs à travers cette hausse du prix de la baguette de pain à partir du 1er janvier 2022. De quoi alerter les citoyens à propos des hausses qui les attendent à partir de cette date. Plusieurs citoyens croyaient, en effet, qu'il s'agit d'une hausse autorisée par les pouvoirs publics, tellement les boulangers semblaient sereins dans leur comportement, ainsi que ces affiches en grosses lettres annonçant cette augmentation à 15 dinars la baguette de pain qui dissipe tout doute quant à la légalité de la décision. D'autant que cela coïncidait avec la levée des subventions généralisées de l'Etat sur les produits de première nécessité, abordée dans le cadre de la loi de finances 2022, publiée dans le Journal officiel, mais qui n'est pas encore entrée en vigueur. Mais, en avançant dans la journée, la nouvelle qui a fait le tour sur les réseaux sociaux a alerté les autorités et les organisations de défense des consommateurs, qui ont officiellement dénoncé une décision unilatérale qui foule aux pieds la réglementation sur ce registre. Le prix de la baguette de pain reste inchangé, à 10 dinars, un prix également non réglementaire mais tout juste «toléré», car le prix réel, réglementé, de la baguette de pain, inchangé depuis plus 25 ans, est de 7,50 dinars. C'est l'Organisation algérienne de protection et d'orientation du consommateur et son environnement (APOCE) qui a été la première à réagir face à cette hausse surprise du prix de la baguette de pain, en appelant les autorités compétentes à intervenir afin de mettre fin à cette situation. A travers un post publié sur sa page Facebook, l'organisation APOCE a précisé que « le prix de la baguette de pain ordinaire est réglementé», relevant que les « boulangers ne peuvent pas le revoir sans une décision de gouvernement», et appelle dans ce contexte à «l'intervention des agences de régulation d'agir pour arrêter les abus contre le consommateur». Joint, hier, au téléphone, le président de l'APOCE, le Dr Mustapha Zebdi, nous a affirmé que son organisation a reçu des centaines de réclamations provenant de toutes les régions du pays à propos de cette hausse du prix de la baguette de pain ordinaire. «Nous avons toujours accompagné les revendications des boulangers, que nous trouvons légitimes, mais nous dénonçons cette hausse qui met le consommateur devant le fait accompli», nous a déclaré notre interlocuteur. Précisant que «nous trouvons que les revendications des boulangers sont légitimes, mais cela ne veut pas dire pour autant que nous sommes pour une hausse du prix de la baguette de pain. Car, il y a d'autres mécanismes à mettre en œuvre qui pourraient permettre aux boulangers de gagner jusqu'à 20% de bénéfice, dont l'utilisation de la farine complète, plus saine, au lieu de la farine blanche, ainsi que l'allègement fiscal qui peut équilibrer les recettes». Notre interlocuteur n'a pas manqué de rappeler que «le prix de la baguette de pain tel qu'il est, à 10 dinars l'unité, est déjà illégal, et nous appelons les autorités compétentes à actualiser la réglementation à ce niveau de la tolérance, avant de songer à autre chose sur ce plan». De son côté, l'UGCAA a souligné à travers un communiqué qu'elle se «démarque des appels à augmenter le prix du pain subventionné à 15 dinars», et affirme que «ce comportement exposera le boulanger aux sanctions en vigueur». L'Union a indiqué que toutes les revendications légitimes des boulangers «ont été soumises aux pouvoirs publics pour les prendre en charge, notamment après la hausse des prix des intrants à l'instar de la levure et des améliorants, en vue d'assurer une marge bénéficiaire acceptable pour les boulangers sans pour autant compromettre le pouvoir d'achat du citoyen». Qui assume, ou qui a appelé, alors, à cette hausse du prix de la baguette de pain ? Notons que des brigades de contrôle mixtes ont entamé, hier, des visites au niveau des boulangeries, et des PV ont été dressés à l'encontre de ceux qui ont maintenu la hausse du prix de la baguette de pain.