La consommation de différentes drogues et psychotropes est considérée, aujourd'hui, comme un problème de santé publique, dont il est nécessaire de prévenir et de traiter les toxicomanes au lieu de penser seulement au volet répressif. Personne ne peut nier que la consommation excessive de drogues et de substances psychotropes a atteint une proportion alarmante, touchant des jeunes des deux sexes et parfois même des enfants. Différentes institutions de l'Etat ont accordé leurs violons pour lutter ensemble contre la drogue et les psychotropes, mais pas seulement du point de vue sécuritaire, mais aussi sous l'angle de la santé publique. Et ce, en se lançant dans des actions de prévention et de traitement de la consommation de différentes substances, notamment les psychotropes. Les services de la Caisse Nationale des Assurances Sociales des Travailleurs Salariés (CNAS) ont lancé depuis, le 30 mai dernier, des campagnes de sensibilisation relatives aux dangers de la consommation de la drogue, placées sous le slogan « la sécurité sociale vous accompagne contre les dangers de la drogue ». Une initiative placée sous l'égide du ministère du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale et qui s'inscrit dans le cadre de la protection des citoyens et des assurés sociaux des dangers des drogues et leurs effets néfastes sur leurs vies et celles de leur entourage. Les services ont ainsi lancé un programme axé notamment sur l'organisation de journées d'information en direction des étudiants et des stagiaires des centres de formation qui ne sont pas à l'abri des dangers de la toxicomanie. Cette action de sensibilisation s'inscrit dans le cadre du plan stratégique qui prévoit la réorientation de l'action sanitaire et sociale vers la prévention afin de consacrer son rôle actif dans l'amélioration de l'état de santé des citoyens et les accompagner dans la lutte contre ce fléau qui prend de l'ampleur dans la société algérienne. Le Dr Laadjouzi Lamia, médecin psychiatre a mis l'accent jeudi dernier, lors de la tenue d'une journée de formation et de sensibilisation contre les dangers de la drogue, organisée par l'agence CNAS d'Alger, sur l'action des parents et leur rôle qui demeurent prioritaires notamment en ce qui concerne l'éducation sur les drogues. Elle dira que les parents doivent être sensibilisés davantage comme ils doivent connaître les effets à des drogues et leur nature de manière spécifique et détaillée. Ils doivent aussi connaître les comportements des personnes qui consomment de la drogue pour agir précocement. Elle a ainsi appelé à la participation cohérente de tous les acteurs de la vie communautaire dans la lutte contre ce fléau qui touche tous les pays du monde. Les centres intermédiaires d'addictologie dépassés par la demande Le Dr Feriel Bourayou, psychiatre principal, responsable de l'unité d'addictologie au niveau de l'EHS de Chéraga a affirmé au Quotidien d'Oran, en marge de cette journée de formation, que son service est actuellement dépassé par la demande. En précisant que malheureusement aujourd'hui, les toxicomanes prennent des drogues dures, telles que les psychotropes de type Prégabaline, communément appelé «Saroukh» ainsi que d'autres opiacés, ayant un grand pouvoir addictogène. Et de regretter le fait que les services de son unité reçoivent également en ambulatoire de plus en plus d'adolescents et des enfants qui inhalent du gaz de briquet, utilisé comme stupéfiant ou gaz hilarant. Elle précise que ces pratiques provoquent des atteintes neurologiques graves. Le Dr Bourayou a affirmé qu'en dépit de la spécificité et la complexité de la prise en charge des toxicomanes, les équipes de l'unité d'addictologie de l'EHS de Chéraga font beaucoup d'efforts, à travers une prise en charge pluridisciplinaire. Elle dira «nous disposons de médecin psychiatre, de médecins généralistes et des psychologues spécialisés en addictologie», précisant qu'ils font un travail dans l'ambulatoire. Avec la possibilité d'orienter les patients vers les deux centres d'addictologie et de lutte contre la toxicomanie existant, en cas de complications nécessitant une hospitalisation. La méthadone : «nous avons de très bons résultats» La méthadone est une substance synthétique de la famille des opiacés, mais sa prise avec des doses correctes, bien évidemment sous surveillance d'une équipe médicale spécialisée en addictologie, peut bien réduire la dépendance aux opiacés et aider également les toxicomanes à se stabiliser et avoir une vie normale. C'est ce qui a été confirmé auprès du Dr Bourayou qui a souligné qu'en 2021, l'année de l'introduction effective de la méthadone en Algérie, « 50 patients ont été traités avec cette substance à l'EHS de Chéraga ». Et d'affirmer qu'en 2022, il y avait une rupture ou la commande n'a pas été reçue à temps. Mais en 2023, les choses sont rentrées dans l'ordre, où 100 patients sont actuellement traités avec de la méthadone. Elle ajoute que selon les recommandations du ministre de la Santé, « nous allons ces jours-ci recevoir 150 autres patients pour bénéficier de ce traitement de substitution aux opiacés ». Elle a affirmé que la prise de la méthadone a donné de très bons résultats « avec même une réinsertion sociale et professionnelle des patients avec une réduction des risques ». « Sachant, dit-elle, que 80% des injecteurs de drogues sont souvent positifs à l'hépatite C et B ». Selon le Dr Bourayou, ces services reçoivent beaucoup de gens qui demandent des informations sur la méthadone. Et d'ajouter qu'elle est administrée chaque jour aux patients en ambulatoire, selon des critères de sélection et de priorités, arrêtés par les services du ministère de la Santé. Elle est donnée en priorité aux patients ayant une maladie somatique, diabétique, ceux ayant l'hépatite C, les personnes hypertendues et ceux ayant une endocardite infectieuse et ceux aussi qui ont fait des complications suite à la consommation excessive de drogues. Notre interlocutrice a affirmé aussi que les injecteurs (ceux qui prennent des drogues par injection) sont prioritaires par rapport à ceux qui inhalent la drogue. Et d'affirmer que la méthadone est également administrée aux patients qui ont fait plusieurs tentatives de sevrage et qui n'ont pas réussi. Saisie des drogues dures durant les trois premier mois de l'année 2023 L'officier principal au niveau de la sûreté nationale, M. Assaoui Khaled, a, dans son intervention, fait état de la saisie d'importantes quantités de drogues dures durant les trois premiers mois de l'année en cours (2023). En précisant que les saisies sont passées de 2 kg de cocaïne en 2020, à 20 kg en 2021, et à 25 kg en 2022 et à 14 kg rien que pour les trois premiers mois de l'année en cours. Pour ce qui est de l'héroïne, pas moins de 8,497 kg ont été saisis par la police en 2022, et de 0,932 g durant les trois premiers mois de l'année en cours. Pour ce qui est du cannabis, 9 tonnes et 507 kg de cannabis ont été saisis en 2021 contre 5 tonnes et 35 kg en 2022 et 2 tonnes et 267 kg durant les trois premiers mois de l'année en cours.